Le Maroc fait partie des pays présentant des taux d'incidence et de prévalence compris entre 3,0% et 4,9%, ce qui suggère la réalisation de progrès considérables, souligne le rapport. Le Programme commun des Nations unies sur le VIH-sida (Onusida) s'inquiète, dans son rapport annuel sur l'état de la pandémie de VIH-sida, d'un ralentissement global des progrès menés jusqu'à présent dans la réduction des nouvelles infections au VIH et de l'accès aux traitements. Rendu public ce mardi 16 juillet par l'Onusida, le rapport indique qu'environ 1,7 million de personnes dans le monde ont été nouvellement infectées par le VIH en 2018, en baisse de 16% depuis 2010, «principalement en raison de progrès constants dans la majeure partie de l'Afrique orientale et australe». Il souligne toutefois que les populations clés (consommateurs de drogues injectables, homosexuels, transgenres, prostituées et prisonniers) et leurs partenaires sexuels représentent désormais plus de la moitié (54%) des nouvelles infections au VIH dans le monde. En 2018, ces populations représentaient environ 95% des nouvelles infections en Europe orientale, en Asie centrale, au Moyen-Orient et en Afrique de l'Est et du Nord. L'Onusida observe également que moins de 50% de ces populations clés ont bénéficié des services combinés de prévention du VIH dans plus de la moitié des pays étudiés. Un chiffre qui trahit, selon le programme onusien, une marginalisation de cette catégorie d'individus dans la riposte au virus. Plus d'outils préventifs mais moins de progrès en termes de réduction des nouvelles infections Le Maroc fait partie des 48 pays présentant des taux d'incidence / prévalence compris entre 3,0% et 4,9% (la prévalence concerne les cas existants, tandis que l'incidence concerne les nouveaux cas), ce qui suggère la réalisation de progrès considérables, souligne le rapport. Il figure aux côtés de pays développés comme l'Australie, la France, Israël ou la Nouvelle-Zélande, et d'autres en voie de développement comme le Cameroun, la Côte d'Ivoire ou le Sénégal. L'Onusida souligne le fait qu'une combinaison d'approches comportementales, biomédicales et structurelles de la prévention du VIH, conçues pour atteindre les populations les plus démunies, peut permettre de réduire considérablement les infections par le VIH. «En dépit de la disponibilité d'un nombre croissant d'outils et de méthodes de prévention du VIH efficaces et d'un développement massif du traitement antirétroviral au cours des dernières années, les progrès en matière de réduction des nouvelles infections au VIH chez les jeunes et les adultes dans le monde ont été insuffisants», déplore le programme onusien. Au Maroc, le pourcentage de travailleuses du sexe ayant déclaré avoir reçu au moins deux services de prévention au cours des trois derniers mois, sur la période 2016-2018, est estimé à 60% environ. Par services de prévention, il faut comprendre préservatifs et lubrifiants, conseils sur l'utilisation du préservatif et les rapports sexuels protégés, et tests relatifs aux infections sexuellement transmissibles. Le pourcentage d'hommes homosexuels et d'autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes qui ont déclaré avoir reçu au moins deux services de prévention au cours des trois derniers mois, sur la même période 2016-2018, est évalué à 50% environ. Enfin, le pourcentage de consommateurs de drogues injectables ayant déclaré avoir reçu au moins deux services de prévention au cours des trois derniers mois, toujours sur la même période, est d'environ 45%. Dans ce cas, les services de prévention possibles reçus comprennent des préservatifs et des lubrifiants, des conseils sur l'utilisation du préservatif et les rapports sexuels protégés, ainsi que des équipements d'injections stériles. Le Maroc enregistre une forte progression dans la réalisation des objectifs «90-90-90» Le rapport de l'Onusida fait également état des progrès réalisés en matière de l'objectif baptisé «90-90-90», fixé par le programme onusien : à l'horizon 2020, 90% des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut sérologique ; 90% de toutes les personnes infectées par le VIH dépistées reçoivent un traitement anti rétroviral durable ; 90% des personnes recevant un traitement antirétroviral ont une charge virale durablement supprimée. Le Maroc a atteint le troisième objectif à hauteur de 90% et le deuxième à hauteur de 85-89%. L'Onusida évoque enfin la marginalisation et le rejet dont sont parfois victimes les personnes atteintes du VIH, en l'occurrence dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. Dirigée par MENA Rosa, un réseau régional de femmes vivant ou étant touchées par le VIH, l'étude LEARN MENA a mené des dialogues communautaires dans sept pays de la région en 2018, dont le Maroc. «Conçus et menés par des femmes, ces dialogues ont permis à ces dernières de partager leurs expériences et d'explorer les fondements et les causes de la violence et du VIH dans leurs communautés. Les femmes venaient de tous les horizons : plus de la moitié vivaient avec le VIH (53%) et presque toutes avaient été confrontées à de la violence à un moment de leur vie», souligne le rapport. «Lorsque j'ai informé ma mère et ma sœur de mon diagnostic, elles m'ont rejetée», témoigne une jeune mère vivant avec le VIH du Maroc. «Elles m'ont dit de ne toucher personne et de rester loin de leurs enfants. Finalement, j'ai dû recourir à la prostitution pour subvenir à mes besoins et à ceux de mes enfants.» Dans le royaume, Internet vient parfois pallier un manque d'écoute et de soutien envers les personnes séropositives. C'est ce qu'a constaté le sociologue Bouchaib Majdoul, auteur d'une enquête intitulée «Jeunes séropositifs marocains et internet : la force d'un lien faible». «Sur Internet, les jeunes séropositifs marocains trouvent un soutien moral et ont la possibilité de nouer des liens de sociabilité qui peuvent parfois aller jusqu'au mariage. Pour une femme ou un homme séropositif, la seule possibilité de se marier, c'est effectivement de trouver une personne elle-même séropositive. Il faut dire aussi que la grande majorité des séropositifs, surtout pour les femmes et les filles, sont rejetés par les familles. Ce rejet provoque un éclatement des liens forts», nous avait notamment expliqué le sociologue.