Le Rapport 2009-2010 de Migreurop dénonce la politique de rétention et la sous-traitance de la gestion sécuritaire de l'immigration par l'Europe, notamment aux pays du Sud. Pour les demandeurs d'asile à Sebta, ce préside occupé ne fait plus partie de l'Union car leur transfert vers la péninsule a été interdit. Le rapport 2009-2010 de Migreurop, publié le 12 novembre, vient de dénoncer la politique de rétention et la sous-traitance de la gestion sécuritaire de l'immigration par l'Europe, notamment aux pays du Sud. Le gouvernement espagnol procède de deux façons différentes pour faire partir les migrants du préside occupé de Sebta, selon que ces départs ont lieu vers le Maroc ou vers le continent espagnol. L'expulsion vers le Maroc vise tous les migrants arrêtés dans les eaux marocaines et dans le périmètre frontalier. Cette pratique a lieu sans aucun contrôle ni respect des droits de l'homme. De nombreux récits de migrants témoignent des violations de ces droits de la part des forces de sécurité de Sebta. Malgré le nombre peu élevé de migrants qui arrivent à ce préside occupé, des événements sanglants qui se soldent par de nombreux morts continuent à se produire, a révélé le rapport Migreurop. Un migrant d'origine subsaharienne, D. P., témoigne de la manière dont un compagnon sénégalais est mort avec deux autres personnes lorsqu'ils essayaient d'atteindre à la nage la côte de Sebta. Ces morts ont été causées par l'action de la Guardia civil, sous les yeux de la police marocaine. Les faits se sont produits en septembre 2008. Le rapport signale que l'Union européenne enjoint l'Espagne d'empêcher par tout moyen les migrants extra-européens de pénétrer, et de traiter sévèrement ceux qui y sont parvenus. A son tour, l'Espagne prétend imposer au Maroc de stopper à la source les tentatives d'intrusion. Les marchandages en cascade, causées par ces sous-traitances, ont pour résultat la persécution des candidats à la migration (notamment les Subsahariens), piégés à l'intérieur des frontières marocaines, et l'enfermement de facto des étrangers sans visa, qui ont réussi à franchir le rempart de grillages rehaussés de barbelés « rasoir » longeant la partie terrestre de Sebta. Pour les demandeurs d'asile à Sebta, ce préside occupé ne fait plus partie de l'UE car leur transfert vers la péninsule a été interdit. Désormais, il leur faut soit s'éterniser dans cette «cage dorée», en proie à la misère et à l'hostilité des résidents, soit risquer leur vie pour entreprendre la traversée. Le Maroc, d'après un accord de 1992, accepte de réadmettre sur son territoire les migrants qui y sont entrés de manière irrégulière. Ainsi, le durcissement des politiques migratoires européenne et espagnole a renforcé le contrôle à la frontière, limité les déplacements des migrants à l'intérieur du territoire espagnol, systématisé les méthodes basées sur la détention et l'expulsion, et donc généré une violence silencieuse et croissante, qui s'oppose frontalement aux droits et à la dignité des migrants. Une frontière assassine A partir de 2005, le gouvernement espagnol a établi un contrôle frontalier 24 heures sur 24 à l'aide de nombreux moyens technologiques (détecteurs de mouvements, caméras vidéos, caméras de vision nocturne, etc.). La barrière a été surélevée tout le long du périmètre frontalier terrestre et un renforcement des effectifs a également été mis en place pour la surveillance tant à terre que sur mer, ce qui est supposé rendre l'enclave pratiquement inaccessible. De 2005 à 2008, l'immigration vers Sebta s'est maintenue. Aujourd'hui, peu de migrants arrivent à sauter la barrière, et le nombre d'entrées de personnes cachées dans des voitures par le passage frontalier de El Tarajal augmente. Ce passage est plus cher (les prix peuvent aller jusqu'à 3.000 euros) et est contrôlé par des mafias qui s'enrichissent en faisant crédit, surtout aux femmes qui, une fois en Europe, pourront être victimes d'exploitation sexuelle et devront rembourser des sommes beaucoup plus élevées. De 2009 à la mi-2010, trois cents personnes environ sont passées à Sebta. Cela traduit une diminution du flux migratoire. Cette ville n'est plus considérée comme une porte d'entrée facile en Europe par les migrants, qui savent qu'une fois arrivés, il ne leur sera plus possible d'en repartir avant que l'Espagne ne signe un accord de réadmission avec leur pays d'origine et qu'ils y soient refoulés. Sebta est pour eux un énorme centre de rétention entouré, d'un côté, d'une barrière de six mètres de haut s'étalant sur huit kilomètres, et de l'autre par la mer. La politique d'enfermement du gouvernement espagnol est la face obscure des accords de réadmission signés par l'Espagne avec les pays d'origine pour pouvoir expulser d'une manière «efficace» et «légale» les migrants se trouvant à Sebta. Les migrants en rétention à Sebta vivent dans une sorte de «limbe» juridique. Leurs droits sont restreints par rapport à ceux qui se trouvent sur la péninsule ibérique. Ils ne peuvent ni se déplacer en Espagne ni dans le reste de l'UE, puisque Sebta n'est pas considérée comme faisant partie de l'espace Schengen. Par ailleurs, ils n'ont accès ni à la sécurité sociale ni à l'éducation.