Au moins 10 soldats ont péri mercredi dans un attentat à la voiture piégée dans le Sinaï égyptien, où les attaques contre les forces de l'ordre se sont multipliées depuis la destitution du président islamiste Mohamed Morsi par l'armée. Cet attentat a eu lieu près de la ville d'Al-Arich, capitale régionale du Nord-Sinaï, péninsule proche d'Israël et de Gaza, où des attaques ont fait des dizaines de morts parmi la police et l'armée depuis la destitution et l'arrestation le 3 juillet du seul président jamais élu démocratiquement du pays. Vers 07H45 locales (05H45 GMT), une voiture a explosé au passage d'un convoi de l'armée faisant 10 morts et 35 blessés parmi les soldats, a indiqué l'armée dans un communiqué. Certains des blessés ont été grièvement atteints et hospitalisés, selon le texte. En représailles à l'implacable, et très sanglante, répression menée par les autorités de transition installées par les militaires contre les partisans de M. Morsi, certains mouvements armés clandestins jihadistes, parfois liés à Al-Qaïda, ont revendiqué de nombreux attentats, dont certains spectaculaires. Ainsi, le 19 août, une embuscade contre un convoi de policiers près de Rafah, le point de passage vers la bande de Gaza, a fait 25 morts dans les rangs des policiers dans l'attaque la plus meurtrière depuis des années dans la péninsule désertique du nord-est égyptien. Le 5 septembre au Caire, c'est un kamikaze qui a fait exploser sa voiture au passage du convoi du ministre de l'Intérieur --accusé par les islamistes d'avoir orchestré la dispersion dans un bain de sang de rassemblements pro-Morsi au Caire. Le ministre Mohamed Ibrahim est sorti indemne de cet attentat. Depuis le 14 août, plus d'un millier de personnes en majorité des pro-Morsi ont été tués lors de rassemblements dans la répression du mouvement réclamant un retour du président islamiste. En outre, plus de 2.000 Frères musulmans -la confrérie de M. Morsi qui avait largement remporté les législatives de fin 2011- ont également été arrêtés depuis mi-août, dont leurs principaux dirigeants. Ces derniers doivent être jugés, à l'instar de M. Morsi, notamment pour meurtres ou incitation au meurtre. Les islamistes, qui réclament le retour au pouvoir de M. Morsi, appellent à manifester quotidiennement et ces cortèges dégénèrent régulièrement en heurts, parfois meurtriers, avec des opposants au chef de l'Etat destitué. Manifestations contre armée et islamistes Des millions d'Egyptiens, accusant M. Morsi d'avoir voulu islamiser la société à marche forcée, étaient descendus dans les rues le 30 juin pour réclamer son départ, avant de l'obtenir de la main de l'armée trois jours plus tard. Mardi, pour la première fois depuis début juillet, ce ne sont pas des manifestations islamistes, mais des mouvements de la jeunesse, hostiles aux militaires comme aux Frères musulmans, qui ont mobilisé contre le nouveau pouvoir. Ces rassemblements sur l'emblématique place Tahrir du Caire ont été émaillés de heurts entre opposants et partisans de l'institution militaire et de son commandant en chef, le général Abdel Fattah al-Sissi, véritable homme fort du pays. Au moins une personne est morte et 16 ont été blessées sur cette place, épicentre de la révolte de 2011 qui a chassé le président Hosni Moubarak, où sont intervenus des blindés de la police anti-émeute. Des centaines de manifestants, à l'appel de mouvements laïques, étaient venus pour marquer l'anniversaire du 19 novembre 2011, premier jour d'une semaine sanglante durant laquelle une quarantaine de manifestants, hostiles au pouvoir intérimaire de l'armée après la chute de Moubarak, avaient été tués par les forces de l'ordre aux abords de la place. Les nouvelles autorités, qui affirment régulièrement «combattre le terrorisme» auquel elles assimilent aussi bien les partisans de M. Morsi que les jihadistes dans le Sinaï, ont déployé des forces supplémentaires dans la péninsule. L'armée affirme depuis régulièrement avoir tué des «terroristes» dans cette région essentiellement désertique aux rapports de longue date tendus avec le pouvoir, et où les zones visées sont interdites d'accès par les militaires.