Après le communiqué de la présidence algérienne accusant le Maroc d'avoir tué trois camionneurs algériens, le voisin de l'Est a initié ce jeudi l'internationalisation du dossier. L'affaire des camions algériens commence à sortir du cadre bilatéral, maroco-algérien. Dans une répartition des rôles entre membres du pouvoir, le président du Conseil constitutionnel, Kamel Feniche, a mis le cap sur l'Afrique. Il a saisi sa participation au 5e Dialogue judiciaire organisé hier dans la capitale tanzanienne, par la Cour africaine des droits de l'Homme et des peuples, pour faire la promotion de la version des autorités de son pays sur cet incident. Dans des déclarations à l'agence de presse APS, Feniche s'est félicité que plusieurs délégations africaines présentes à Dar Es Salaam «ont condamné cet acte criminel». Cette internationalisation du dossier a été également défendue par des commentateurs sur les chaînes TV algériennes. Tous appellent leur gouvernement à porter l'affaire devant l'Union africaine, la Ligue arabe et le Conseil de sécurité. Tirer les leçons de la rupture des relations avec Rabat Le ministre des Affaires étrangères a également participé à cette internationalisation du dossier. Ramtane Lamamra a saisi officiellement le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, ses homologues à la Ligue des Etats arabes, Ahmed Aboul Gheit, et de l'Organisation de la coopération islamique, Youssef Ben Ahmed Al-Othaimeen, ainsi que le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat. Le chef de la diplomatie a expliqué aux dirigeants de ces organisations internationales «la gravité extrême de l'acte de terrorisme d'Etat qu'aucune circonstance ne saurait justifier», rapporte des médias locaux. «L'emploi par l'Etat occupant d'un armement sophistiqué meurtrier pour entraver la libre circulation de véhicules commerciaux dans un espace territorial sur lequel il n'a aucun droit, constitue un acte de fuite en avant porteur de risques imminents pour la sécurité et la stabilité au Sahara Occidental et dans toute la région.» Ramtane Lamamra Dans ses messages, Lamamra a exprimé «la volonté et la capacité de l'Algérie à assumer ses responsabilités en matière de protection de ses ressortissants et de leurs biens en toutes circonstances». Le ministre ne s'est pas contenté de ces missives, il a reçu aussi des ambassadeurs accrédités en Algérie pour leur transmettre le même discours. Pour rappel, le 24 août, le chef de la diplomatie avait égrené un chapelet des «actes belliqueux» du Maroc envers son pays et ensuite annonçait la rupture des relations diplomatiques. L'internationalisation de cette affaire atteste d'un changement majeur dans la politique algérienne à l'égard du Maroc. Il y a trois mois, Alger avait fermé la porte à toute médiation arabe ou européenne dans son conflit avec Rabat. Une tactique qui s'est avérée contre-productive, isolant davantage l'Algérie, notamment dans le périmètre arabe. Les missions confiées aujourd'hui au président du conseil constitutionnel et au chef de la diplomatie montrent que l'Algérie a tiré les leçons de cet échec.