Les autorités de Mélilia ont révélé hier l'émergence d'une nouvelle technique de franchissement de la frontière de l'enclave par les migrants clandestins : la voiture bélier. Deux véhicules ont réussi à entrer, en fin de semaine dernière, avant d'être interceptés. Tous les migrants ont été renvoyés au Maroc. Entre le go fast et la voiture bélier. Les migrants subsahariens interdits d'entrée en Europe ont essayé, la semaine dernière, une nouvelle technique pour franchir la frontière de Mélilia. Au volant de deux voitures, 21 d'entre eux ont foncé et traversé par surprise les postes frontières marocain et espagnol, en fin de semaine dernière, a rapporté hier, mercredi 13 février, la presse espagnole. Ils ont tous été interpelés à Mélilia et réadmis par le Maroc. Une première voiture, où s'entassent 11 personnes, jeudi 7 février, à minuit, a franchi le poste frontière marocain de Bir Ensar à toute allure par surprise. Les policiers espagnols sont alertés et tentent de fermer les grilles de fer, mais la voiture arrive et les rouvre violemment en les percutant de plein fouet. La voiture est finalement interceptée, 150 mètres plus loin par la garde civile espagnole. Dimanche 10 février, 10 autres migrants tentent l'aventure et montent dans une voiture. A 7h40, ils franchissent à toute vitesse, les deux postes frontières marocain et espagnol de Farhana, avant d'être à leur tour interceptés. Un premier cas de «go fast» avait déjà eu lieu, fin janvier, rapporte ABC. Le franchissement de la frontière par Farhana L'annonce de cette nouvelle façon de franchir la frontière a été faite par le délégué du gouvernement à Mélilia (sorte de préfet), Abdelmalik El Barkani, lors d'une conférence de presse, hier, après avoir obtenu du Maroc la réadmission de ces 21 personnes. Tout se passe comme si, le gouvernement autonome de la ville n'avait pas voulu révéler l'affaire sans l'avoir déjà résolue. Le message adressé aux migrants est le suivant : si vous tentez d'entrer de cette façon, vous serez renvoyés au Maroc, quelque soit votre nationalité. Le Maroc réadmet Déjà, le 6 septembre 2012, lorsque 83 migrants clandestins subsahariens avaient tenté de parvenir en Espagne en atteignant l'îlot Sfiha proches des côtes marocaines mais sous souveraineté espagnole et indéfendable par la garde civile, le Maroc avait accepté de les réadmettre sur son sol. Pourtant, il a toujours refusé de signer l'accord de réadmission élargi que veut lui faire signer l'Union européenne et qui l'obligerait à récupérer tous les immigrants clandestins qui sont passés par le Maroc, y compris les non-Marocains. En réadmettant de façon relativement officielle – à aucun moment un représentant marocain ne s'est exprimé sur le sujet, mais les Espagnols l'ont fait à sa place – les migrants subsahariens parvenus sur l'îlot d'abord, puis par ce système de go fast, ensuite, le Maroc semble avoir adopté une nouvelle stratégie de compromis : il réadmettra tous les migrants clandestins qui tentent de franchir la frontière de manière «non-conventionnelle». Corruption des forces auxiliaires marocaines Au-delà des réadmissions officielles et médiatiques, il y a également tous les renvois secrets. «On sait que beaucoup de migrants, lorsqu'ils sont attrapés très peu de temps après avoir franchi la frontière, sont renvoyés au Maroc très discrètement, de manière totalement illégale», indique Pascal Julinet, chargé de programme droits des étrangers et plaidoyer, pour le Groupe Antiraciste d'Accompagnement et de Défense des Etrangers et Migrants (Gadem). Ces réadmissions seraient facilitées par la corruption des forces auxiliaires qui gardent la frontière du côté marocain. «Beaucoup de témoignages de migrants nous sont parvenus. Ils disent qu'au moment où les Espagnols les remettent aux Marocains, par une petite porte discrète, ils voient passer de l'argent des mains de la garde civile dans celles des forces auxiliaires», rapporte Pascal Julinet.