Melilla a subi de fortes pressions migratoires en fin de semaine dernière. Pour contrecarrer les entrées massives, les forces de l'ordre marocaines sont entrées dans la ville autonome pour expulser les migrants qui arrivaient à traverser la barrière frontalière. Révélé par une ONG qui en a publié les images, le fait est dénoncé comme étant une violation «flagrante» des droits de l'homme. Détails. Vendredi 28 mars, les forces auxiliaires marocaines sont entrées à Melilla pour expulser des migrants qui se trouvaient derrière la clôture frontalière du côté de la ville autonome. Le fait a été révélé par l'association espagnole Prodein avec pour preuve des photos et une vidéo et fait la une de la presse espagnole ce lundi. Ces images montrent comment plusieurs soldats marocains sont entrés dans la zone situées entre les deux clôtures (marocaine et espagnole) pour faire descendre les migrants perchés sur la barrière espagnole afin de les ramener au Maroc. Selon les explications de l'ONG, les forces marocaines y ont été introduites par la police espagnole qui leur a ouvert la porte arrière de sa clôture. Depuis que Rabat et Madrid collaborent pour lutter contre l'immigration irrégulière, c'est la première fois que les forces marocaines réalisent un tel acte. Prodein dénonce une violation «flagrante» des droits de l'homme Prodein dénonce une violation «flagrante» des droits de l'homme par les forces marocaines. Elles «ont traversé une frontière internationale, armés et sous le regard de la garde civile qui n'a absolument rien dit», s'offusque son président, Joseph Palazon, rapportant que les agents marocains usaient de matraques. L'association rappelle que la loi espagnole interdit l'expulsion des personnes non identifiées et dont la volonté de demande d'asile n'a pas été vérifiée. «Quelqu'un doit expliquer pourquoi les Marocains qui se trouvent à gauche de la frontière sont entrés dans notre pays pour agir à l'encontre de notre législation», revendique M. Palazon. L'ONG compte déposer une nouvelle plainte contre le représentant du gouvernement à Melilla et le colonel de la garde civile, toujours concernant la gestion de cette immigration irrégulière. Rabat et Madrid étaient-ils d'un commun accord ? Jusqu'ici, le Maroc avait employé différentes méthodes pour contrecarrer l'immigration irrégulière vers l'Espagne. A la demande de Madrid, Rabat a renforcé –début mars- sa présence militaire près des frontières de Ceuta et Melilla, en raison des assauts massifs enregistrés depuis le début de l'année, et dont le rythme n'a fait que s'accélérer. La semaine dernière, le quotidien espagnol El Pais révélait que les autorités marocaines avaient lancé des travaux de renforcement de la frontière avec Melilla. Malgré tout cela, les tentatives d'assauts n'ont pas cessé de se multiplier. Jeudi 27 mars, les forces marocaines ont empêché l'entrée de 1000 migrants à Melilla. Le lendemain près 800 migrants renouvelaient une tentative d'assaut, suite à laquelle 10 d'entre eux ont réussi à entrer dans l'enclave. On sait très bien que les Espagnols comptent énormément sur l'aide du Maroc sur ce dossier. Mais Rabat restant très discret, difficile de dire si les forces marocaines sont entrées à Melilla vendredi dernier avec l'accord des Espagnols ou non. Nous avons tenté de joindre en vain le ministère de l'Intérieur pour obtenir une réponse. De son côté, l'un des porte-parole de la garde civile, interrogée sous anonymat par le site Cadenaser s'est montré plutôt très étonné. Après avoir vu les images enregistrées par l'ONG Prodein, il a affirmé : «le plus grave, c'est que les Marocains viennent sur le sol espagnol pour faire quelque chose d'illégal, expulser des immigrants non identifiés du territoire espagnol», rapporte la même source. Toutefois, il ne serait pas étonnant que cette opération marocaine soit le résultat d'un accord secret avec les Espagnols. D'autant plus que Melilla subi une trop forte pression migratoire ces derniers temps. Et les responsables espagnols n'arrêtent pas d'appeler au secours leurs homologues marocains. «La collaboration du Maroc est essentielle pour résoudre ce problème d'immigration clandestine», a réitéré le président de Melilla, Juan José Imbroda, dans une interview accordée au journal La Rioja. Les explications de Rabat sont actuellement plus que nécessaires, dans cette affaire qui pourrait prendre des tournures insoutenables, avec à la clé de graves critiques quant au respect du droit international.