La Procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI) Fatou Bensouda a annoncé mercredi avoir ouvert une enquête sur des crimes présumés dans les Territoires palestiniens, une initiative rejetée par Israël, mais saluée par les Palestiniens. À Washington, le département d'Etat a affirmé que le gouvernement de Joe Biden «s'oppose fermement» à cette enquête, mais précisé qu'il était en train de «réexaminer» les sanctions prises sous la présidence de Donald Trump contre Fatou Bensouda et d'autres responsables de la juridiction internationale. Avant l'annonce de mercredi, Fatou Bensouda avait déclaré qu'il y avait un «fondement raisonnable» à croire que des crimes avaient été commis par des membres des forces israéliennes, des autorités israéliennes, du Hamas palestinien et d'autres groupes armés palestiniens durant la guerre de Gaza de 2014. En juillet-août 2014, Israël a lancé une offensive de grande envergure pour faire cesser les tirs de roquettes du Hamas en direction de son territoire depuis la bande de Gaza, une enclave sous blocus israélien depuis des années. La guerre a fait quelque 2250 morts côté palestinien, en majorité des civils, et 74 morts, essentiellement des soldats, côté israélien. «Aujourd'hui, je confirme l'ouverture par le Bureau du procureur de la Cour pénale internationale d'une enquête sur la situation en Palestine», a déclaré Fatou Bensouda dans un communiqué. Contrairement à la Palestine, Israël n'est pas membre de la CPI, basée à La Haye, et s'est opposé avec véhémence à toute enquête. La CPI «a pris une décision qui est l'essence même de l'antisémitisme et de l'hypocrisie», a déclaré le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou. «Nous défendrons chaque soldat, chaque officier, chaque civil et je vous promets que nous allons nous battre pour la vérité jusqu'à ce que cette décision scandaleuse soit annulée», a-t-il ajouté. «Impartialité et objectivité Le ministre israélien de la Défense Benny Gantz, qui était chef d'état-major durant la guerre de Gaza en 2014, a écrit sur Twitter : «la décision de la cour est une récompense pour le terrorisme. Les Palestiniens doivent comprendre que le conflit entre nous ne se réglera que par des négociations, aucun tribunal ni même la cour de La Haye ne fera avancer les choses». L'Autorité palestinienne a, elle, salué la décision de la CPI. «Les crimes commis par les dirigeants de l'occupation israélienne contre le peuple palestinien — qui sont en cours, systématiques et généralisés — rendent cette enquête nécessaire et urgente», selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Fatou Bensouda a assuré que l'enquête serait menée «en toute indépendance, impartialité et objectivité, sans crainte ni parti pris». «En définitive, ce sont les victimes tant palestiniennes qu'israéliennes du long cycle de violence et d'insécurité, qui a causé de profondes souffrances et un terrible sentiment», a-t-elle ajouté. En décembre 2019, Fatou Bensouda avait souhaité une enquête complète après une enquête préliminaire de cinq ans, tout en demandant à la CPI de déterminer si sa portée s'étendait aux territoires palestiniens. Sanctions Les juges de la CPI avaient ouvert la voie à une enquête sur des crimes de guerre en statuant le mois dernier que la Cour était compétente pour les faits survenus dans les Territoires palestiniens. Israël a occupé la Cisjordanie et la bande de Gaza lors de la guerre des Six Jours de 1967, puis a annexé principalement Jérusalem-Est. Aujourd'hui, ces territoires abritent au moins cinq millions de Palestiniens, définis par les Nations unies comme vivant sous occupation israélienne. L'armée israélienne continue d'occuper la Cisjordanie. Elle s'est retirée unilatéralement en 2005 de la bande de Gaza, mais impose à l'enclave palestinienne un blocus depuis plus de 10 ans. Ce territoire est dirigé par le Hamas. L'enquête constituera le premier test majeur pour le nouveau Procureur de la CPI, Karim Khan, l'avocat britannique nommé en février pour remplacer Fatouma Bensouda après la fin de son mandat en juin. Fatouma Bensouda fait l'objet de sanctions américaines pour avoir décidé d'enquêter sur les allégations de crimes de guerre américains en Afghanistan.