La pauvreté s'aggrave dans les régions de « Draâ-Tafilalet » et « Béni Mellal-Khénifra » Ahmed Lahlimi Alami, Haut- Commissaire au Plan, a dévoilé, lors d'une conférence de presse mercredi à Rabat, les principaux résultats de son enquête nationale sur la consommation et les dépenses des ménages au Maroc, réalisée sur l'ensemble du territoire national auprès d'un échantillon de 16 000 ménages, entre juillet 2013 et juin 2014. « En comparaison avec ceux des enquêtes similaires de 2001 et 2007, ces résultats permettent de jeter un éclairage circonstancié de l'évolution, dans notre pays, du niveau de vie, du modèle de consommation ainsi que des phénomènes de la pauvreté, de la vulnérabilité et des inégalités sociales, à l'échelle nationale et au niveau des différentes unités territoriales », soulignait M. Lahlimi. Le premier résultat ainsi divulgué par M. Lahlimi est que le revenu moyen annuel par tête d'habitant est passé, entre 2001 et 2014, d'environ 11000 DH à 19000 DH, marquant une croissance moyenne de 5% par an. Compte tenu du faible taux d'inflation, le pouvoir d'achat a ainsi connu une progression annuelle moyenne de 3,4% au cours de la période. Idem pour le niveau de vie puisqu'ila presque doublé, passant de près de 8300 DH par an en 2001 à environ 15900 DH en 2014 légèrement supérieur à la dépense de consommation finale des ménages par tête. Il a ainsi progressé, en termes réels, à un taux moyen annuel de 3,5%, au cours de cette période, passant de 3,3%, entre 2001 et 2007 à 3,6% entre 2007 et 2014. Ces rythmes d'accroissement ont été respectivement de 2,7% et 3,5% en milieu urbain et de 4,7% et 2,8% en milieu rural. Amélioration de la qualité alimentaire chez les Marocains L'enquête du HCP montre aussi que la part des dépenses de consommation alimentaire dans le budget des ménages est passée, sur la période 2001-2014, de 41% à 37%, à l'échelle nationale. Elle a continué à en représenter 47,3% en milieu rural et 33,3% en milieu urbain, variant de 50% dans la catégorie des 10% les plus défavorisés à 26% parmi les 10% les plus aisés. En termes de qualité, les produits riches en calories (céréales, sucres et produits sucrés) reculent au profit des produits riches en protéines (viandes, poissons, œufs, produits laitiers). La part de ces derniers dans les dépenses alimentaires est passée de 33% à 36%. M. Lahlimi a fait savoir, par ailleurs, que le poids de l'ensemble des dépenses au titre de « l'enseignement, de la culture et des loisirs », plus « les transports », « l'hygiène et les soins médicaux » par exemple, est passé, dans le budget global des ménages, de 16,7% à 21,4%. Avec cependant des disparités sociales et territoriales notables. Dans les budgets des ménages ruraux et urbains, « L'enseignement, la culture et les loisirs » représentent respectivement 2,8% et 6,6%, « l'habitat et l'énergie » 19,8% et 24,2%, « l'hygiène et les soins médicaux » 7,5% et 9,2% Par ailleurs, les 10% des ménages en haut de la hiérarchie des niveaux de vie et les 10% en bas de cette hiérarchie consacrent, respectivement, 3,5% et 0,4% aux loisirs, 5,3% et 2,7% à l'enseignement, 2,7% et 1,3% à la communication et 11% et 2,9% aux transports. Plus illustratives, la valeur des dépenses réalisées par la 1ère catégorie sociale pour l'enseignement est de 24 fois supérieure à celle de la seconde, pour les loisirs 105 fois, pour les communications 24 fois et pour les transports 44 fois. Lors de cette conférence, M. Lahlimi a affirmé, par ailleurs, que le niveau de vie par habitant mesuré en dirham constant a connu, au cours de chacune des périodes 2001-2014 et en particulier celle 2007-2014, des améliorations annuelles significatives respectivement de 3.8% et 4% pour les 20% des ménages les plus défavorisés ; de 3.3% et 3,3% pour les 20% des ménages les plus favorisés ; et de 3.6% et 3,9% pour la catégorie sociale intermédiaire. Dans ce cadre, toujours selon M. Lahlimi, le taux de pauvreté monétaire, a été réduit de près de 2/3 entre 2001 et 2014, passant de 15,3% à 4,8% à l'échelle nationale. Avec 1,6% il est, en milieu urbain, sans signification statistique mais reste important en milieu rural malgré une forte baisse passant de 25% à 9,5%. De son côté, la vulnérabilité à la pauvreté, même si elle s'avère faible en milieu urbain avec une incidence de 7,9%, reste un phénomène surtout rural où elle se maintient à 19,4% en 2014 après avoir été de 30% en 2001. Au plan territorial, M. Lahlimi a indiqué que l'écart de niveau de vie entre les deux milieux de résidence urbain et rural qui était de 2 en 2001 a baissé à 1,8 environ en 2007. Par ailleurs, les écarts géographiques du niveau de vie font apparaitre deux catégories de régions. Celle où la dépense annuelle de consommation par tête d'habitant est supérieure à la moyenne nationale. Six régions sont en question. Il s'agit des régions de « Eddakhla Oued Eddahab » avec 28627 DH, « Casablanca-Settat » avec 19006 DH, «Lâayoune-Sakia-El Hamra» avec 17729DH, « Rabat-Salé-Kénitra » avec 17 717DH, «Tanger-Tétouan-El Hoceima » avec 17082 DH et la région de l'«Oriental » avec 15 972 DH. La seconde catégorie de régions est celle où la dépense annuelle par tête d'habitant est inférieure à la moyenne nationale. Il s'agit, en particulier, des régions de « Draa-Tafilat » et « Béni Mellal-Khénifra » avec respectivement 11 923 DH et 11 745 DH où elle est la plus faible. Les disparités sociales et territoriales restent à réduire En dépit de l'évolution des structures et de la qualité de la consommation des Marocains durant la période en question, le Haut-Commissaire au Plan a estimé que des disparités sociales et territoriales restent à réduire. Il a affirmé, en outre, que les tendances à la baisse que connaissent les phénomènes de la pauvreté et des inégalités ont vocation à apporter une contribution de plus en plus robuste à la soutenabilité de la croissance économique avec un contenu pro-pauvre à consolider.A cet égard, poursuit-il, l'amélioration générale des niveaux de vie et en particulier celle des catégories sociales modestes et intermédiaires montre que la croissance au Maroc entre 2001 et 2014, a pris l'itinéraire d'une croissance inclusive. « Il faut cependant éviter que des indicateurs économiques aussi réels et crédibles n'occultent la réalité éminemment humaine de la pauvreté qui reste un phénomène toujours de trop. En 2014, 1,6 millions de marocains étaient encore en situation de pauvreté absolue et 4,2 millions en situation de vulnérabilité. Avec un poids démographique de 40%, le milieu rural regroupe 79,4% des pauvres et 64% des vulnérables. C'est dire que la croissance pro-pauvres devrait avoir vocation à devenir une croissance pro-ruraux dans notre pays », s'inquiétait M. Lahlimi.