Ce weekend, le Parti du Progrès et du Socialisme, ou PPS, tenait son université annuelle. Cela a été l'occasion de déclarer la très bonne tenue des relations entre le parti et son allié dans la majorité, le PJD. D'ailleurs, l'un des moments forts de cette rencontre a été le discours du chef du gouvernement et du PJD, Abdelilah Benkirane, qui a envoyé des messages et signaux urbi et orbi, comme Nabil Benabdallah, le patron du PPS. Verbatim. Nabil Benabdallah Il a d'abord expliqué que le choix de la date du 7 octobre pour les prochaines législatives s'est fait par défaut, mais de façon consensuelle, tous les partis ayant été préalablement consultés, puis avisés du choix final, sachant que le scrutin devait se tenir avant l'ouverture solennelle du parlement par le chef de l'Etat. Le SG du PPS a indiqué que les élections à venir, donc, doivent faire l'objet d'une préparation commune de la part de tous les partis, sachant que le scrutin communal et régional du 4 septembre, « malgré les déviances enregistrées çà et là et que nous connaissons tous, a été une réussite. L'Etat et le gouvernement (sic) ont assumé leurs responsabilités ». Y a-t-il donc une différence entre Etat et gouvernement ? Un propos, ou un lapsus, intéressant de la part d'un ministre en exercice. Nabil Benabdallah indique également que « les élections législatives ne doivent pas nous distraire de ce qui reste à réaliser en termes de réformes car le gouvernement a encore une durée de vie de 7/8 mois »… mais interrompu, vraisemblablement par Benkirane, il a ajouté « dans sa configuration actuelle », ce qui pourrait indiquer l'éventualité d'une sortie de la majorité de certains partis, comme le MP, et surtout le RNI. Sur les 24 lois organiques prévues dans la constitution, 19 ont été adoptées ou sont en voie de l'être, et il en reste donc 5, dont celle sur l'amazighité. Nabil Benabdallah s'est trompé en affirmant que la constitution impose que ces lois organiques soient adoptées, sans préciser quand… en effet, l'article 86 de la constitution dispose que « les lois organiques (…) doivent avoir été soumises pour approbation au Parlement dans un délai n'excédant pas la durée de la première législature suivant la promulgation de ladite Constitution ». Pas adoptées, mais soumises… Suit une longue diatribe sur la réforme des retraites, inévitable, qui doit être adoptée. L'orateur a beaucoup insisté sur l'accompagnement de cette réforme par une extension de la couverture médicale. C'est le point de fierté du gouvernement, mais la question est politique, et peut-être aussi un peu électoraliste. Enfin, le communiste (ex ?) qu'est Benabdallah insiste sur le rôle important du service public, dans l'investissement, dans la garantie des services sociaux, dans la direction des secteurs stratégiques, mais dans le cadre d'un partenariat public/privé. Abdelilah Benkirane Le chef du gouvernement, et du PJD, attaque d'emblée en affirmant que « si les choses étaient liées aux idéologies et aux référentiels, ma présence ici aujourd'hui et les rapprochements intervenus entre nous seraient surréalistes »… puis il passe aux louanges des gens du PPS, qui sont courtois, qui respectent les intelligences des autres, qui savent aller dans la juste voie… Benkirane revient sur la position du PPS et du PJD lors des manifestations du 20 février, et s'est félicité des décisions de ne pas céder « au vacarme et à la démagogie, et Dieu a fait le reste ». Puis, à la formation du gouvernement, on s'est dit « comment se peut-il que les anciens communistes et les anciens islamistes puissent cohabiter ?... on est tous anciens de quelque chose… Nous, on a marocanisé le printemps arabe, comme tant de choses d'ailleurs ». Et l'inévitable pique adressée aux « autres »… « L'indépendance politique est cruciale pour un homme politique, car s'il la perd, il perd sa confiance en lui-même et alors, comment voulez-vous que les autres le croient, s'il ne croit pas en lui-même ? ». Et d'expliquer son propos : « Il fut un temps où l'hégémonisme sur la vie politique était compréhensible car il existait des gens qui voulaient disputer son pouvoir au palais, et il y en avait d'autres qui ne voulaient même pas de la monarchie. Aujourd'hui, tout cela est derrière nous. La monarchie, on n'en discute plus, les choses sont claires. Alors pourquoi l'hégémonisme aujourd'hui ? Sachez qu'en période de difficultés, ces gens-là prendront l'avion et fuiront et il ne restera que ceux qui étaient là dès le départ ». Puis il rappelle les discussions sur la constitution : « Nous avions dit au palais que le terme sacré nous indispose, et nous avons vite reçu la réponse du roi, disant, la sacralité est pour Dieu, l'infaillibilité pour les prophètes et moi, je suis un roi citoyen. Avant, je disais au roi Sidi Mohammed, ou Sidna, ou Votre Majesté, mais aujourd'hui, je ne lui dis plus que Sidna, peut-être que c'est parce que je suis dans dar el Makhzen »… Rires dans la salle. Et, conclusion, en forme de pique qu'on attendait… « Le Maroc a besoin d'hommes véritables, pas ceux qui ont embarqué, qui ont tracté… ». L'allusion au Tracteur du PAM est plus que claire. Cela rappelle quelque part la chanson de Jaques Brel, Orly… « La pluie les a soudés semble-t-il l'un à l'autre, Ils sont plus de deux mille et je ne vois qu'eux deux. Et je les sais qui parlent, il doit lui dire: je t'aime, elle doit lui dire: je t'aime. Je crois qu'ils sont en train de ne rien se promettre. C'est deux-là sont trop maigres pour être malhonnêtes »… Voire… L'alliance entre PJD et PAM est évidente pour les prochaines élections et, comme l'a rappelé Benabdallah, « il est possible que le prochain gouvernement soit reconduit ».