« Des signaux positifs, mais insuffisants ». C'est, en substance, ce qui ressort du rapport de Transparency Maroc pour l'année 2008 présenté, samedi dernier, lors de sa 13e assemblée générale. Ces signaux sont matérialisés par l'instauration de l'Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) et par la publication des textes relatifs à la déclaration du patrimoine. Mais la tendance marquante demeure la confirmation d'une corruption endémique qui prospère à l'abri « d'une impunité entretenue par les pouvoirs publics », selon le rapport. « L'année 2008 a connu des chantiers importants, mais ce n'est pas encore ce que nous attendons », a déclaré Rachid Filali Meknassi, secrétaire général de Transparency Maroc. Par ailleurs, les indicateurs 2008, publiés annuellement par Transparency International, confirment la pratique courante de la corruption. Ainsi, selon l'Indice de perception de la corruption (IPC), le Maroc a maintenu la note de 3,5 qu'il avait obtenue l'année précédente, mais son classement dégringole de la 72e à la 80e place. Cette situation, explique-t-on à Transparency Maroc, est dûe, d'une part, au retard qui a marqué l'adoption des réformes annoncées dans le plan d'action gouvernemental de 2006, et d'autre part, aux progrès enregistrés par huit pays qui ont amélioré leur score par rapport à l'année précédente. Un résultat similaire se dégage de l'Indice de corruption des pays exportateurs 2008 (ICPE) qui a englobé le Maroc pour la première fois. Il s'agit d'un sondage qui s'intéresse au point de vue des hommes d'affaires et des gestionnaires des pays et des entreprises exportatrices, dans le but de procéder au classement des pays les plus actifs dans l'exportation de la corruption. Les hommes d'affaires marocains interrogés considèrent que leurs propres entreprises sont fortement impliquées dans les pratiques de corruption au Maroc et dans la région. Elles ont recours tant à la corruption des agents publics pour accélérer et faciliter les procédures (46%) qu'aux relations familiales et amicales pour influencer les décisions relatives aux contrats publics (33%). D'un autre côté, les personnes interrogées expriment un jugement critique sur l'action du gouvernement dans la lutte contre la corruption. 67% la considèrent très (ou tout à fait) ineffective, 27% la jugent effective et à peine 3% très effective. L'impression défavorable est plus manifeste encore à l'égard du système judiciaire marocain. Il vient en tête des services publics corrompus avec une note de 3,6 sur 5, suivi de la police (3,4), des activités liées à la délivrance des permis et autorisations (3,1) et des services de santé avec 3 points. Ces domaines ont déjà été considérés parmi les plus corrompus dans l'enquête du Baromètre mondial de la corruption en 2006. Reste que, l'association a salué la qualité du travail réalisé par un certain nombre d'instances nationales. Pour elle, les rapports de la Cour des comptes et de Diwan Al Madhalim sont venus étayer, par des témoignages précis, la faible gouvernance du service public et l'impunité dont bénéficient souvent les auteurs de conduites qui correspondent manifestement à la définition de la corruption sous les différentes qualifications pénales retenues par la loi. Par ailleurs, l'assemblée générale a été l'occasion pour les responsables de Transparency Maroc de présenter les projets en cours et futurs de l'association, notamment le travail de monitoring et de documentation effectué par l'Observatoire national de la corruption ainsi que le lancement du Centre d'assistance juridique et d'action citoyenne (CAJAC) destiné à fournir l'assistance et le conseil aux victimes de la corruption. A signaler que Transparency Maroc, créée en 1996, n'arrive toujours pas à obtenir le récépissé de dépôt de sa déclaration administrative. La situation actuelle serait, selon Filali Meknassi, d'autant plus inacceptable que l'association est devenue, au fil des années, le partenaire des pouvoirs publics en matière de lutte contre la corruption. Le citoyen, on s'en f... 59e sur 85 pays avec un score de 27 sur 100, juste après le Malawi et avant le Niger. C'est le score obtenu par le Maroc dans la nouvelle enquête Open-budget (OBI) 2008 réalisée par Partenariat budgétaire international (IBP) et dont les résultats seront détaillés ce mercredi lors d'une rencontre avec la presse. Dans ce classement, le Maroc fait ainsi partie de l'avant-dernier groupe de pays qui fournissent une information minimale à leurs citoyens. En 2006, le Maroc était classé 53e sur 59 et avait un score de 19. Depuis l'enquête 2006, des gouvernements ont pu augmenter de façon significative l'accès à l'information « en publiant tout simplement ce qu'ils avaient déjà produit », soulignent les experts. « Le Maroc peut améliorer de manière très significative son mauvais score s'il agissait simplement de la sorte ». Globalement, cette enquête montre que 68 des 85 pays enquêtés, 80% ne fournissent pas au public les informations détaillées, opportunes et utiles dont les citoyens ont besoin pour comprendre, participer et surveiller l'utilisation des fonds publics. Cette enquête montre également que de nombreux gouvernements produisent les informations budgétaires mais ne les publient pas. Dans 51 des 85 pays enquêtés, le gouvernement produit au moins un document-clé qui n'est pas révélé au public. Selon les experts, « la restriction de l'accès à l'information entrave la capacité du public, des journalistes, des commentateurs, des universitaires et des organisations de la société civile à exiger la redevabilité (et la responsabilisation) des décideurs et crée des opportunités pour que les gouvernements dissimulent les dépenses impopulaires, inutiles ou liées à la corruption ».