Le président Mahmoud Abbas a promis samedi que le futur gouvernement d'union nationale palestinien composé de personnalités indépendantes, en accord avec le Hamas, rejetterait la violence, afin de rassurer la communauté internationale sur sa volonté de paix avec Israël. Mais Israël a estimé qu'en entérinant un accord de réconciliation avec le mouvement islamiste au pouvoir à Gaza, M. Abbas a donné «le coup de grâce» au processus de paix. «Le prochain gouvernement obéira à ma politique», a dit Mahmoud Abbas aux membres du Conseil central palestinien (CCP), une instance dirigeante de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), qu'il préside, réunis à Ramallah jusqu'à dimanche. «Je reconnais l'Etat Israël, je rejette la violence et le terrorisme et je respecte les engagements internationaux», a-t-il assuré dans un discours de plus d'une heure, plus pédagogique que polémique. Il se référait ainsi aux exigences du Quartette pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU) pour ouvrir le dialogue avec le Hamas: la reconnaissance d'Israël et des accords signés avec lui, et la renonciation à la lutte armée. Aux termes d'un nouvel accord de réconciliation conclu mercredi, l'OLP et le mouvement islamiste sont convenus de former un gouvernement de «consensus national» que dirigera M. Abbas et qui sera composé de personnalités indépendantes. Ce dernier épisode de l'interminable feuilleton de la réconciliation nationale palestinienne, lancé il y a trois ans par une série d'accords restés pour l'essentiel lettre morte, a provoqué la fureur d'Israël qui considère le Hamas comme un «groupe terroriste». En représailles, le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu a suspendu les pourparlers de paix relancés en juillet 2013 sous l'égide de Washington, déjà fort mal engagés, qui étaient censés aboutir à un accord de principe d'ici le 29 avril. Le Hamas est opposé à ces négociations «futiles» et prône la «résistance armée» contre Israël. M. Abbas a souligné, dans son discours, que, comme depuis le début du processus de paix il y a plus de 20 ans, les négociations avec Israël seraient menées non par le nouveau gouvernement, mais par l'OLP qui «représente l'ensemble du peuple palestinien». A ce sujet, il a réaffirmé son opposition à l'exigence par M. Netanyahu d'une reconnaissance d'Israël par les Palestiniens comme «Etat du peuple juif», rappelant qu'ils reconnaissaient déjà l'Etat d'Israël depuis 1993. «Nous n'accepterons jamais de reconnaître un Etat juif», a-t-il dit. Menace de dissoudre l'Autorité «Le (nouveau) gouvernement, lui, sera en charge de ce qui se passe à l'intérieur des Territoires palestiniens», a dit M. Abbas. L'OLP est reconnue internationalement comme «l'unique représentant du peuple palestinien» et, à ce titre, seule habilitée à négocier en son nom. Le Hamas a qualifié son discours de «positif» saluant notamment la «non-reconnaissance de l'Etat juif». Le président palestinien a aussi répété qu'il était disposé à prolonger les pourparlers avec Israël au-delà de l'échéance du 29 avril mais à condition que le gouvernement Netanyahu libère des prisonniers, gèle la colonisation et accepte de discuter de la délimitation des frontières du futur Etat palestinien. «Abou Mazen (le surnom de Mahmoud Abbas) a recyclé les mêmes conditions tout en sachant déjà qu'Israël ne les accepterait pas», a réagi Israël dans un bref communiqué. «Aujourd'hui, il a administré le coup de grâce au processus de paix», a-t-il ajouté. Israéliens et Palestiniens ont multiplié les gestes d'hostilité depuis qu'Israël a refusé de relâcher comme prévu le 29 mars un dernier contingent de prisonniers, en réclamant une prolongation des négociations de paix jusqu'à la fin de l'année. En réponse, M. Abbas a décidé d'adhérer à 15 agences et traités internationaux. Le président palestinien a averti qu'en vertu du statut d'Etat observateur obtenu par la Palestine le 29 novembre 2012 à l'ONU, il avait le droit de demander l'adhésion à quelque 63 organisations et conventions internationales. Enfin, M. Abbas a laissé planer la menace d'une autodissolution de l'Autorité palestinienne, qu'il dirige, chargée d'administrer les zones autonomes de Cisjordanie, qui obligerait Israël à assumer la responsabilité directe de la population de ce territoire occupé, comme avant les accords d'Oslo de 1993. Côté américain, le secrétaire d'Etat John Kerry, parrain du processus de paix, a dû prendre acte de l'échec, à ce stade, de son initiative.