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« Le printemps des feuilles qui tombent » d'Abdelhak Najib : Feuilles de « Printemps arabes »
Publié dans L'opinion le 31 - 05 - 2016

Ce très court roman d'Abdelhak Najib évoque, par son titre même, l'ambiguïté qui a caractérisé pour les témoins marocains le sens même du mouvement du 20 mars. Il ne s'agit pas véritablement d'analyser, sinon sur des cas particuliers qui sont les identités des personnages du roman, les causes globales ou particulières à la société marocaine de ce qui a constitué le mouvement dit du 20 février. Il s'agit d'une forme de contestation sociale qui est née en 2011 après la crise tunisienne qui a commencé en décembre de l'année précédente et les premiers effets perceptibles en Égypte. Cette vague de protestations a été appelée par les journalistes « printemps arabes ». Dans chaque pays arabe touché par ce mouvement, dans l'ordre, Tunisie, Égypte, Yémen, Libye et Syrie, les évolutions ont été différentes. Il y a des pays dans lesquels les pouvoirs antérieurement en place ont été remplacés par de nouveaux pouvoirs qui eux-mêmes ont évolué de manières extrêmement différentes. Au Maroc, on a constaté un jeu à somme nulle puisque le mouvement du 20 février a réussi à élargir l'espace public et à libérer des paroles antérieurement tues ou bien, indirectement, à faire qu'une révision constitutionnelle soit adoptée le 1er juillet 2011, ce qui a précédé les élections législatives du 25 novembre de la même année gagnées par le PJD avec 107 sièges sur 395 au Parlement, ce qui donna le pouvoir à l'actuel gouvernement Benkirane le 29 novembre 2011.
D'un autre côté, la réaction fut, dans un premier temps, du mois de février jusqu'au mois d'avril 2011, de tolérer les manifestations, même s'il y eutquelques incidents isolés comme à Al-Hoceïma ou à Sefrou en février, à Safi en mai, également ce même mois aux Aït Bouayach, et à nouveau en octobre à Safi. Il y eut donc en tout entre huit et neuf morts. Mais la situation changea au mois de mai puisque les manifestations furent interdites les 15,22 et 29 mai, ce qui donna lieu à des scènes très violentes. Le 5 juin, on observa un changement d'attitude et les manifestations purent à nouveau se dérouler dans le calme avec toutefois l'apparition de contre-manifestants, ce qui était un fait nouveau, mais, entre-temps, après le discours du roi du 9 mars, il avait été décidé de modifier la constitution par voie de référendum afin de donner plus de pouvoir au parlement, de développer la régionalisation et de mettre en avant le respect des droits de l'Homme, ce qui était des demandes récurrentes au cours des années précédentes. Ce référendum fut une large victoire pour le régime monarchique le 1er juillet, ce qui délégitimait le mouvement contestataire. Celui-ci, très affaibli et ayant beaucoup de ses dirigeants déstabilisés, continua néanmoins de manière intermittente à exister. Le nouveau gouvernement continuera à réprimer parfois de façon violente comme à Taza en 2012, les manifestants.
Mais ce qui joua particulièrement, ce fut une croissance économique bénéficiant des capitaux venus du Proche-Orient, ce qui développa à la fois la consommation et les écarts entre groupes sociaux. Par exemple, s'il y avait 5 000 voitures neuves immatriculées par an en 2000, il y en avait 130 000 en 2012. Le plan Émergence de 2004 eut aussi progressivement ses effets pour un pays qui a choisi de devenir une zone de sous-traitance des industries délocalisées d'Europe même si le niveau de pauvreté, des disparités sociales, de l'illettrisme et de l'inemploi s'est légèrement élevé à partir de l'année 2010. Mais depuis, le Maroc a cherché de nouveaux marchés du côté de l'Afrique subsaharienne qui pourraient représenter des relais de croissance dans l'avenir.
Les principales revendications des militants du 20 février du mouvement social et politique qui fut le premier de cette nature depuis l'intronisation du nouveau monarque, alliant pour la première fois à la fois des militants d'associations, la gauche radicale et des islamistes du mouvement Al AdlWalIhsane, étaient de mettre fin aux abus de pouvoir, à l'affairisme ou à la corruption et d'obtenir plus d'écoute de groupes habituellement silencieux.Une question essentielle, celle du manque de liberté économique, fut totalement passée sous silence. La diffusion des mots d'ordre de ce nouveau mouvement passa ordinairement par Internet, ce qui en faisait un mouvement différent des formes de protestations qui avaient eu lieu sous le règne du roi Hassan II.
Comme il n'y eut pas, à la différence de la Tunisie ou de l'Égypte, également du Yémen ou de la Libye, le changement du pouvoir politique, on a parlé assez rapidement, non plus de « printemps », mais « d'automne », voire dans de nombreux articles journalistiques « d'hiver ». Et c'est ce qui explique la seconde partie du titre évoquant les « feuilles qui tombent », allusion explicite à l'automne. Tout récemment, le 18 avril, à la Bibliothèque nationale de Rabat, il y eut la présentation d'un livre de Jawad Kerdoudi, président de l'institut marocain des relations internationales, intitulé : « printemps ou automne arabe ? ». Ce livre a donné lieu à une discussion intéressante présentée par M. Abdelhafid Oualalou, le vice-président de l›IMRI et président de la section de Rabat. Mais tout cela n›interroge que la question du sens que les historiens du futur pourront donner à ce mouvement du 20 février. Dans toutes ces discussions portant sur le sens, on évite d'aborder les questions, bien plus importantes, qui sont celles des causes de tels mouvements sociaux. Celles-ci peuvent être générales et d›ailleurs, elles pourraient dépasser de loin le cadre géopolitique du monde arabe. Elles peuvent aussi se rapporter à cet espace particulier, tout comme elles peuvent avoir des particularités liées à chacun des pays où de tels mouvements sont apparus et où ils ont eu des évolutions différentes, comme en Algérie par exemple, à moins de supposer que le printemps arabe algérien ait eu 20 ans d›avance, ce qui a été proposé par certains observateurs.
Il y a une tout autre manière de procéder. C'est de travailler, non pas comme le sociologue ou le spécialiste de sciences politiques, sur des ensembles à partir de facteurs généraux, économiques ou sociaux, mais de commencer une recherche sur des individus comme peut le faire un psychiatre, un psychologue ou un policier traitant de fiches individuelles. C'est là une autre attitude qui consiste à chercher les traits communs entre des personnalités qui vont se radicaliser ou qui l'ont été, qui ont donc choisi un engagement politique qui peut être plus ou moins violent puisque, dans certains cas, il peut mener à l'assassinat ou au suicide, voire aux deux simultanément. De nombreuses thèses, surtout américaines, israéliennes, en langues arabe ou européennes ont entrepris des démarches à partir de quelques dizaines, voire quelques centaines de dossiers de personnes qui se sont politiquement engagées dans des opérations de contestation. Mais ces études n'ont porté, de fait, que sur des militants islamistes, les autres acteurs des mouvements en cours, n'étant jamais étudiés. En France, l'actuel conflit entre Olivier Roy et Gilles Kepel porte sur la compréhension chez les militants islamistes de tels changements identitaires qui amènent une personne à s'engager dans la voie de la violence. Est-ce que cette personne, s'il s'agit de celles qui s'engagent dans les conflits du Proche-Orient plus particulièrement, agit ainsi parce qu'elle est initialement influencée par des doctrines salafistes ou par les symboles jihadistes des Frères musulmans. Est-ce là la cause du faitqu'elle se radicalise ou est-ce parce qu'elle est antérieurement déjà révoltée par ses propres conditions de vie et donc radicalisée, qu'elle rejoint une interprétation de l'islam qui lui permettra de donner du sens à sa violence, voire de réussir son suicide. Boris Cyrulnik vient aussi de réfléchir sur le même sujet en ce mois d'avril 2016.
Ce n'est pas du tout la voie qui a été choisie par AbdelhakNajib qui s'intéresse, ce qui est nouveau à des personnalités qui n'ont pas fait le choix de l'islamisme. Toutefois, il écrit ici non pas en tant que journaliste, mais comme romancier. Celui-ci s'est, en effet, emparé d'un outil culturel, le roman pour poser tout autrement la question du sens d'un mouvement social, qui, en réalité, n'est jamais cité, celui du 20 février. Car ce mouvement n'est ici qu'une toile de fond. Qu'est-ce qu'un roman ? C'est une forme littéraire qui est fondée, non pas sur la réalité, mais sur une fiction. Un narrateur met en scène des personnages qui sont construits selon une opposition de valeurs, qu'elle soit interne, à l'intérieur d'un même personnage qui ne sait plus comment agir en raison du conflit qu'il vit, ou il s'agit d'une opposition externe, les valeurs étant portées ou incarnées par des personnages différents. Et si ces personnages ne savent pas résoudre ces conflits, en général dans les dernières pages du roman, ceux-ci, parce qu'ils incarnent la contradiction, meurent. D'une certaine manière, le romancier se débarrasse d'une question que tout le monde se pose, au moins par le vide. Il ne dit que très discrètement ce qu'il conviendrait en fin de compte de choisir.
Le cadre du roman « le printemps des feuilles qui tombent » est la ville de Casablanca, plus précisément la médina, le reste de la ville n'apparaissant que très peu. On pourrait penser que la description qui est faite de ce cadre spatial est la métaphore externalisée de ce que ressentent intérieurement les personnages mis en scène. Plus précisément, il y a une série de métaphores qui décrivent Casablanca comme s'il s'agissait d'un espace délétère, en agonie, d'un « vieux rafiot » d'un « monstre sans véritable visage », une « vieille pute avachie, lourde et hypocrite », un « champ de bataille en ruine (où) les armées qui s'y entre-tuent sont de pacotille », une ville où les hommes sont des « vampires qui quittent régulièrement leurs cercueils ». Bref, On a là tout ce qu'il ne faudrait pas mettre sur un tract touristique. À Casablanca, tout y est faux même les prières que les hommes adressent à Dieu. On observe dès les premières pages que cette vision apocalyptique de l'ancien cœur de la cité n'est pas présentée comme étant une vision des personnages qui vont apparaître, mais elle est prise à son compte par le narrateur, même si celui-ci exprime ailleurs des sentiments plus ambivalents lorsqu'il dira qu'il aime et hait à la fois cette ville. On est ainsi d'emblée dans la fiction, car tous ceux qui connaissent bien la médina de Casablanca et qui y ont des amis vont avoir autant de mal à identifier ce lieu que les lecteurs de Camus autrefois lorsqu'ils lisaient dans ses romans que la ville d'Oran était une préfecture française comme les autres. Autre exemple d'affirmation totalement fictionnelle


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