L'UMP, déstabilisée par le scandale de l'affaire Bygmalion, tentait de panser ses blessures hier mardi, lors d'un bureau politique à haut risque qui doit fixer la date du prochain congrès et désigner une direction intérimaire. En apparence, les choses sont assez simples: mettre en place une direction par intérim, le président du parti Jean-François Copé ayant été poussé à la démission le 27 mai. Dans la foulée, toute la direction avait démissionné et un triumvirat (les trois anciens Premiers ministres Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin et François Fillon) avait été formé pour pallier la vacance de pouvoir. Mais derrière les divergences politico-juridiques entre sarkozystes, copéistes, fillonistes, juppéistes ou non-alignés à propos de la prochaine direction du mouvement, se profile le véritable enjeu de la bataille: le nom du candidat UMP à la présidentielle de 2017. Le sujet est particulièrement sensible dans un parti meurtri en 2012 par deux défaites (présidentielle et législatives) et la guerre Copé/Fillon, puis dépassé par le Front national aux européennes. Le parti, fondé en 2002, affronte en plus la tempête Bygmalion et une crise financière sans précédent le plaçant en quasi-faillite. Mardi, les quelque 50 membres du BP, sorte de gouvernement élargi du parti, se réuniront à partir de 18h00 au siège de l'UMP, rue de Vaugirard (Paris XVe). Exceptionnellement, Edouard Balladur, membre de droit au titre d'ancien Premier ministre, sera présent, pour apporter sa «caution morale», selon son entourage. La présidente de la Haute autorité, Anne Levade, viendra «apporter un éclairage juridique au début de la réunion», selon les proches de Juppé et Fillon. Plusieurs décisions doivent être prises: qui pour assurer l'intérim d'ici au congrès et l'élection d'un nouveau président? Quand aura lieu ce congrès (tout le monde semble d'accord pour le fixer à l'automne)? Un candidat à la présidence de l'UMP peut-il également l'être à la primaire? Les deux dernières questions pourraient être renvoyées à un BP ultérieur, en juillet, pour laisser le temps aux candidats de se déclarer. Casus belli Seul Hervé Mariton a déjà déclaré sa candidature à la présidence du parti. L'ex-ministre Bruno Le Maire pourrait l'imiter. Xavier Bertrand, seul candidat déclaré à la primaire de 2016 avec François Fillon, pousse la candidature de François Baroin, lequel n'a pas encore fait connaître sa position. Interrogée mercredi par Le Parisien, Nathalie Kosciusko-Morizet estime, elle, que «la multiplication des candidatures individuelles n'est pas forcément la solution», mais souhaite «des actes symboliques forts» comme la vente du siège du parti et même «le changement de nom de l'UMP.» Fort de sa popularité dans les sondages, Alain Juppé demande qu'un aspirant chef de l'UMP ne puisse être candidat à la candidature présidentielle, thèse partagée par les fillonistes, mais contestée par les copéistes et sarkozystes. Selon Brice Hortefeux, président de l'association Les amis de Nicolas Sarkozy, qui ne s'exprime pas sans l'aval de l'ancien président, le retour de celui-ci, via la présidence de l'UMP, est, au vu des circonstances, «une nécessité» et la primaire devient «inutile» pour désigner le candidat de 2017, «lorsqu'un choix s'impose naturellement». En attendant, ces camps antagonistes vont devoir s'entendre sur l'intérim à la tête du parti d'ici l'automne. Les statuts du parti stipulent qu'en cas de démission du président, le vice-président délégué, en l'occurrence Luc Chatel, assure sa présidence par intérim, jusqu'à l'élection du nouveau patron. C'est la position défendue par les amis de M. Sarkozy (et de Copé). Le triumvirat, qui serait également validé par le BP, assisterait M. Chatel. Cette solution offre l'avantage aux yeux des sarkozystes de laisser le temps à leur champion de s'organiser pour prendre les rênes du parti, le transformer, peut-être même de lui donner un nouveau nom et de changer ses statuts, selon certains proches. Il imposerait ainsi comme «naturelle» son éventuelle candidature en 2017. Mais fillonistes et juppéistes en font un casus belli: «c'est le triumvirat qui assure l'intérim et lui seul. A charge pour lui de nommer un ou des secrétaires généraux - pourquoi pas Luc Chatel - pour assurer l'intendance, mais sous l'égide du triumvirat qui est souverain», insiste-t-on côté Fillon. «S'il n'y a pas d'accord là-dessus, tout va voler en éclats», prévient-on.