Selon des révélations du journal britannique The Guardian, le Mossad a fait pression sur l'ancienne procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI), Fatou Bensouda, en exploitant des vidéos de son mari, homme d'affaires maroco-gambien. L'agence israélienne de renseignement extérieur a voulu pousser la responsable à abandonner son enquête sur des crimes de guerre commis en Palestine. Le journal britannique The Guardian a révélé, mardi, que Yossi Cohen était derrière des menaces contre Fatou Bensouda, lors de son mandat de procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI), de 2012 à 2021. Dans le cadre d'une série de réunions secrètes, l'ancien chef du Mossad a fait pression pour obtenir l'abandon l'enquête sur des crimes de guerre commis en Palestine. «Vous ne voulez pas vous engager dans des choses qui pourraient compromettre votre sécurité ou celle de votre famille», a notamment proféré Cohen, à la tête de l'agence de renseignement étrangère israélienne de 2013 à 2021. Annoncée en 2015, la procédure préliminaire en question a été achevée en 2021. Elle a permis l'ouverture d'investigations sur des attaques israéliennes, survenues depuis le 13 juin 2014 dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est. Ajoutées désormais à un dossier sur l'action du Hamas du 7 octobre 2023, ces conclusions ont conduit par le successeur de Bensouda, Karim Khan, à demander la semaine dernière des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et son ministre de la Défense Yoav Gallant. Trois dirigeants du mouvement palestinien sont également demandés, à savoir le leader politique Ismaël Haniyeh, le chef de la branche armée Mohammed Deif et Yahya Sinwar, identifié comme le commanditaire. Dans le contexte des investigations alors en cours, le Mossad aurait enquêté sur les membres de la famille de la procureure. Il aurait aussi mis la main sur des enregistrements secrets de son mari, l'homme d'affaires maroco-gambien Philip Bensouda, dont les parents sont originaires de la ville de Fès. Une deuxième source israélienne a fait savoir à The Guardian que l'objectif aurait été de mettre la juge en danger, ou de la rallier au côté israélien en tant que coopérante. Cibler la procureure générale ou se rallier la CPI The Guardian rappelle d'ailleurs qu'en tant qu'«espion de carrière», Yossi Cohen est bien connu au sein des renseignements israéliens comme «un recruteur efficace d'agents étrangers». Très proche du Premier ministre, il est nommé directeur du Mossad en 2016. En sa qualité de chef du Conseil de sécurité nationale, précédemment, il a «supervisé l'organisme qui, selon plusieurs sources, a commencé à coordonner un effort multi-agences contre la CPI une fois que Bensouda a ouvert l'enquête préliminaire». Une troisième source a déclaré que Cohen était le «messager informel» de Netanyahu. Quatre autre ont confirmé à The Guardian que Fatou Bensouda avait informé des hauts responsables de la CPI des manœuvres de l'ex-responsable, face au caractère persistant et de plus en plus menaçant de ces attitudes. De son côté, un proche du cercle de Yossi a confié que l'homme avait eu recours à des «tactiques méprisables» contre Bensouda, dans une tentative vaine d'intimidation et d'influence. Le successeur de la procureure a d'ailleurs averti être disposé à intenter des poursuites contre toute partie mise en cause dans des «tentatives d'obstruction, d'intimidation ou d'influence inappropriées» des responsables de la CPI. Cités par le média britannique, des experts et d'anciens responsables de la juridiction internationale estiment que les actions du Mossad visant Fatou Bensouda pourraient constituer une atteinte à l'administration de la justice, conformément à l'article 70 du Statut de Rome, qui a donné lieu à la création la Cour pénale internationale.