La chambre des représentants adopte à la majorité la première partie du PLF 2025    OCP Nutricrops secures 10-year sulfur supply deal with QatarEnergy    Bank of Africa UK : 300 millions de dollars levés pour Africa Finance Corporation    Rabat-Salé-Kénitra: Le CRI commande une étude sur les chaines de valeurs de cinq secteurs    Aya Gold & Silver : transition réussie et catalyseurs à venir pour la fin d'année    Chine : Bilal Benhammou médaillé de bronze au concours international de zellige    La Bourse de Casablanca ouvre en baisse    La visite d'un responsable iranien au Maroc : Est-ce un pas vers l'ouverture des négociations pour la réconciliation des relations entre les deux pays ?    Polisario quietly commemorates its «war» against Morocco's Royal Armed Forces    Devant les députés, Nadia Fettah défend les dimensions essentielles du PLF 2025    Le PLF 2025 comprend des mesures gouvernementales consacrées à l'Etat social    Maroc-Japon : un roadshow à Tokyo pour attirer les investissements    Le Polisario a commémoré, en catimini, sa «guerre» contre les FAR    Russie : Une île de l'Arctique rayée de la carte à cause du changement climatique    Inondations: Le Maroc mobilise un dispositif logistique significatif en solidarité avec l'Espagne    Après des années de rupture, l'Iran souhaite renouer avec le Maroc    Le Conseil de gouvernement adopte un projet de loi relatif au code du médicament et de la pharmacie    Morocco : Tax breaks for military industry development    Les prévisions du vendredi 15 novembre    Qualifs CAN 25 : Le Gabon se qualifie avant d'affronter le Maroc ce soir    Botola : Lancement officiel de « la carte des stades » pour la couverture des matchs    Rugby à XV : Casablanca accueillera du 18 au 24 novembre les éliminatoires de la Coupe d'Afrique (Groupe B)    Bayern Leverkusen : Amine Adli a débuté sa rééducation    Elim CAN 2025 : Hakimi et Diaz parmi les joueurs les plus chers de la trêve internationale    La FIFA dévoile le trophée de la Coupe du monde des clubs 2025    La pomme marocaine    Les activités exercées par l'industrie de la défense nationale bénéficie de l'exonération temporaire de l'IS    Maroc-Lesotho : La billetterie est ouverte    Addis-Abeba: CDC-Afrique recommande le premier test PCR en temps réel pour la Mpox fabriqué localement au Maroc    Les syndicats dénoncent la gestion défaillante du secteur de la santé    Des prestations variées et attractives    La 1ère Invocation de la 36e Biennale de São Paulo débarque à Marrakech    Maroc : Fortes rafales de vent et tempêtes de poussières    Etats-Unis : Marco Rubio, un proche du Maroc, prendra les commandes de la diplomatie    France-Maroc : Un ambassadeur en daraâ pour écrire le nouveau livre [Edito]    Oscars : «Everybody loves Touda» qualifié dans toutes les catégories, une première pour le Maroc    «Poésie et peinture», l'exposition de Loubaba Laalej à la Fondation Hassan II pour les MRE    Dakhla accueille le 18e congrès des plus belles baies du monde    Diabète au Maroc : Plus de 2,7 millions d'adultes et 25 000 enfants affectés    Hakim Ziyech adresse un message vibrant au peuple marocain    Regragui : « Nous allons au Gabon pour gagner »    Trump nomme Marco Rubio au poste de secrétaire d'Etat    Le parti de Donald Trump s'assure la Trifecta    Fondation & Galerie Banque Populaire 3e édition : Quand l'art s'invite en résidence    Interview avec Sonia Okacha : « Au cinéma, l'apprentissage est une bobine qui ne cesse de tourner »    Tourné au Maroc, «Gladiator II» de Ridley Scott sort dans les salles nationales    Au Brésil, le Maroc élu vice-président de l'Assemblée générale de l'ICOMOS    Maroc-Arabie Saoudite : Vers un renforcement de la coopération dans le domaine pénal    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le patrimoine de Casablanca attend toujours d'être dépoussiéré
Publié dans Yabiladi le 22 - 07 - 2019

La spéculation foncière, le manque d'entretien des édifices et l'insuffisance du cadre juridique ont fait du centre-ville de Casablanca le vestige d'une architecture autrefois prestigieuse. Sans une volonté politique, la société civile se retrouve vite démunie.
«On a mis en place une police administrative, pourquoi n'a-t-on pas ajouté une police du patrimoine ?», interroge, un brin déçu, Rachid Haouch, vice-président du Conseil national des architectes. Alors que le ministère de la Culture et de la communication a annoncé vendredi l'entame de l'inscription d'une série de bâtiments historiques sur la liste du patrimoine national, l'architecte s'étonne que la ville blanche, véritable laboratoire architectural durant la première moitié du XXe siècle, ne bénéficie toujours pas d'une réelle politique de sauvegarde de son patrimoine.
«Le fond du problème est d'ordre juridique», estime-t-il. «Les premiers plans d'aménagement urbain au monde ont été réalisés à Casablanca – l'exemple du boulevard Mohammed V en est un. Des architectes du monde entier sont venus expérimenter ici leur savoir-faire, l'alignement, l'urbanisme réglementaire haussmannien, la cité-jardin, etc.», rappelle Rachid Haouch.
C'est en novembre 1912, dès l'instauration du protectorat français au Maroc, qu'un premier système législatif et une administration sont créés pour la protection et la restauration du patrimoine marocain, souligne Nadège Theilborie dans un article intitulé «La patrimonialisation du Maroc, entre tradition et rupture de l'héritage français» (juin 2012). La Kasbah des Oudayas devient, le 6 juin 1914, le premier monument historique au Maroc.
«Or depuis, il n'y a eu que des petits décrets, des petits dahirs, mais jamais véritablement de loi dédiée au patrimoine», déplore Rachid Haouch. «La seule force de loi au Maroc, c'est le plan d'aménagement. La preuve, la villa Cadet, qui reprend toute l'architecture marocaine, a été détruite suite au plan d'aménagement des hauteurs des immeubles. Le promoteur a ainsi détruit la villa au vu et au su de tout le monde. La villa Mokri a également été détruite. Cela signifie que le plan d'aménagement est la seule force de loi et qu'il réglemente une zone, jamais un bâtiment», explique l'architecte.
Le classement d'un bâtiment n'empêche pas sa démolition
Considérée comme «le dernier chef d'œuvre de l'architecture domestique néomarocaine», la villa Cadet, du nom de l'architecte Auguste Cadet, dont c'était la demeure, a en effet été démolie en 2010. Cet édifice avait «pourtant été retenu dans la liste des bâtiments à inscrire comme patrimoine national architectural à préserver et œuvres exceptionnelles et représentatives de l'architecture et de l'urbanisme du XXe siècle, lors d'une commission du patrimoine le 8 janvier 2010, réunissant des représentants de la wilaya, de l'Agence urbaine, de l'arrondissement, du ministère de la Culture, de l'inspection des monuments historiques à Casablanca et nous-mêmes», écrit à l'époque l'association Casamémoire sur son site.
Quelques années plus tôt, en 1995, c'est la villa Mokri qui fut démolie. Pour l'anecdote, sa démolition impulsa la création de cette association de sauvegarde du patrimoine du XXème siècle au Maroc.
La villa Mokri.
En juin 2018, l'Agence urbaine de Casablanca a lancé une étude pour l'élaboration d'un plan de sauvegarde et de valorisation du patrimoine architectural, urbain et paysager au cœur historique de la ville de Casablanca : l'arrondissement de Sidi Belyout.
Son objectif est de «définir les zones et sous-zones à différentes valeurs patrimoniales avec une normative d'urbanisme spécifique. Les bâtiments sont ensuite classés et les types d'intervention sont établis à partir de la base de données du recensement», nous avait expliqué Oualid Ismail Saad, conservateur régional du patrimoine à Casablanca-Settat.
Or, «même un bâtiment classé peut être démoli», déplore Rachid Haouch. «L'hôtel Lincoln, c'est parce que l'Agence urbaine l'a racheté qu'il n'a pas été détruit. L'hôtel Royal Mansour, pourtant classé, a lui aussi été détruit.»
Le vice-président du Conseil national des architectes regrette également l'absence d'un équivalent marocain des Architectes des bâtiments de France (ABF), ces fonctionnaires chargés de l'entretien et de la conservation des monuments protégés ou non. «En France, lorsqu'on classe une église par exemple, on définit un périmètre de plusieurs centaines de mètres. Tout ce qui est à l'intérieur de ce périmètre appartient uniquement aux Architectes des bâtiments de France», précise-t-il.
Rachid Haouch ajoute à cela la suppression de la commission esthétique au niveau de l'Agence urbaine de Casablanca. «Elle avait un poids très important en termes de regard sur le mouvement architectural. Résultat, maintenant, on fait n'importe quoi. Dans le cadre de la rénovation du parc de la Ligue arabe, on a complètement détruit le tracé en élargissant l'avenue Moulay Youssef et en détruisant les ficus. Tous les parcs d'antan, on les a substitués à des mosquées, des parkings… D'une manière générale, on a négligé les espaces publics», juge Rachid Haouch.
Identité collective
Si Rabéa Ridaoui, présidente de Casamémoire, est quant à elle plus nuancée dans ses observations, elle ne fait pas pour autant l'impasse sur l'état de dégradation avancé du centre-ville de Casablanca. «Autrefois très prestigieux, notamment aux débuts de sa construction, il s'est paupérisé avec le temps puis s'est délocalisé ailleurs. Dans la plupart de ces bâtiments, on trouve des sous-locations à des loyers très bas, des problèmes de syndic et des propriétaires qui n'entretiennent pas leurs logements. Ces bâtiments ont été négligés et sont aujourd'hui très détériorés», reconnaît-elle auprès de notre rédaction.
Il faut dire que Casablanca souffre également d'un fléau tenace : la spéculation foncière. «Certains propriétaires négligent ces bâtiments en vue de spéculer et d'avoir une plus-value sur le terrain. Ces bâtiments tombent en ruine et deviennent menaçants. Par mesure de sécurité, ils finissent par être démolis», ajoute cette juriste de formation.
«En tant qu'association, on essaie de sensibiliser un maximum et d'alerter les pouvoirs publics, notamment lorsque des bâtiments menacent ruine, mais on n'a pas toutes les clés. Tout ce qu'on dit ne peut avoir de valeur que s'il y a un cadre juridique», rappelle Rabéa Ridaoui. En 2016, la loi 94-12 sur les bâtiments menaçant ruine, tant attendue, est finalement sortie du circuit législatif. «Sa mise en application traîne, s'inquiète la présidente de Casamémoire. Entre-temps, des immeubles sont en ruine et menacent de s'effondrer. C'est tout un pan de l'histoire de Casablanca qui est menacé.»
Rachid Haouch de conclure sur l'enjeu culturel et identitaire de ce vaste chantier : «L'ensemble du Maroc est un patrimoine. Il faut absolument soulever cette problématique sur l'ensemble du territoire marocain, quelle que soit l'époque. C'est l'autre révolution du Maroc : la prise de conscience de son identité collective qui a une valeur intrinsèque extraordinaire.»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.