Six détenus du Hirak du Rif, dont Nasser Zefzafi, ont annoncé vendredi qu'ils réclament officiellement la déchéance de leur nationalité marocaine. Ils expliquent, dans un long communiqué, les raisons de cette demande. Nasser Zefzafi, Mohamed Al Haki, Nabil Ahamjik, Samir Ighid, Wassim Boustati et Zakaria Adehchour, détenus dans le cadre du Hirak du Rif, ont annoncé vendredi renoncer à leur nationalité marocaine. Dans un communiqué publié par l'«Association Tafra pour la solidarité et la fidélité», les six détenus affirment être «objets de décisions judiciaires en représailles des opinons et des positions politiques» qu'ils ont exprimées et «qu'a exprimé publiquement et massivement le mouvement populaire dans le Rif, critiquant le climat, le paysage et la structure politique makhzeniene marocaine». Se disant «convaincus que l'Etat instrumentalise le système judiciaire comme une annexe à l'institution sécuritaire et un prolongement de ses plans et ses stratégies», les détenus rappellent le contexte de la contestation dans le Rif marocain, dénoncent les violences et les violations des droits de l'Homme qui l'ont suivies et évoquent les «assassinats des martyrs Mohcine Fikri, Imad Al Attabi et Abdelhafid Al Haddad». Renoncer à sa nationalité, un acte symbolique fort Devant notamment les «restrictions imposées» à leur encontre au sein des prisons marocaines» et «à l'encontre de [leur] familles et [leurs] proches», face à la «persistance du siège sécuritaire du Rif», «la liquidation de l'ensemble» de leur droits, ils annoncent leur «détermination (…) à abandonner la nationalité de l'Etat marocain et sa déchéance, ainsi qu'à rompre le lien d'allégeance, à partir de la date de parution de ce communiqué». «Nous tenons l'Etat marocain pleinement responsable de tout préjudice qui pourrait nous affecter mentalement et physiquement et ce, à compter de cette date. Nous chargeons la communauté internationale, ses instances et ses institutions, de la responsabilité du suivi de notre dossier à partir de la date de parution de ce document.» Communiqué des six détenus «Nous avons voulu une patrie pour tout le monde, ils l'ont voulu comme une propriété dont ils ont le monopole, bradant son peuple et pillant ses ressources. Nous pleurons la patrie, nous lui avons sacrifié la fleur de notre âge et nous lui donnerons notre vie, cependant, nous ne serons jamais prêts à cautionner un état qui veut enterrer un peuple, une patrie et un rêve d'une dignité et d'une liberté», conclut le communiqué. Procédure pour renoncer à la nationalité marocaine «Une demande officielle a été envoyée par les détenus au ministre de la Justice et au président du ministère public. Il ne faut pas la prendre à la légère», a affirmé vendredi soir Ahmed Zefzafi, père de Nasser, dans un live Facebook. La rupture du lien d'allégeance au roi et la réclamation de la déchéance de la nationalité marocaine sont des actes à la symbolique politique forte et rares dans l'histoire conteporaine du royaume. Les dernières annonces en date concernaient le boxeur Zakaria Moumni et avant lui la militante pro-Polisario Aminatou Haidar. Cependant, au delà du côté déclaratif qui a une portée politique, la procédure administrative pour abandonner la nationalité marocaine est compliquée et très encadrée. En effet, le Dahir n° 1-58-250 portant Code de la nationalité marocaine prévoit seulement quatre cas de figures pour la perte de la nationalité marocaine (à partir de l'article 19) et qui ne s'appliqueraient pas aux six détenus du Hirak du Rif. Renoncer à sa nationalité marocaine est ainsi lié à l'acquisition d'une autre nationalité étrangère et doit, conformément à cette loi, suivre une procédure, tout comme la déchéance (prévue dans les articles 22,23 et 24). Article modifié le 2019/08/24 à 14h32