Les opposants au projet de loi-cadre sur l'enseignement ne baissent pas les bras. Certains invitent les parlementaires du PJD à saisir la Cour constitutionnelle alors que d'autres signent un appel pour «s'opposer à la nouvelle invasion de la France». L'adoption du projet de loi-cadre 51-17 sur l'enseignement fait toujours grand débat au sein des composantes du PJD et dans les milieux de défense de la langue arabe. Abdelaziz Aftati, membre du secrétariat général du PJD et personnalité très populaire dans les rangs des islamistes de la Lampe, vient de compliquer la tâche à Saad-Eddine El Othmani. L'ancien député d'Oujda a proposé de recourir à la Cour constitutionnelle, conformément à l'article 132 de la loi fondamentale du 1er juillet 2011. «Les lois organiques avant leur promulgation et les règlements de la Chambre des Représentants et de la Chambre des Conseillers, avant leur mise en application, doivent être soumis à la Cour Constitutionnelle qui se prononce sur leur conformité à la Constitution.» Art. 132 de la Constitution Il donne également aux élus le droit de saisir la Cour, à condition de réunir «le cinquième (soit environ 80 députés, ndlr) des membres de la Chambre des Représentants ou quarante membres de la Chambre des Conseillers». Un appel pour «s'opposer à la nouvelle invasion française» Parallèlement à cette initiative, des personnalités proches du PJD et des milieux conservateurs ont signé une pétition contre ce qu'ils qualifient de tentative d' «imposer la francisation de l'enseignement en dehors de la logique constitutionnelle et institutionnelle». Ils considèrent la loi-cadre 51-17 comme «une nouvelle invasion française» et appellent à «y résister», indiquent-ils dans leur appel. Jouant sur la fibre patriotique, ils exhortent «l'ensemble des forces et des personnalités nationalistes libres à entreprendre des mesures juridiques et des postions à même de résister à cette initiative». Et de constater «l'échec des partis politiques dans l'accomplissement de leur devoir national historique». Ils appellent enfin «la société civile» à se mobiliser et à «rester fidèle à la mémoire nationale». Sur la liste des signataires figurent notamment Fouad Abou Ali, le président du «Collectif national pour la langue arabe», le salafiste Hammad Kabbadj, Abou Zeid El Idrissi, député du PJD qui a voté contre le projet de loi-cadre, le salafiste Hassan Kettani ou encore M'Hamed El Hilali, membre du PJD et du Mouvement Unicité et Réforme. En dehors de la médiatisation, cet appel a peu de chance d'être suivi de mesures concrètes. Et pour cause, le projet de loi organique n°86.15 fixant les conditions et les modalités d'application de l'article 133 et autorisant les personnes à présenter des recours devant la Cour constitutionnelle, bien qu'adopté par les deux Chambres du Parlement en 2017, a été rejeté le 6 mars 2018 par les Sages de la CC. Le gouvernement est dès lors contraint de revoir sa copie. Lors du conseil des ministres du 4 juin dernier, le ministre de la Justice a présenté à cet effet, un exposé détaillant les mesures que compte entreprendre l'exécutif pour se conformer au verdict du CC. Cela implique un retour à la case départ avec plusieurs mois d'attente avant l'entrée en vigueur du texte. En revanche la proposition de Abdelaziz Aftati reste envisageable. Elle risque néanmoins de diviser les deux groupes parlementaires du PJD et fragiliser davantage l'autorité du secrétaire général.