Il a fallu attendre que le PJD prenne la tête du gouvernement pour qu'un haut dirigeant du Hamas, en l'occurrence Khaled Mechaâl, puisse fouler le sol marocain. A cela s'ajoute une succession d'événements qui inquiétent Israël et incitent ses services de renseignements à examiner les conséquences de la relation entre le PJD et le Hamas sur le Palais. Le Shin Beth et le Mossad, suivent de très près l'évolution des relations entre le PJD et le Hamas (l'antenne palestinienne des Frères musulmans, ndlr). C'est ce qui ressort d'un rapport sur les menaces qui guettent Israël en 2016, rédigé conjointement par les deux services secrets israéliens et dont des extraits concernant le royaume ont été publiées par l'hebdomadaire Al Ousboue. L'Etat hébreu craint que la direction du parti de la Lampe ne contribue à un rapprochement entre le Palais et le Hamas. La présence de Khaled Mechaâl au 7ième congrès du PJD, en juillet 2012, au rang d'invité d'honneur, n'était pas passée inaperçue du côté de Tel-Aviv, même si les «frères» de Benkirane l'avaient contrebalancé en invitant l'Israélien Ofer Bronchtein, ancien conseiller du premier ministre Itzhak Rabin. Le chef de l'organisation palestinienne avait été reçu avec honneurs et égards. Sa sécurité personnelle avait même été assurée par les services de sûreté marocains. Des faits qui inquiètent Israël Six mois plus tard, c'est le conseiller royal Abdellatif Mennouni qui recevait, de surcroît au cabinet royal, une délégation palestinienne comprenant des membres du Hamas. Cette rencontre au Maroc avait pour but d'amorcer une réconciliation avec leurs frères ennemis du Fatah. A cela s'ajoute la participation, en février 2013, de membres du mouvement islamiste palestinien à un meeting du PJD à l'occasion d'une élection partielle à la circonscription de Moulay Yaâcoub. Cette présence formellement interdite par la loi marocaine a été à l'origine de la décision du conseil constitutionnel d'annuler le scrutin du 28 février. Tous ces événements consécutifs ont sans aucun doute alimenté les inquiétudes des israéliens. Mais c'est la présentation en juillet et août 2013 de propositions de loi, par les groupes des députés du PJD, du PPS, de l'Istiqlal, de l'USFP et du PAM, pénalisant toute normalisation avec Israël qui a vraiment déclenché la colère des responsables à Tel-Aviv. L'heure a alors été à la mobilisation. L'hebdomadaire Al Ousboue révèle, en se basant sur le rapport du Shin Beth et du Mossad, un rôle déterminant de Washington qui aurait convaincu les politiques marocains de reporter sine die l'examen des textes. Le PAM est allé même plus loin, en retirant sa proposition. Avec le PJD, le commerce au moins est au vert Depuis le PJD a initié une inflexion de son engagement pour la Palestine, laissant à sa matrice, le Mouvement unicité et réforme, ou à son bras droitdelhommiste, le Forum Al Karama, le soin de dénoncer et fustiger les agressions israéliennes à Gaza ou à Al Qods. Mieux encore, ses ministres évitent de prendre part aux manifestations populaires de solidarité avec les Palestiniens. Par ailleurs et malgré toutes ces inquiétudes, il y a un point qui rassure, d'une certaine manière, les décideurs à Tel-Aviv : les relations commerciales avec le royaume. Ils reconnaissent que Benkirane n'a rien entrepris pour empêcher cette activité. Loin de là, il a laissé faire. Les chiffres du Centre israélien des statistiques montrent que les échanges commerciaux ont enregistré une nette progression depuis l'arrivée des islamistes à la présidence du gouvernement.