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Le mois qui a changé le maroc
Publié dans L'observateur du Maroc le 28 - 03 - 2011

Depuis le début de la série de révolutions qui touche les pays arabes, les spécialistes politiques estiment que le Maroc est loin de cette vague de soulèvements. Lorsque le pays connait ses premières marches de protestation dans plusieurs villes, le doute s'installe. Révolution ou pas? La réponse du Roi Mohammed VI en estompe toute éventualité. Dans son discours du 9 mars 2011, il annonce un chantier de réformes constitutionnelles et répond favorablement aux revendications des milliers de manifestants en quête de liberté, de dignité et de respect des droits. Entre le 20 février et le 20 mars 2011, le Maroc prend un nouvel élan et mène une révolution tranquille. Durant un mois, jour pour jour, le pays a connu des changements qui resteront dans les annales de l'histoire. Un mois où le peuple a eu son mot à dire…
20 février La marche du peuple
Une fois n'est pas coutume. Dans un élan de solidarité, des milliers de manifestants (37.000 selon les autorités, dix fois plus selon les organisateurs) se mobilisent dans plusieurs villes du Maroc pour scander d'une seule voix leurs revendications. Si le nombre de participants diffère d'une région à une autre, les slogans sont tous similaires. Monarchie parlementaire démocratique, libéralisation totale de la presse, réforme de la constitution ou encore dissolution du gouvernement… Les revendications de milliers de Marocains sont clairement exprimées dans l'espoir d'allier monarchie et démocratie. Les manifestants dénoncent également certains fléaux touchant le pays comme le chômage, la corruption, le clientélisme et la répression. Tandis que plusieurs partis politiques refusent de participer à la marche du 20 février, de nombreuses associations de défense des droits de l'homme répondent présent à l'appel et apportent leur soutien indéfectible aux organisateurs. C'est le cas de l'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH), la Ligue marocaine pour la défense des droits de l'homme et Amnesty International-Maroc. Au lendemain des manifestations, Taieb Cherkaoui, ministre de l'Intérieur, tient un point de presse à ce sujet. Si les jeunes contestataires entendaient manifester de manière pacifique, certaines villes comme Larache, Sefrou et Marrakech connaissent des dérapages, et pas des moindres : 33 établissements publics, 24 agences bancaires, 50 commerces et 66 véhicules sont incendiés et cinq corps calcinés sont retrouvés à l'intérieur de l'une des agences bancaires mise à feu par des fauteurs de troubles à Al Hoceima. Pour les anti-20 février, c'est une occasion en or pour tout mettre sur le dos des jeunes du Mouvement.
21 février Naissance du Conseil économique et social
Au lendemain des manifestations du 20 février, le Roi Mohammed VI annonce la constitution d'un Conseil économique et social (CES) pour «donner une forte impulsion à la dynamique réformatrice enclenchée». Composée de 100 membres, cette institution consultative, présidée par Chakib Benmoussa, exercera sa mission auprès des chambres du parlement et veillera à l'élaboration d'une nouvelle charte sociale dans le but «d'assurer les conditions d'une vie digne à tous les Marocains, surtout aux plus démunis, et de réaliser un développement global permettant de créer des emplois productifs au profit de la jeunesse». Dans un discours donné à cette occasion, le Roi met l'accent sur les réformes en cours au Maroc en soulignant que la démagogie et l'improvisation, dans la consolidation de la démocratie et du développement du pays, doivent être évitées.
2 mars Kaddour Terhzaz libéré
Le colonel major Kaddour Terhzaz, ex-numéro deux de l'armée de l'air marocaine, est finalement libéré après deux ans et trois mois de prison, suite à une grâce du Roi Mohammed VI. Abderrahim Jamaï, l'avocat de Kaddour Terhzaz, ne donne pas de précision quant aux circonstances de sa libération. Kaddour Terhzaz, 72 ans, a été condamné le 28 novembre 2008 à Rabat par le tribunal militaire permanent des Forces armées royales marocaines à 12 ans de réclusion pour «atteinte à la sûreté externe de l'Etat en divulguant un des secrets de la défense nationale» à une partie «non qualifiée». Plus de 150 députés européens, de différents pays et de tous les groupes politiques, avaient adressé en novembre une lettre au Roi Mohammed VI pour l'appeler à «gracier Kaddour Terhzaz». A sa sortie de prison, Kaddour Terhzaz remercie le Mouvement.
3 mars De l'autonomie pour le CNDH
Créé en 1990, le Conseil consultatif des droits de l'homme (CCDH) se transforme en Conseil national des droits de l'homme (CNDH). C'est Driss El Yazami, l'ancien secrétaire général de la Fédération des ligues des droits de l'Homme et jusque-là président du Conseil de la communauté marocaine à l'étranger, et Mohammed Sebbar, ex- responsable du Forum vérité et justice et ancien détenu politique, qui sont nommés respectivement président et secrétaire général du Conseil. Cette nouvelle institution bénéficiera d'une autonomie vis-à-vis des pouvoirs publics et sera dotée de larges prérogatives dans les domaines de la protection et de la promotion des droits de l'homme, y compris la mise en œuvre des recommandations de l'Instance équité et réconciliation (IER). Le CNDH aura également le pouvoir de mener des enquêtes pour violation des droits humains.
9 mars Un discours royal historique
Pour les spécialistes politiques, le discours du 9 mars 2011, qui semble dire que le message du peuple est passé, est le plus important de tout le règne du Roi du Maroc. Pour son 2e discours depuis le début des manifestations et après celui de la constitution du CES, le Roi Mohammed VI prend les devants et promet toute une série de mesures allant vers une «démocratisation» du pays. Il répond en grande partie aux réformes politiques revendiquées par le Mouvement du 20 février, à savoir la réforme constitutionnelle, et annonce un rééquilibrage des pouvoirs entre le Roi, le Parlement et la Chambre des représentants. Le Roi promet la prochaine formation d'une commission ad hoc pour la «révision de la constitution», dont la présidence est confiée à Abdellatif Menouni, constitutionnaliste et membre de la commission nationale «Instance Equité et Réconciliation». Ce dernier présentera au Roi, d'ici juin, les propositions de réforme de la constitution. A noter que depuis la promulgation de la première constitution marocaine en 1962, celle-ci a été plusieurs fois révisée, la dernière en date étant en 1996. Pour les autres réformes, le Premier ministre, d'ordinaire nommé par le Roi, sera désormais issu du parti ayant gagné les élections législatives, les libertés individuelles seront plus élargies et les pouvoirs exécutif, judiciaire et législatif seront séparés. Le discours royal met également l'accent sur la régionalisation avancée. Les conseils régionaux qui seront élus au suffrage universel direct auront pour mission la gestion des affaires régionales, et leurs présidents auront le pouvoir d'exécution des délibérations à la place des gouverneurs et des walis. Entre autres réformes démocratiques, le Roi souligne la reconnaissance constitutionnelle, pour la première fois, de la composante «amazighe».
13 mars La bastonnade
Dimanche à 15 heures. Un sit-in est tenu devant le siège du Parti socialiste unifié (PSU) à Casablanca. Des centaines de manifestants se rassemblent après l'échec dans la journée de tentatives d'organiser une marche non-autorisée dans le centre-ville. Selon la version officielle, il s'agit de membres du mouvement Al Adl Wal Ihssane et d'autres d'Annahj Addimocrati, qui auraient multiplié les actes de provocation envers les forces de l'ordre en refusant d'obtempérer aux appels de la police à évacuer la voie publique. Pour Mustapha Mouzouni, préfet de police de Casablanca, les manifestants prévoyaient de faire une marche et non un sit-in et «les personnes concernées sont venues aujourd'hui avec des instructions portant sur la provocation des services de sécurité». De leur côté, les jeunes du mouvement du 20 février présentent une autre version. Dans une conférence tenue le 16 mars 2011 dans le but d'annoncer l'organisation d'une marche dimanche 20 mars, Amine Mkadem, membre du mouvement raconte : «Alors que nous nous apprêtions à organiser un rassemblement pacifique à la Place Mohammed V durant la matinée du dimanche 13 mars, les forces de l'ordre ont commencé à dissuader les passants et à bloquer toutes les issues vers la Place. Ils ont commencé par arrêter plusieurs individus, avant de s'attaquer à des groupes de militants usant de violences verbales et physiques et arguant que ce sit-in est non autorisé». Les responsables des forces réquisitionnent appareils-photos, téléphones portables et portefeuilles et dispersent les manifestants par des gifles et des insultes. Selon les membres du mouvement, 120 personnes ont été blessées et 123 autres arrêtées avant d'être relâchées. Certains journalistes, qui ont été maltraités par la police lors de la dispersion violente du sit-in, ont reçu les excuses du préfet de police de Casablanca.
20 mars L'appel au changement
Après le 20 février, des milliers de manifestants se donnent rendez-vous le 20 mars pour de nouvelles marches dans plusieurs villes du pays. Soutenues cette fois-ci par plusieurs acteurs politiques et associatifs, les manifestations du 20 mars se déroulent dans un climat de responsabilité sans un dispositif sécuritaire très assoupli. Est-ce une demande d'excuses symbolique après la forte répression sécuritaire qui a eu lieu le 13 mars 2011 devant les locaux du Parti socialiste unifié (PSU) de Casablanca ? Probablement. Par ailleurs, les manifestants ont brandi leurs pancartes et appuyé leurs revendications en appelant à la réforme, à la lutte contre le favoritisme ou le clientélisme, contre la corruption et l'impunité. D'autres ont revendiqué une plus grande indépendance de la justice, une constitution démocratique ou la consécration de la séparation des pouvoirs. Les manifestations se sont ensuite disloquées d'elles-mêmes en milieu d'après-midi sans qu'excès ou violences aient été à déplorer. Les organisateurs de ces marches ont d'ailleurs salué la participation responsable et mature des citoyens représentés lors de ces manifestations en attendant de décider des suites de leurs actions.
Rabat La marche de tous les espoirs
mouna izddine
Combien étaient-ils à répondre à l'appel du Mouvement du 20 février? 40 000 selon les organisateurs, 4000 selon la police, voire 2000 sans les badauds, ajoutent les autorités. Au-delà de l'habituelle guerre des chiffres, sur place et à vue d'œil, ils étaient plusieurs milliers à se rassembler ce dimanche 20 mars à Bab El Had, point de ralliement haut en symboles choisi par le Mouvement du 20 février dès sa première marche. Partis à 11 heures tapantes, les manifestants ont lentement longé l'Avenue Mohammed V, fermée aux véhicules le temps de la marche. Sous un soleil accablant, précurseur d'un doux printemps, ils ont scandé les slogans devenus pour certains de véritables refrains populaires. Sur la cherté de la vie, la dignité bafouée, la santé et l'éducation défaillantes, l'injustice et l'impunité, le népotisme et la «police économique», ou encore la corruption et l'emprisonnement des dissidents politiques. Les plus jeunes ont fait montre d'une créativité d'une ardente actualité, reprenant, à la sauce locale, le chorus du tube «Zanga zanga» tiré du fameux discours de Mouammar Kadhafi, agitant des drapeaux de la monarchie libyenne déchue ou des banderoles à la gloire de Facebook. Un duo d'adolescents taciturnes, montés sur des échasses et drapés de l'emblème marocain, a préféré, lui, laisser son maquillage rouge et vert parler pour lui. Les joues rosies par la chaleur et l'effort, les moins aguerris parmi les manifestants, qui n'ont pas songé à se munir de casquettes et de bouteilles d'eau, se sont néanmoins prêtés avec le sourire au jeu des reporters et des photographes nationaux et étrangers, s'arrêtant le temps d'une photo ou d'une interview sur le vif.
De tout pour refaire un monde
Sacrifiant sa grasse matinée dominicale, une foule bigarrée, tous âges, sensibilités politiques et classes sociales confondus, s'est ainsi de nouveau retrouvée le temps d'une marche, pacifique, encadrée et parfaitement disciplinée comme celle qui l'a précédée voilà un mois : Des militants démocrates en petit groupe ou accompagnés de leurs enfants, des syndicalistes chevronnés répondant en chœur aux cris de ralliement de jeunes socialistes, assis sur les épaules de leurs camarades, un haut-parleur à la main. A leurs côtés, des étudiants berbères avançant à petit pas, en groupes soudés, le regard franc et la voix claire, se faisant de temps à autre dépasser par des détracteurs de la ministre de la Santé Yasmina Baddou, des défenseurs de Mohamed Aliouine, des porte-parole de résidents marocains à l'étranger... ou par un amoureux de la nature solitaire, son «Rendez nous notre zoo» accroché au cou, méfiant tel un fauve blessé à l'approche des chasseurs d'images. Alliant humour et protestation, du haut de leur cinquantaine épanouie, des manifestantes ont levé au ciel des balais aux couleurs vives, demandant par ce ballet multicolore le départ du gouvernement Abbas El Fassi et la dissolution du Parlement. De l'autre côté du vaste boulevard parsemé de palmiers, des habitantes d'un bidonville à la périphérie de Rabat sont venues, elles, réclamer un habitat décent pour leur famille nombreuse. Elles ont revêtu leur djellaba des grands jours et ont raconté fièrement à tous ceux qui les questionnaient comment elles ont défié les autorités locales «pour venir faire éclater la vérité du douar au cœur de la capitale». Entre trois manifestants et un badaud, les marcheurs ont aussi pu croiser des figures connues de la scène politique et associative. Parmi lesquelles Mohamed Moujahid, secrétaire général du Parti Socialiste Unifié, l'ancien ministre de la Culture Mohamed Achaari, ou encore Khadija Ryadi, présidente de l'AMDH et Abdelhamid Amine, vice-président de la même association. Talaa Saoud Alatlassi, membre du Conseil national de l'USFP, rencontré sur place, explique : “Il est logique que nous soyons là. Le Mouvement du 20 février découle de la culture de gauche, et beaucoup d'adhérents de la Chabiba Ittihadia comptent d'ailleurs parmi les membres de ce mouvement. A l'USFP, cela fait plusieurs décennies en effet que nous militons pour la refonte de la Constitution, le 20 février est né de facteurs exogènes certes, mais aussi de toutes les idées défendues par les socialistes marocains depuis l'indépendance. L'appel du 20 février a été entendu par le Roi, nous sommes descendus ce 20 mars pour clamer notre soutien à cet élan extraordinaire. Et pour dénoncer par la même occasion les parties mal intentionnées qui tentent d'instrumentaliser les revendications pacifiques du Mouvement du 20 février, en faisant croire qu'elles aussi veulent la démocratie, alors qu'elles sont fondamentalement contre et que leur seul but est de semer l'anarchie pour imposer leur projet extrémiste. Le peuple marocain aspire à un changement sans violence. En se levant aujourd'hui, sa jeunesse nous a insufflé un bel enthousiasme pour relancer ensemble le projet démocratique en cours dans notre pays.”
Quelques vedettes du petit et grand écran étaient également au rendez-vous. En somme, c'est un «Maroc miniature» qui est descendu ce dimanche 20 mars à Rabat, montrant dans une ambiance bon enfant, comme dans toutes les autres villes où se sont tenues des marches d'une ampleur plus ou moins similaire, sa détermination de fer à se mobiliser jusqu'à ce qu'aboutissent concrètement les réformes annoncées par le Roi lors du discours du 9 mars 2011.
Tout est bien qui finit bien
Parvenue au niveau du parvis de la gare de Rabat Ville, la masse des manifestants s'est scindée en plusieurs petits ilots. Celui formé par les proches des prisonniers salafistes a agglutiné autour de lui les promeneurs du dimanche. Une jeune fille voilée et un homme dans la trentaine, debout au milieu de la foule, ont récité plusieurs fois à haute voix la liste des détenus islamistes arrêtés au lendemain des attentats du 16 mai 2003 et de ceux d'avril 2007 à Casablanca, appelant à la révision de leur procès et à leur relaxe. Assise sur le rebord de la fontaine face à la gare ferroviaire, une photographie de son fils à la main, une mère jure en pleurant que son rejeton, accusé d'avoir participé au financement d'une cellule terroriste, est innocent, et qu'elle ne trouve plus de quoi vivre depuis son arrestation en septembre 2010. Tout autour et tout le long de la marche, des officiers en uniforme étaient présents par groupe de deux ou quatre, observant discrètement l'agitation alentour, prêts à intervenir au moindre incident. Mais la marche s'est achevée paisiblement vers 15 heures. Seuls quelques manifestants ont continué à se rassembler en petites grappes un peu partout sur le boulevard, transformant l'avenue en une agora improvisée. Puis, petit à petit, au fur et à mesure que l'avenue historique se vidait de ses invités de passage, sur les bancs alentours, des mères se sont installées avec leurs enfants, devisant gaiement avec leurs voisines des petites choses de la vie. Des jeunes couples sont réapparus comme par enchantement, déambulent bras dessus bras dessous en échangeant des sourires complices. En ce dernier jour d'hiver, la vie a ainsi repris son cours normal à Rabat... En attendant les premiers bourgeons du printemps marocain.
Casablanca Le 20 février fait ses preuves
Dalal Saddiqi
Dans les ruelles, d'habitude animées par les commerçants et bondées de camions de livraison de marchandises en tous genres, il n'y a pas âme qui vive. Les quelques estafettes de police affrétées se font très discrètes.
Entre inquiétude et impatience
9h00 du matin, sur la place, seuls les journalistes sont présents, ainsi que les ambulances et les camions de pompiers. Les hauts responsables de la Sûreté nationale mettent au point les derniers détails de leur organisation par téléphone ou Talkie Walkie. Personne, à ce moment là, ne peut prédire ce qu'il adviendra de ce dimanche 20 mars. La place de la Victoire sera-t-elle de bon augure pour le mouvement du 20 février? Ce dernier réussira-t-il à organiser une marche pacifique et sans débordement? Les Casablancais répondront-ils présents? Les forces de police interviendront-elles pour annuler la marche? Ce sont ces questions que se posent les premiers arrivants, venus en petits groupes, en famille ou entre amis. Mais au fur et à mesure, des grappes d'individus se forment, timidement, aux quatre coins de la Victoire. Inquiets mais impatients, les sympathisants du Mouvement attendent le signal du départ. Le spectre de la répression policière des manifestants du 13 mars rôde…
9h45. Et quinze minutes avant l'heure prévue, une centaine de personnes déboulent sur la place et le slogan «Bi al wahda ou attadamoune, li bghinah ikoun ikoun» (Unis et solidaires, nos demandes seront exaucées), scandé avec force, met en branle toute une organisation. Cela se passe très vite. En moins de cinq minutes, les gens jusque là frileux, à l'abri des regards et du soleil, des ruelles surgissent pour meubler la place. Les voitures circulent encore. En cinq minutes, le trafic est gelé par les forces de l'ordre. La place est noire de monde.
Au loin, et à contre courant de l'itinéraire de la marche, s'avance un convoi réuni auparavant devant les locaux de la CDT. Arrivé sur la place, il opère une rotation à 180 degrés et prend la tête du cortège.
Départ en fanfare, pour le changement
Rapidement, les pancartes du 20 février sont distribuées à la foule. Les banderoles sont déroulées à toute vitesse pour créer des couloirs de manifestants et laisser de l'espace sur les trottoirs, de part et d'autre de la file. D'autres banderoles serviront à subdiviser les manifestants en trois groupes distincts, chacun procédant derrière l'un des trois véhicules qui transportent baffles, micros, et porte-voix. Certes, membres des organes USPF, PSU, PADS, PJD, CNI, PPS, CDT, UMT, Amazighs et Justice et bienfaisance sont présents. Mais en coulisse, les pancartes et banderoles non conformes aux revendications du 20 février ou portant les revendications de partis, en particulier, sont aussitôt confisquées par les organisateurs du 20 février. Pas question qu'un parti cherche à «monter» sur la marche. Les porte-voix du 20 février prennent le relais des premiers «scandeurs» de la foule, relayés par de puissants baffles. La foule s'enflamme. Jamais les slogans n'avaient été clamés avec autant d'unité, de force et de conviction.
L'organisation est synchrone, impeccable. Les Jeunes du 20 février forment une chaine humaine pour définir l'itinéraire de la marche et protéger les alentours. De quoi rassurer les manifestants et décourager les opportunistes.
Simultanément, un autre convoi arrive depuis le boulevard de Strasbourg. En lignes parfaites et en rangs serrés, de l'autre côté de la place, il attend le coup d'envoi de la marche pour rejoindre la tête du convoi. Au centre de la Victoire, Karim Tazi, homme d'affaires casablancais, venu en famille, s'improvise reporter du présent. En jeans, converses roses et veste de baroudeur, armé d'un appareil photo professionnel, il couvre l'événement en direct sur sa page Facebook.
Tous en chœur et crescendo !
La marche se met en branle à 10.20 et investit aussitôt le quartier Derb Omar en direction de l'avenue Hassan II. Les voix s'accordent, les slogans s'unifient. Des milliers de manifestants battent le pavé et cadencent leurs pas à coups de revendications: «Le peuple veut le chute de l'absolutisme», «On ne peut pas compter sur eux. Ni le gouvernement, ni le parlement», «Manifester est un droit, pourquoi le Makhzen a-t-il peur?», «Aujourd'hui ou demain, le changement doit se faire», «Vous avez éduqué vos enfants et vous avez abandonné les nôtres», «Le Makhzen doit quitter les lieux. Le Maroc, ma terre, est libre»…
Il est 10h30. Le soleil semble être au zénith et l'ombre se fait rare. Le boulevard de Strasbourg semble de plus en plus étroit, à mesure que la foule se densifie. Les esprits s'échauffent, la chaleur étouffante, pourtant, le rythme des slogans s'accélère, le degré monte d'un ton. La foule ne fait plus qu'un et semble emportée par son désir de faire entendre sa voix, unique. Loin des convictions religieuses et des tendances politiques, nait une solidarité qui efface les différences, une promiscuité qui engage la complicité. Oubliées les différences sociales, d'âge ou de sexe. Oubliée la peur de l'autre. Tout ce qui compte, c'est le présent, qui doit se construire par l'union. Pancartes de slogans du Mouvement en main, tous réclament le changement, tous aspirent à un monde meilleur. On peut lire, tout au long du cortège, «Tous pour une justice sociale», «Pour une révision constitutionnelle», «Pour la démission du gouvernement et la dissolution du Parlement», «Pain, liberté et dignité», «Non à la corruption et au clientélisme», «Un Roi qui règne et ne gouverne pas». Au sein de la foule, il est difficile de deviner la couleur politique des manifestants. Des femmes portent des foulards au côté de fashionistas. Des hommes portent des barbes auprès de jeunes affichant l'effigie du Che ou arborant des coiffures «métal». D'autres sont en jeans et baskets, en costume ou en djellaba. Certains portent leurs enfants sur leurs épaules. De vieilles dames s'animent sous leur traditionnel haïq. Une véritable photographie de la société casablancaise se dresse. Dans cette vague humaine, même la présence policière se fait discrète. Civile, la police protège et veille tout en se rendant imperceptible.
Messages ou coïncidence ?
10h40. La communion bat son plein. Le convoi est tellement synchrone qu'il pousse ses slogans crescendo, sans même une fausse note. Une halte s'impose. La première affiche du cortège arbore le chiffre 20 en son centre, celui du 20 février, puis celui du 20 mars. Les manifestants sont priés de s'assoir, à la porte de la place du 20 août. Le chiffre 20 devient fétiche et cette halte à la place du 20 août un symbole. N'est-ce pas là la date d'anniversaire de la révolution du Roi et du Peuple? Le Roi Mohammed VI, petit fils de Mohammed V, les sauvera-t-il à son tour des griffes du Makhzen, seul porté coupable de leurs innombrables rancœurs ?
Les organisateurs ont conscience que la route du changement est longue et sont d'ores et déjà heureux d'avoir réalisé la mi-parcours de l'itinéraire de la marche. Ghizlane Benomar, une «20 févriériste» se hisse sur une échelle déposée au milieu de la place. Elle a une vue imprenable sur la foule. Une fois sur la terre ferme, à la question «comment se déroule la marche?», elle répond qu'«en 50 minutes, les organisateurs n'ont pas d'estimation, mais que les manifestants se comptent en dizaines de milliers. Les slogans sont unifiés, la marche pacifique. Tout va bien». Elle affiche un large sourire et ne semble plus pouvoir redescendre de son petit nuage. La marche est une réussite. Encore faut-il que la gestion de la sécurité par la chaîne humaine des Jeunes du Mouvement soit solidifiée devant les magasins, ainsi que sur le boulevard Hassan II, symbole de la répression policière du 13 mars. Les forces de l'ordre craignent d'éventuels débordements sur la place Mohamed V rebaptisée «place des pigeons», en fin de parcours. D'autant que les travaux du tramway ont laissé autour d'eux des amas de terre et de pierres. Le mouvement profite de cette halte pour étendre son cordon sécuritaire et renforcer ses rangs aux abords des enseignes de magasins et autour des banques. Pendant ce temps, les hauts parleurs continuent de diffuser les revendications du mouvement. Hommes et femmes se relèvent, chefs de l'orchestre casablancais, pour initier les slogans. «Ecoute les fils du peuple», est alors repris en version «Ecoute les filles du peuple». Des leitmotivs qui continuent d'habiter les c?urs, et dont les refrains reviennent en tête, incontrôlables, bien après la marche ! L'un d'eux, particulièrement prenant, est tiré d'un poème d'Abou el Kacem Chebbi, l'un des plus grands poètes de Tunisie : «Lorsqu'un jour le peuple veut vivre, force est pour le destin de répondre, force est pour les ténèbres de se dissiper, force est pour les chaînes de se briser.»
Direction Nevada
Le convoi continue de grossir et alors qu'il serpente vers Bank Al Maghrib, sa queue est encore à la place de la victoire. D'autres manifestants, qui attendaient sur l'avenue Hassan II gonflent les rangs. Les badauds, très nombreux, assistent au spectacle derrière des barrières. Certains rejoignent l'esprit de la marche en applaudissant ou en reprenant ses leitmotivs.
Il est 12.00. Ahmed Mediany, porte-voix 20 févriériste se dresse de toute sa hauteur sur la place Nevada pour montrer du doigt la «place des pigeons» en s'écriant «Ici vous avez été opprimés, ici vous avez été réprimés». Il invite les marcheurs à s'assoir et les félicite pour le bon déroulement de cette manifestation pacifique «sans pierre ni couteau». Fier, il rend hommage aux Casablancais, aux Casablancaises mais aussi aux populations venues de Berrechid, Ben Slimane, Mohammedia, Settat… Les banderoles du Mouvement son récupérées pour servir lors du prochain rendez-vous. La séparation se fait dans le calme et la foule se dissipe aussi rapidement qu'elle est apparue. Le défi du Mouvement du 20 février a été relevé avec brio. La circulation et le tumulte des klaxons redonnent son paysage habituel au centre ville.
Médias 20 février, et après ?
noura mounib
16 mars 2011. Dans le cadre de l'émission de débats «Moubacharatan Maâkoum», animée par le journaliste Jamaâ Goulahssen, sur 2M, les téléspectateurs ont droit à un épisode hors-norme où les intervenants – dont le passage à la télévision est à marquer d'une pierre blanche- ont ouvertement débattu plusieurs polémiques d'actualité.
Nouvelle ère médiatique ?
Des droits de l'homme aux jeunes du Mouvement du 20 février, en passant par la nécessité de mettre fin aux traditions makhzéniennes comme le baisemain, le débat de «Moubacharatan Maâkoum» entre Driss El Yazami, fraichement nommé à la tête du Conseil national des droits de l'homme et Abdelhamid Amine, vice-président de l'Association marocaine des droits de l'homme, entre autres invités, a soulevé plusieurs points sensibles jamais évoqués jusqu'ici sur le petit écran. Pour la presse, l'émission de Jamaâ Goulahssen signe le début d'une nouvelle ère médiatique où tous les avis sont attentivement écoutés dans le cadre du respect de la liberté d'expression. Pourtant, ce changement de ligne éditoriale ne pouvait passer inaperçu. Après l'intervention d'Abdelhamid Amine dans l'émission pour désapprouver certains rituels comme le baisemain, des membres du gouvernement ont critiqué Faiçal Laraichi, patron du pôle audiovisuel public. Si certains ont considéré qu'il s'agit d'une atteinte au respect dû au Roi, d'autres ont critiqué l'exclusion des jeunesses de leur parti de cette émission, à laquelle ont assisté les Jeunes du 20 février. Pour Jamaâ Goulahssen, le débat après l'émission a pris beaucoup d'ampleur. «Si l'émission a eu de bons échos dans la presse et sur Internet, c'est parce que le débat était virulent et purement objectif. C'est un devoir de mettre les téléspectateurs dans le bain de l'actualité. Maintenant, que l'émission a été saluée pour la liberté d'expression qu'elle a présentée aux téléspectateurs, je trouve que tout s'est passé comme d'habitude», explique le journaliste. Il ajoute que parmi les 35 millions de Marocains, 600 000 seulement ont regardé cette émission. «Je vous dis que tout s'est normalement passé» répète-t-il.
Manipulation et guerre de crédibilité
Entre «Moubaracharatan Maâkoum» sur 2M et «Kadaya Wa Araâ» sur la TVM, qui a traité des Jeunes du 20 février, la semaine du 14 au 20 mars 2011 a marqué un semblant de changement médiatique, qui augure une véritable révolution dans la prise de parole médiatique. Premiers fruits des revendications des jeunes du 20 février ? Possible. Pourtant, ces jeunes accusent les médias, les deux chaînes nationales en particulier, de manipuler l'information et de décrédibiliser le mouvement. «Il n'y a qu'à voir les reportages et les faux montages que les chaînes nationales passent dans leurs journaux d'information. Que fait la HACA ?» dénonce un membre du mouvement des Jeunes du 20 février. La Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA), de son côté, ne peut pas réagir à de telles accusations. Selon une source des autorités audiovisuelles, qui préfère garder l'anonymat, la HACA n'a pas à intervenir dans ces cas-là puisqu'il s'agit d'une plainte qui ne répond pas à certains critères. «Le mouvement du 20 février n'a pas la même légitimité qu'un parti politique», ajoute la même source. Maintenant, tandis que le débat sur les jeunes du 20 février bat son plein, les médias nationaux perdent en crédibilité et font fuir plusieurs téléspectateurs vers les chaines étrangères. «Dans un reportage de 2min30, on ne peut pas passer les déclarations de tous les intervenants. Le montage a été créé pour ça. Dans ce cas-là, on serait obligé de préciser à chaque intervenant que 15 secondes seulement de sa déclaration seront diffusées : dites ce que vous avez à dire dans un laps de temps», se défend Jamaâ Goulahssen.
«La manipulation médiatique ne mène nulle part.»
Abdessamad Benchrif, Journaliste syndiqué
Entretien réalisé par N. B.
L'Observateur du Maroc. Y a-t-il eu des changements dans les médias après le 20 février ?
Abdessamad Benchrif. Depuis la création du mouvement du 20 février, les médias nationaux donnent l'impression que le paysage est en train de vivre une renaissance en matière de liberté d'expression. Sur le terrain, la vérité est tout autre. Les médias représentent un service public censé accompagner la diversité et la dynamique sociale avec les changements qui peuvent l'accompagner. Comment peut-on avancer dans un pays où l'information est manipulée ? C'est scandaleux ! Les revendications de la société marocaine et les nouveaux acquis après le discours du Roi, n'est-ce pas une victoire pour le Maroc ? A présent, les Marocains sont avides d'actualités, de vérité surtout. D'ailleurs, je salue les progrès de certains supports médiatiques nationaux qui ont réussi à s'imposer, sans manipulation, comme de vrais ambassadeurs de l'information depuis la création du Mouvement.
Pourtant, certaines émissions sur les deux chaînes nationales ont débattu du mouvement du 20 février… Une première!
En effet, il y a eu certaines émissions qui ont changé de ligne éditoriale le temps d'un épisode. A mon avis, je trouve qu'il y a trop de propagande pour des débats peu convaincants. Les médias sont censés comprendre les besoins de la rue. Malheureusement, le paysage médiatique vit ses années de plomb. On a besoin de bons médias pour la consolidation d'un Etat de droit et ce, en donnant la parole à toutes les composantes de la société marocaine. Manipuler l'information n'a aucun rapport avec la déontologie de la presse. On ne veut pas de règlements de comptes à travers les médias. On devrait absolument gagner en professionnalisme. C'est la dynamique actuelle qui l'impose. Si les Marocains préfèrent suivre les informations d'Al Jazeera et exigent la réouverture de son bureau au Maroc, les médias nationaux ne devraient pas s'étonner.
Selon vous, quelles sont les clés de succès d'un paysage médiatique ?
Un responsable incapable de gérer le climat médiatique n'a plus sa place dans le paysage. Le paysage médiatique marocain ne peut pas avancer s'il n'y a pas une profonde réforme qui devrait constituer un chantier primordial. A présent, c'est une priorité. On ne peut pas réformer les médias avec les mêmes personnes. D'ailleurs, il faut profiter de cet élan de dynamique, qui a ouvert plusieurs perspectives, pour insister sur cette réforme et mesurer l'ampleur de la gouvernance médiatique. Le Maroc a ses compétences. Il faut montrer aux gens que la manipulation médiatique ne mène nulle part.
Paroles de "20 Févriéristes"
Fayçal Marzak, 25 ans, étudiant en biologie.
«Je suis un contre-pouvoir.»
Je suis militant altermondialiste, avec une sensibilité anarchiste. J'ai beaucoup appris grâce à ma participation au mouvement. Je me réjouis de l'union des Marocains politisés ou pas. Gérer ces différences semble difficile mais dans la pratique, nous arrivons à nous mettre d'accord car nous travaillons pour le bien de notre pays. Ceci se voit à chaque manif, où tout le monde respecte le mot d'ordre de départ. Le mouvement continuera à exister, jusqu'à ce que le Maroc devienne démocratique, ce qui permettra à toutes les composantes de la société, mouvement Justice et bienfaisance, y compris, de s'exprimer et de participer. Plus que ça, le peuple dorénavant doit être prêt à être le contre-pouvoir face à tous les dérapages absolutistes.
Khalid Ouadie. 56 ans. MRE à la retraite.
«Vieux, "zmagri" et 20 Févriéristes.»
J'ai vécu pendant trente ans en France, je suis rentré au Maroc il y a un an. J'ai toujours été militants au sein d'ONG, mais jamais partisan. J'attends le vrai changement depuis 10 ans, mais il ne s'est pas produit. Quand j'ai pris connaissance des objectifs du mouvement, je l'ai rejoint. En plus, les méthodes de ces jeunes m'ont beaucoup plu et je participe avec eux pour construire le mouvement, malgré mes obligations familiales. Reste que les jeunes ont encore besoin de fournir beaucoup d'efforts pour construire un Maroc nouveau.
Mohamed Cherif, 35 ans, lutteur.
«Pour l'égalité des chances.»
Je suis champion marocain dans la lutte gréco-romaine, ex-entraineur national et j'ai enseigné à l'Institut Moulay Rachid de la formation de cadres. Actuellement, je suis au chômage. J'ai rejoint le 20 février une semaine après la première manifestation pour demander l'égalité des chances. J'appelle tous mes amis sportifs à nous rejoindre dans ce mouvement. Le sport à lui aussi besoin d'égalité et de justice.
Ghizlane Benomar, 25 ans, élève ingénieur à l'INSEA.
«La souveraineté au peuple.»
Je suis une militante de gauche indépendante. Je suis très satisfaite du travail que nous avons fait depuis le 20 février. L'objectif c'est d'arriver à changer la constitution. Pour aller d'un système politique qui tire sa légitimité de l'histoire et la religion vers un système de souveraineté populaire dans le cadre d'une monarchie parlementaire. Un tel changement est le seul capable à faire tomber le népotisme et aura un impact sur toutes les facettes de la vie des Marocains.
Mohamed Belkcami. 29 ans, comptable.
«Je n'ai plus peur de l'avenir.»
Mon engagement ne date pas d'aujourd'hui. Etudiant, j'étais militant et membre dirigeant au sein de l'UNEM à Casa. Je m'inscris dans ce mouvement car il n'a aucune facette idéologique ou partisane. Notre mouvement exprime l'appartenance à la nation marocaine et les revendications du peuple comme la liberté, la dignité et la justice. On est fiers que notre pression ait poussé le roi à faire un discours et réagir à nos revendications. Ce mouvement aura un impact certain sur les jeunes marocains pour les années à venir. Désormais, je n'ai plus peur de l'avenir.
Paroles d'expert
Jean Zaganiaris, enseignant-chercheur au CERAM (Ecole de Gouvernance et d'Economie de Rabat).
«Le 20 février veut renverser les rapports de domination.»
Derrière les apparentes ruptures dites «révolutionnaires», il y a des continuités implicites qu'il s'agit de mettre en évidence. Le mouvement du 20 février n'aurait jamais été possible sans d'autres actions plus ou moins indépendantes de lui. Il n'aurait peut-être pas existé sans le Boulevard, qui donna l'occasion à une certaine jeunesse de s'impliquer politiquement au sein de l'espace public en mobilisant la forme artistique, ou bien sans le mouvement MALI, emblématique d'une jeunesse minoritaire mais effective, bravant publiquement certaines formes de contraintes sociales. Il n'aurait pas non plus connu la même effervescence sans l'appui de traditions militantes que procure l'AMDH. A cela, il faut ajouter la nature extrêmement hétérogène des groupes sociaux qui sont présents. Quelles que soient les limites de ce mouvement, il a eu le mérite de vouloir renverser les rapports de domination verticaux entre les gouvernants et les gouvernés.


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