Au lendemain du passage du chef de gouvernement à la Chambre des conseillers, consacré au MRE, Yabiladi a donné la parole à Salem Fkire, président de l'association Cap Sud MRE et Abdelkrim Belguendouz, universitaire et spécialiste de l'immigration, pour commenter et évaluer la prestation de Benkirane. Interview. Yabiladi : que retenez-vous du débat d'hier à la Chambre des conseillers, consacré au MRE ? Salem Fkire, président de Cap sud MRE : Mon impression est toute simple: le chef du gouvernement a annoncé de bonnes nouvelles, comme la généralisation de la RAMED aux MRE ne justifiant pas d'une couverture médicale dans les pays d'accueil. Une initiative que nous saluons, d'ailleurs. Il a insisté pour que nous impliquions dans le jeu politique, conformément aux articles 16, 17 et 18 de la constitution. Je me réjouis que ce débat ait eu lieu. Abdelkrim Belguendouz : Il y a quelque chose qui cloche dans le déroulement de ces séances mensuelles, on en sort, toujours frustré. Hier, il n'était pas question de présenter le volet MRE du programme du gouvernement, Benkirane l'avait déjà fait en janvier 2012, mais de savoir où en est l'application des articles 16,17, 18 et 163 de la loi fondamentale, une année et demie après la formation de ce cabinet. Si les questions des conseillers étaient bien précises, les réponses de Benkirane ne l'étaient pas. Dans l''ensemble le débat d'hier était flou. Sur la participation politique, il n'a fourni aucune piste ; estimant qu'il traite ce sujet avec une extrême prudence. Yabiladi : Est-ce que le chef de gouvernement vous a convaincu de sa volonté de faciliter la participation politique des MRE ? Salem Fkire : Je suis convaincu de sa volonté qui n'a d'ailleurs pas changé depuis que nous avions signé, le 7 septembre 2011, avec lui, à l'époque le PJD était dans l'opposition, une convention en ce sens. Yabiladi : Manifestement, il y a blocage… Salem Fkire : oui il y a un blocage mais il est infondé. Il résulte d''une mésinformation sur la composante MRE. Une composante qui a changé, évolue et est parfaitement engagée politiquement dans les pays d'accueil, alors pourquoi pas dans son pays d'origine qu'est le Maroc ? Aujourd'hui, nous MRE nous réclamons le droit de parler pour nous et non que les autres parlent en notre nom. La participation politique est le moyen idoine pour la concrétisation de cet objectif, d'autant que 45% des MRE sont des binationaux et 70% ont moins de 45 ans. Une représentativité de la communauté marocaine installée à l'étranger aura le mérite de renforcer les liens avec le Maroc. Nous sommes la diaspora la plus attachée à ses origines. Une participation politique ne pourra que raffermir davantage ces liens surtout avec les MRE de la troisième génération. Belguendouz : Je constate que sur ce sujet, Benkirane hésite encore. Il a dit qu'il préfère agir avec prudence et que cette thématique relève de la politique générale de l'Etat. Il faut qu'il ait le courage d'assumer ses responsabilités et d'opérationnaliser les articles de la constitution en faveur de la participation politique des MRE, les discours du roi Mohammed VI, de 2005 et 2006, sont clairs là-dessus. Yabiladi : Comment évaluez-vous l'approche du gouvernement du dossier des retraités des Pays-Bas ? Belguendouz : Encore une fois, le chef de gouvernement n'a pas apporté de réponses claires sur un sujet d'une importance capitale pour une partie des Marocains et Marocaines. Je tiens à souligner, contrairement aux propos de Benkirane, que le parlement des Pays-Bas a commencé à débattre du projet de la réduction de 40% des allocations des retraités marocains en juin 2012. C'est-à-dire sous ce cabinet et non sous celui d'Abbas El Fassi. Le séminaire organisé, en janvier à Al Hoceima, par le département de Abdellatif Maâzouz, destiné à la sensibilisation des familles était en fait une initiative des associations pour sensibiliser le gouvernement sur cette question. Salem Fkire : Ce qui se passe aux Pays-Bas est très grave. Le Maroc se doit de réagir et défendre les intérêts de ses citoyens et de leur assurer protection, comme le stipule l'article 16 de la constitution. C'est très grave parce qu'il constitue un précédent et qui pourrait inciter d'autres pays à sursoir à leurs engagements si le Maroc ne bouge pas. Pour nous MRE, il est impératif que le gouvernement use de toute son influence afin de mettre un terme à ces mesures xénophobes. Nous ne voulons pas être considérés comme les boucs émissaires de la crise économique.