Poursuivie depuis décembre 2017, l'activiste Helena Maleno est soupçonnée d'être impliquée dans des réseaux d'immigration clandestine. A ce jour, aucune preuve permettant de l'incriminer n'a été présentée. Le Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme dénonce un «harcèlement». L'enquête visant l'activiste espagnole Helena Maleno au Maroc a récemment fait l'objet de vives critiques de la part de la rapporteure spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires au Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, Agnès Callamard. Dans un rapport intitulé «Sauver des vies n'est pas un crime», la rapporteure indique qu'à ce jour, «aucune preuve incriminant l'activiste n'a été rendue publique». Celle-ci est en effet soupçonnée de collaborer avec des passeurs. Rappelant que les autorités marocaines enquêtent sur Helena Maleno, Agnès Callamard estime que «les responsables gouvernementaux harcèlent les acteurs humanitaires en menant des enquêtes et des poursuites sans fondement pour les dissuader de travailler». Citant également le cas de l'enquête ouverte contre l'ONG Jugend Rettet en Italie, qui sauve les noyés en Méditerranée, le rapport fustige les politiques «des Etats qui font valoir que le sauvetage crée un facteur d'attraction». Et d'ajouter que ces derniers «ignorent les facteurs d'incitation, les dangers dans les pays d'origine et de transit. Ils ignorent et ne comptent pas les morts et les souffrances des migrants et des demandeurs d'asile». Maroc – Espagne, qui est responsable ? Dans le cas de Helena Maleno, la défense de l'activiste estime que le tribunal de Tanger s'est basé sur une série de rapports élaborés par la police espagnole, qui la suspecte d'être impliquée dans un délit relatif à l'immigration clandestine. C'est pourtant sur la base de ces mêmes documents que le ministère public de l'Audience nationale en Espagne a décidé, en avril 2017, qu'il n'y avait pas d'indices prouvant le caractère délictuel des activités de Helena Maleno. A l'époque, l'ONG espagnole Oxfam Intermón, qui lutte contre la pauvreté, avait dénoncé la réticence du gouvernement espagnol à informer les autorités marocaines que le ministère public espagnol avait classé l'enquête, pour laquelle la militante est appelée à comparaître devant la justice marocaine. «Si Helena Maleno doit aller témoigner dans un tribunal marocain, ce n'est pas parce qu'elle a des problèmes avec la justice marocaine. C'est parce que la police espagnole l'a accusée dans le cadre d'une enquête transférée au Maroc», a déclaré au journal en ligne eldiario.es Francesc Mateu, vice-président de Oxfam Intermón et directeur de sa section catalane. «S'il y a eu une erreur et que le tribunal marocain ne sait pas que cette enquête a été classée en Espagne, c'est à l'ambassade de trouver une solution», a-t-il défendu. L'affaire a pris une autre tournure lorsque l'activiste a dévoilé sur son compte Twitter une note du gouvernement espagnol dans laquelle ce dernier affirme ne disposer «d'aucune information sur l'envoi de rapports de police sur Helena Maleno au Maroc», ni «d'informations concernant des affaires judiciaires ouvertes ou non. Ni au Maroc, ni en Espagne». Une réponse qui a suscité la colère de l'activiste. Cette dernière dit avoir «[vécu] un cauchemar pendant des mois» à cause de «trois rapports criminels de la police espagnole». Elle se dit stupéfaite face à cette «indigne réponse de quatre lignes» et soutient fermement que «le gouvernement ment». Pour rappel, la police espagnole avait accusé Helena Maleno d'être impliquée dans des réseaux d'immigration clandestine. Elle estime également que les appels de l'activiste à la SAMESAR, les services de secours chargés de la sûreté maritime dans les eaux espagnoles, pour avertir de la présence d'embarcations de fortune, «ont pour objectif d'assurer l'entrée [de migrants en situation irrégulière] sur le territoire espagnol».