Il croyait ne rien faire de mal, mais brandir une banderole portant l'inscription «Vive le peuple !», lui coûte un casier judiciaire désormais chargé. Lui, c'est Mehdi Moujahid, un jeune homme de 19 ans, membre du Mouvement du 20 février, poursuivi par la justice marocaine. Sa famille et les militants des droits de l'homme sont mobilisés pour faire lever les charges qui pèsent contre lui. En liberté provisoire, Mehdi Moujahid est actuellement poursuivi par la justice après avoir brandi une banderole portant l'inscription : «3acha acha3b», en français «Vive le peuple !», un slogan phare du Mouvement du 20 février (M20). Tout a commencé lors d'un Match de hand ball opposant le Maroc à la Tunisie, le 19 janvier dernier. Plusieurs supporters crient à tue-tête le fameux slogan. Arrêtés, ils sont relâchés quelques heures plus tard, à l'exception de Mehdi. Il se trouve qu'il est le seul militant du M20 et appartient aussi aux Ultras Askary Rabat, des supporters impliqués dans les mouvements contestataires, selon Rue 89. Il passe la nuit au commissariat de Rabat puis est conduit devant le procureur le lendemain matin. Ce dernier décide de le poursuivre pour outrage à agent de l'ordre. «Arrestation arbitraire» «Ce qui est bizarre, c'est que cette expression ne contient aucune atteinte ni à l'Etat, ni à la personne du roi [...], déclare à Rue 89 Mehdi Bouchoua, militant du M20. Cette arrestation est arbitraire et n'a aucun fondement, poursuit-il. Cela démontre que nos responsables ne veulent pas que le peuple marocain se rebelle contre la sacralité et qu'il réclame de vivre dignement. Ils veulent continuer à nous assujettir». Il considère que ce procès ne peut pas faire taire le Mouvement. «La situation a changé et le 'Makhzen' a du mal à s'ajuster… L'idée est de revenir à la situation antérieure au 20 février 2011, d'effacer tous les acquis du Mouvement en termes de liberté d'expression. Ils font tout pour ça.» Un pays où les droits humains sont inexistants C'est ce que pense la famille de Mehdi Moujahid. «L'arrestation de mon fils est abusive : c'est en raison de ses opinions, affirme son père. Il est militant du Mouvement du 20 Février, il avait une banderole avec l'inscription "vive le peuple"... J'appelle les organisations, la société civile à nous soutenir, nous sommes dans un pays où les droits humains les plus élémentaires sont inexistants.» Tous dans l' attente… Le Mouvement du 20 février n'a encore mené aucune action officielle depuis que la poursuite judiciaire de Mehdi est lancée. «On n'a pas encore décidé de quelque chose. On a une assemblée générale dans les semaines à venir. On verra ce qu'il y a lieu de faire, indique à Yabiladi Najib Chaouki, porte-parole officieux du M20 Rabat. L'Association marocaine des droits de l'homme [AMDH] suit de près le dossier. «Il y a des avocats qui suivent l'affaire. Comme il est poursuivi en liberté provisoire, c'est moins difficile à suivre, ce n'est pas comme s'il était en prison, déclare à Yabiladi la présidente de l'association, Khadija Riyadi. On attend de voir s'il est disculpé ou pas. En fonction du verdict, on verra ce qu'il y a à faire». Taib Madmad, membre du bureau central de l'AMDH Salé, a assisté à la première audience qui a eu lieu en février. Le jour de son arrestation, «les forces de l'ordre l'ont agressé, trainé, battu, il a passé la nuit au commissariat et on le condamne comme ça», déplore M. Madmad. La deuxième audience devait avoir lieu en mars, mais elle a été reportée «pour le 26 avril», précise-t-il. Tous attendent de voir quelle sera l'issue du dossier. A l'heure où nous mettions sous presse, les officiels n'étaient pas joignables. Affaire à suivre…