Le nouveau chef de la diplomatie algérienne prêche la «retenue» avec le Maroc. C'est le style Ramtane Lamamra. Un style qui obéit, plutôt, à des considérations internes, liées à la préparation de la succession de Bouteflika et la guerre que mène son clan à la DRS, qu'à une réelle volonté de normaliser les relations avec le royaume. Le 11 septembre, le président Abdelaziz Bouteflika opérait un large remaniement ministériel. Dix-huit ministres quittèrent le gouvernement Sellal. Parmi les nouveaux venus, figure Ratmane Lamamra nommé à la tête du département des Affaires étrangères à la place de Mourad Medelci, promu président du conseil constitutionnel. Ce changement est suivi de très près par les officiels marocains. Presque un mois après sa désignation, Lamamra a, enfin, abordé l'état des relations avec le royaume et l'épineuse question de la fermeture des frontières terrestres, depuis déjà dix-neuf ans et deux mois. «Les relations avec le Maroc ne sont pas normales» Hier, le ministre des Affaires étrangères a accordé une interview à une radio locale, consacrée aux dossiers internationaux. Bien entendu, le Maroc y a occupé une place de choix. Ramtane Lamamra reconnaît que les relations entre son pays et Rabat ne sont ni «normales» ni «excessivement tendues», et ce en dépit, des «accès de fièvre dans les médias et malheureusement parfois dans des déclarations officielles», côté marocain. Aussi, l'homme fait-il la promotion de son style basé sur «la retenue». Une vertu «extraordinairement importante lorsqu'il s'agit de pays frères et voisins dont l'histoire n'a pas été un long fleuve tranquille». Vantant les mérites de sa «marque», il explique que «cette retenue et cette sagesse constituent le minimum que nous puissions assurer pour aller de l'avant et avoir des relations normales sinon privilégiées» avec son voisin de l'ouest. Apaiser les relations avec le Maroc pour mieux se consacrer à la DRS Ce style Lamamra a été annoncé, dés le 26 septembre au siège de l'ONU, par le nouveau chef de la diplomatie lorsqu'il a assuré que «l'Algérie soutient l'intensification des efforts de l'envoyé spécial du Secrétaire général de l'ONU, Christopher Ross, en vue d'amener les deux parties au conflit, le Maroc et le Front Polisario, à lever, par la négociation, tous les obstacles pour permettre au peuple du Sahara occidental de déterminer librement son avenir». Cette «retenue» s'exprime également sur l'épineuse question des frontières terrestres, fermées depuis août 1994. Lamamra estime que «les raisons à l'origine de la fermeture des frontières n'ont pas encore été réglées». Force est de constater que la «retenue» prêchée par Ramtane Lamamra obéit plutôt à des considérations internes qu'a une réelle volonté de normaliser les relations avec le Maroc. En ces temps de «succession ouverte» à Alger, le clan Bouteflika tente d'éviter le déclenchement d'une crise avec Rabat. Il a, en effet, d'autres chats à fouetter, notamment à la DRS. Depuis son retour de Paris, le président grignote les pouvoirs de cet Etat dans l'Etat. Fin septembre, il a dissout la police judiciaire de la DRS. Certes, pour le moment, Bouteflika enchaine les victoires mais la guerre avec les renseignements militaire du général Taoufiq n'est pas encore terminée.