Le Maroc et l'Espagne marquent un nouveau tournant dans le dossier migratoire en réactivant l'accord de réadmission des migrants accédant à partir du Maroc. Une décision décriée par Podemos et saluée par les forces de sécurité espagnoles. L'accord inédit conclu entre le Maroc et l'Espagne le 23 août dernier et permettant la réadmission de 116 migrants subsahariens ayant forcé les barrières de Sebta fait jaser en Espagne. La décision du Maroc d'accepter le refoulement des candidats à l'immigration irrégulière forçant le passage sebti a pris de court les milieux partisans et médiatiques ibériques. C'est la première fois que le royaume accède à la demande du gouvernement espagnol de procéder à un refoulement groupé de migrants. En effet, le gouvernement de Pedro Sanchez a réussi un coup de maître qui fera bien des jaloux. De fait, même le gouvernement de Mariano Rajoy, avec lequel Rabat entretenait des relations exemplaires en matière de gestion des flux migratoires, n'a jamais réussi à convaincre son homologue marocain de reprendre les migrants accédant à partir de Sebta ou Mélilia, selon la pratique dénommée «refoulement à chaud». Celle-ci a été dénoncée par le comité anti-torture du Conseil de l'Europe en 2015. De fait, le deal maroco-espagnol est régulé dans le cadre de l'accord de réadmission, signé en 1992 et activé une seule fois en 2012, lorsque des candidats à l'immigration irrégulière avaient pris d'assaut un îlot désert proche du Maroc. Vivement critiqué par les ONG, le gouvernement espagnol a justifié sa décision par le changement de comportement des migrants, lesquels se sont montrés très agressifs à l'égard des agents, allant même jusqu'à jeter de la chaux vive sur les éléments de la gendarmerie espagnole, voire des excréments et de l'acide. À travers cette mesure, le gouvernement espagnol a tenté de réduire au silence les accusations de «passivité» envers les flux migratoires qui ont augmenté depuis son investiture. De surcroît, la manœuvre de l'Exécutif espagnole aura l'avantage de dissuader, pour quelques temps, les prochains candidats. Elle poussera aussi les migrants à se rabattre sur la voie maritime pour accéder aux côtes espagnoles. Or, la décision n'est pas du goût de Podemos. La formation d'extrême gauche s'est révoltée contre la pratique et a saisi le gouvernement de Sanchez. Le parti de Pablo Iglesias a souhaité savoir si cette pratique deviendra systématique. En effet, s'agit-il d'un nouveau tournant dans la gestion du dossier migratoire entre Rabat et Madrid ou un «cas isolé», qui ne se reproduira plus, du moins dans les prochains mois ? Si cela ne tient qu'au chef du gouvernement espagnol, les migrants seront expulsés «tant que cela est possible». Plus pratique, le ministère de l'Intérieur espagnol a estimé, de sa part, que ces expulsions seront possibles, «si le Maroc y accède». En tout cas, cette décision a fait le bonheur des agents espagnols postés aux enclaves. L'association espagnole des Gardes civils s'est vite empressée d'exprimer sa satisfaction à l'adresse de cette décision. En outre, elle a espéré que cette mesure ne soit pas un «cas isolé». Certains médias proches de la droite ont estimé que la «générosité» de l'Union européenne, laquelle a accepté de débloquer des fonds ad hoc au profit de la lutte contre l'immigration irrégulière au Détroit, a eu son effet. Le gouvernement de Mélilia (PP) a applaudi des deux mains cette décision. Celle-ci ouvre la voie à une possible réadmission des mineurs marocains qui franchissent le préside, espère l'Exécutif de Mélilia.