En Espagne, qu'ils soient en situation légale ou sans papier, les migrants ne sont pas tous logés à la même enseigne. Si la présence de Marocains et de Subsahariens est scrutée à la loupe par les médias et certains partis politiques, celle des Vénézuéliens, plus importante numériquement, passe complètement inaperçue. Il ne passe pas un seul jour sans que la presse espagnole alerte des arrivées de Marocains et de Subsahariens à bord d'embarcations de fortune. Les différentes publications rivalisent d'imagination pour trouver le titre accrocheur. Visiblement, ils sont engagés dans une course pour couvrir les pateras qui s'échouent sur les côtes ibériques avec leurs lots de drames humains. Cet intérêt porté essentiellement sur les migrants originaires du Maroc et de l'Afrique subsaharienne n'est pas sans soulevé des interrogations sur ses réelles motivations. En revanche, les mêmes médias passent sous silence le nombre croissant de ressortissants du Venezuela installés dans ce pays légalement ou en situation irrégulière. Un silence que partagent également les formations politiques, notamment de droite. Pourtant, tous ces migrants fuient la même misère à la recherche d'un avenir meilleur. Deux poids, deux mesures Contre environ les 800 de Marocains ayant déposé cette année, au moins jusqu'au août, des demandes d'asile, il y a plus de 25 000 de requêtes signées par des Vénézuéliens. En juin, elles étaient 17 669. Des chiffres révélés en octobre par le quotidien ABC. Et même lorsque le ministère espagnol de l'Intérieur lui arrive de rejeter des sollicitudes d'asile de citoyens en provenance du Venezuela, la justice entre en jeu. C'est ce qui s'est, d'ailleurs, passé en octobre avec la décision de l'Audience nationale espagnole autorisant la présence sur le territoire espagnol des Vénézuéliens qui ne remplissent pas les conditions donnant droit à bénéficier de l'asile. La cour a justifié son arrêt par des «raisons humanitaires», rapporte El Pais. Une chance que les Marocains et les Subsahariens n'en ont pas. En revanche, ils sont les premiers à être frappés par la foudre des expulsions qu'elle soit servie à chaud ou à froid. De 2008 à fin 2017, l'Espagne a rapatrié par la force environ 90 000 migrants dont plus du tiers sont des Marocains, au nombre de 31 426 personnes. Les Boliviens sont deuxièmes avec 7 366, suivi des Brésiliens (6 286) et les Colombiens (5 357). Des chiffres révélés par le ministère de l'Intérieur dans un rapport remis au Parlement et cité par le média espagnol Las Provincias a bien voulu en faire écho en octobre dernier. Malheureusement, le nombre des expulsés par les autorités espagnoles ne bénéficie pas de la même couverture médiatique. Lui aussi passe sous silence.