Au lendemain de l'Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l'homme des Nations unies à Genève, lors duquel l'agence onusienne a passé au crible, pour la troisième fois, la situation des droits humains au Maroc, Radidja Nemar, responsable juridique Grand Maghreb à la Fondation Al Karama, revient sur les problématiques qui subsistent. Créée en 2004, Al Karama Foundation a pour cheval de bataille la défense des droits de l'homme dans le monde arabe. Faisant office de trait d'union entre les victimes et les mécanismes internationaux de protection des droits de l'homme, l'ONG œuvre pour l'instauration d'un véritable Etat de droit dans les pays de la région. Le Maroc a été examiné hier après-midi, après la Tunisie. L'examen de l'Algérie est prévu la semaine prochaine. Radidja Nemar, responsable juridique Grand Maghreb à la Fondation Al Karama revient avec Yabiladi sur le débat et les recommandations adressées au royaume. Qui a représenté le royaume hier ? Mustapha Ramid, accompagné d'une délégation de 15 membres du gouvernement qui ont mené un premier tour de table entre leur pays et tous les Etats membres de l'ONU. Hier s'est tenu le dialogue interactif qui a pour but, en une demi-journée au siège des Nations unies à Genève, de donner la parole à chaque pays durant 1 minute 30 pour mettre en exergue les failles qui persistent en matière de droits de l'homme. Le Maroc a passé cet oral hier et a répondu aux recommandations (il en a également soumis) des autres pays. L'Examen périodique universel se tient tous les quatre ans. Chaque pays membre de l'ONU se présente à cet examen. Quelles sont les principales recommandations auxquelles le Maroc a répondu ? Le Maroc a débattu autour de plusieurs points, notamment les droits des femmes et la liberté d'expression. Le rôle du gouvernement marocain dans ces démarches consiste à répondre aux recommandations formulées par les autres nations, puis d'en sélectionner certaines et d'en refuser d'autres. Le Maroc est libre de prendre ses décisions. Comme tous les autres pays, il dispose de deux à trois mois pour faire son choix, puis de quatre années pour mener des actions en faveur des recommandations acceptées, avant que tous les Etats se réunissent à nouveau pour évaluer ce qui a été fait. Votre rapport date du 22 septembre 2016. Peut-on dire qu'il est récent ? La procédure de l'EPU veut que toutes les ONG présentent leur rapport avant une date butoir, soit septembre 2016 cette fois-ci. Ces rapports doivent mettre en exergue toutes les failles qui touchent aux droits de l'homme, autant sur le front des droits politiques et civiques, qu'économiques et sociaux. Sur la base de ce rapport, toutes les nations réunies lors de l'EPU présentent leurs recommandations au pays concerné pour qu'il soit examiné durant cette assemblée, d'où cette date antérieure. Il y a deux semaines, nous nous sommes réunis avec plusieurs ONG et avons expliqué à chaque délégation quelles sont les difficultés qui subsistent en matière de droits de l'homme au Maroc. L'EPU observe de manière générale les droits de l'homme dans chaque Etat membre de l'ONU, il ne se concentre aucunement sur des cas particuliers. Ce rapport a-t-il été débattu ? Nous avons débattu autour de cette étude en avril avec la société civile ainsi que les ONG qui ont travaillé sur le Maroc, mais aussi en présence des représentants des missions permanentes, c'est-à-dire avec quasiment tous les pays du monde. Toutes les ONG présentent leur rapport en mettant en avant les thématiques qu'elles estiment être problématiques afin d'ouvrir le débat. En tant qu'ONG, êtes-vous satisfaits de la situation des droits de l'homme au Maroc ? Le Maroc a enregistré ces dernières années de nettes améliorations en matière de droits de l'homme. Mais il reste aujourd'hui quelques point noirs qui n'ont pas été traités, en l'occurrence la torture. Certes ça a évolué, on ne parle plus de la torture telle qu'elle existait avant, mais lorsqu'un prisonnier se plaint de sévices corporels et de torture, les autorités n'ouvrent pas d'enquête. Plusieurs témoignages le confirment, à l'instar notamment de personnes qui se disent victimes de pressions lors de la relecture ou de la signature de leur procès verbal. La torture reste donc l'une de nos principales recommandations pour le Maroc.