Dans le cadre de ses activités artistique, l'Association « Bassamat des Beaux Arts» a organisé dernièrement sous le signe « Contemplations » une exposition collective des arts plastiques à la Galerie Le Chevalet de Casablanca. Cette exposition collective a bien illustré le chemin parcouru par huit plasticiens ( Feu Khlafa El Badaoui , Rakia Bayla , Ahmed Bouidi ,Carmen Dinca, Mohamed Karim El Afia, Abdellah Fninou,Najat Moufid et Rachid Zizi ) en matière d'art et de culture plastique, tout en relevant les défis de la qualité et de la rigueur. Figure représentative de la nouvelle sensibilité, Ahmed Bouidi (vit et travaille à Casablanca) est catalogué parmi les artistes plasticiens capables de se renouveler constamment, se remettant en question, tout en gardant l'aisance pour sortir d'une expérience et entamer une nouvelle sans se laisser empêtrer sous le poids du « code normatif de la toile ». Auteur de peinture allégorique, Bouidi est un peintre oniriste et hypersensible qui fait du geste pictural et organise sa toile selon les codes de la nouvelle abstraction en détournant et s'appropriant de véritables « matières ». Cette « poésie de la résistance » s'organise plastiquement à l'aide du vocabulaire formel issu du matériau lui -même. La démarche plastique de ce lauréat de l'Ecole des Beaux Arts de Casablanca se retrouve de manière identique à travers les dimensions que proposent les matiéristes. Déjà les travaux sont installés dans la lignée du langage synthétique. Ils quittent l'espace plan de la toile pour devenir des reliefs à part entière. L'espace limité de la toile exige un renouvellement radical ; le champ pictural va quitter la surface traditionnelle du tableau pour investir l'espace et exploiter d'autres gammes de couleurs et d'autre formes allusives (fragments, corps, chaises, instruments de musiques...). Bouidi nous propose une appropriation de la matière avec une démarche investigatrice et des résultats souvent voisins des possibilités formelles du langage plastique. Equivalent plastique du trait et de la forme, sa peinture composite joue le rôle de trace et permet une reconsidération du lieu et du temps avec une lecture esthétique : la volonté poétique rejoint la perception visuelle qui place le spectateur devant un expressionnisme régit par le graphisme acerbe des éclairs. La matière opaque de Bouidi offre un nouveau support qui permet toutes les recherches expérimentales, mais le refus de la couleur « unique » engendre aussi son incorporation à l'intérieur d'autres éléments plastiques. Il s'agit d'un vocabulaire plastique qui traduit fidèlement les prélèvements effectués au cours de ses longues marches et incite à la méditation sur les pérégrinations pédestres. A travers une démarche néo plastique, l'utilisation de la matière comme substrat de la toile prend forme dans les œuvres de l'artiste Bouidi pour réagir contre la culture de « classe », et ce en gardant l'esthétisme et le bon goût. C'est un acte créatif qui met en relief la charge émotive des êtres et des choses, tout en conservant une composition très structurées, régie par les éléments naturels ou retravaillés qui se transforment en graphismes et traces de la matière.