Le poète et écrivain marocain de renom Azzeddine Idrissi vient de publier en arabe son nouveau recueil de poèmes « Ain Damea » ( la source des larmes), dédié aux passionnés des dictes illuminés: véritable aventure textuelle qui examine l'existence humaine dans ce qu'elle a de plus implicite , en l'occurrence le silence et la beauté. Paru en 2015 après la publication de 16 recueils, cet ouvrage, décliné en plus de 200 pages, se propose de revenir sur des questions de l'être, son existentialisme et son essence, et ce à partir d'un jeu impressionnant qui vacille entre la réalité et l'imaginaire. Il contribue à l'enrichissement de la bibliothèque des poèmes aux souffles mystiques, en assimilant le verbe à une touche symbolique qui nécessite beaucoup de réflexion afin de cerner ses contours et son fond. Fruit d'une grande expérience à la fois créative et juridique et d'une passion renouvelée, le recueil «la source des larmes» comporte plus de 200 textes poétiques significatifs constituant la trame textuelle et la synthèse de la vie de cet écrivain talentueux. La couverture de cette nouvelle production littéraire est illustrée par un tableau merveilleux de l'artiste plasticien Jilali Gharbaoui ( 1930- 1971), considéré comme le premier peintre marocain à avoir choisi le mode d'expression picturale lyrique : « De retour au Maroc, Jilali Gharbaoui a senti le besoin de sortir de nos traditions géométriques, en donnant un mouvement à la toile, un sens rythmique, et, le plus important, de la lumière. La quête de cette lumière était pour lui capitale. (...) Nulle allusion formelle, nulle anecdote, ne viennent gêner cette quête. La couleur, la matière et un trait gestuel sans repentir suffisent pour évoquer tour à tour les jardins du Chellah et les sources fougueuses de l'Atlas »,écrivait Mohamed Sijelmassi. Le recueil d'Azzeddine Idrissi nous fait penser au livre intitulé « La source des larmes » de l'écrivain canadien jean Vanier dont voici la note d'intention : « Où se trouve la source des larmes ? D'où naissent-elles sinon du plus profond du secret de notre être ? C'est vers cette source et vers ce secret que jean Vanier, au rythme des six jours d'une retraite, veut nous entraîner, en nous proposant de suivre un chemin vers nous-mêmes. Un chemin de vérité, de consolation et d'espérance. Un chemin qui nous fera rencontrer aussi les autres et les rejoindre en vérité, et parmi eux les plus pauvres dont il nous dit, dans la droite ligne de l'Évangile, qu'ils nous éveillent et nous guérissent, qu'ils nous précèdent et nous conduisent sur la voie de la vie. ». Poète illuminé, Azzeddine Idrissi a pu creuser peu à peu son propre sillon dans le paysage littéraire arabe souvent dur d'accès. Dans cette anthologie métaphorique, il a étalé d'une manière savante et mystique ses propres conceptions et ses propres visions humanistes, en insistant sur la connotation et le fondement éthique du dialogue et du partage. Particulièrement hypersensible, il gère l'univers de l'écriture avec audace et passion, en évoquant plusieurs concepts et thèmes, à savoir la vérité divine, le cri du cœur, la voix du prophète, la mort, la danse des ombres, dialogue des amants entres autres. L'acte poétique d'Azzeddine Idrissi est marqué par le dialogisme, la richesse symbolique et l'ouverture sur l'autre au pluriel. Sa démarche littéraire est inépuisable car elle est en relation directe avec la variété des domaines de l'activité humaine comme disait Baudelaire. Pour définir le caractère général de l'énoncé, il y a nécessité de prendre en considération la différence essentielle qui existe entre le genre de discours premier et le genre de discours second. La sphère d'échange est ici d'une grande importance. Notre poète se positionne, tour à tour, comme esthète et écrivain, réunissant ainsi le raisonnement et l'imagination littéraire : c'est l'un des seuils incontournables dans la compréhension de l'esprit des poèmes. Il s'agit d'un pacte intimiste fondé principalement sur la question de l'être en tant que conscience responsable de sa réalité et de son destin. En effet, Idrissi interroge la condition d'être et de paraître à partir de la mise en scène de la conscientisation comme moteur de la vie. Ainsi, l'écriture poétique de cet écrivain émérite nous parle de notre réalité pleine et entière, elle renvoie à notre « moi » inscrit dans le monde. Rilke disait « l'écriture est le lieu d'une expérience», c'est finalement l'expérience de notre propre rapport au monde. Ici, le récit est une façon d'être au monde, de le questionner, de s'interroger sur les choses existentielles. Reste à souligner qu'Idrissi, juriste et homme de Lettres et Sciences Humaines, conçoit la poésie comme une façon de traverser le monde, l'esprit ouvert, curieux. Lieu de forte implication où l'être se révèle, l'acte d'écriture s'interroge sur la complexité de la vie.