Des militants islamistes ont mené une nouvelle attaque mercredi contre l'armée égyptienne dans la péninsule instable du Sinaï où six soldats ont péri dans l'explosion de deux voitures piégées, en pleine opération militaire contre les groupes radicaux. «Des éléments islamistes terroristes ont mené ce matin une lâche attaque avec deux voitures bourrées d'importantes quantités d'explosifs, qui a coûté la vie à six soldats et blessé 17 personnes», y compris sept civils, a précisé un porte-parole militaire dans un communiqué. Selon des responsables, une puissante explosion a visé le quartier général des services de renseignements de l'armée à Rafah, ville frontalière de Gaza, suivie quelques minutes plus tard par une attaque contre un poste militaire de contrôle routier à proximité. Selon des témoins, la puissante explosion a brisé les vitres des bâtiments dans le secteur Imam Ali à Rafah. Le QG des renseignements militaires est situé dans une zone hautement sécurisée et entouré de barrages de contrôle routier. Le point de passage de Rafah avec la bande de Gaza a été fermé après l'attaque et toutes les routes de et vers le QG ont été fermées alors que les soldats fouillaient le secteur à la recherche de suspects. Depuis la destitution par l'armée du président islamiste élu Mohamed Morsi le 3 juillet, puis la répression extrêmement sanglante des manifestations réclamant son retour, les attaques meurtrières d'islamistes radicaux visant les forces de l'ordre se sont multipliées dans le Sinaï (est). L'armée a riposté en y lançant une offensive d'envergure il y a plus d'une semaine, bombardant quasi-quotidiennement les repaires de jihadistes qu'elle considère comme des «terroristes». Des groupes radicaux islamistes, dont certains ayant fait allégeance à Al-Qaïda, ont établi leurs bases arrières dans cette région majoritairement peuplée de bédouins aux relations conflictuelles avec le pouvoir central et théâtre en outre de multiples trafics le long de la frontière israélienne. Il y a six jours au Caire, un attentat à la voiture piégée a visé mais laissé indemne le ministre de l'Intérieur Mohammed Ibrahim, considéré comme l'un des principaux maîtres d'oeuvre de la campagne de répression qui a fait, à partir du 14 août, au moins un millier de morts, des manifestants pro-Morsi pour l'immense majorité. L'attentat a été revendiqué par un groupe jihadiste du Sinaï qui a fait allégeance à Al-Qaïda, Ansar Beit al-Maqdess, pour venger la mort des manifestants islamistes. Ce groupe a menacé de lancer de nouvelles attaques visant les forces de l'ordre, le ministre de l'Intérieur, mais aussi le général Abdel Fattah al-Sissi, chef d'état-major de l'armée et véritable homme fort du pouvoir. Les militaires, qui ont destitué et arrêté M. Morsi, seul chef d'Etat jamais élu démocratiquement en Egypte, ont mis en place un gouvernement transitoire chargé d'organiser des élections législatives et présidentielle début 2014. Mais depuis la dispersion dans le sang de deux rassemblements géants de pro-Morsi le 14 août au Caire, l'armée et la police sont engagées dans une campagne de répression sans merci des partisans de M. Morsi, en particulier les membres de sa confrérie des Frères musulmans. Les militants les plus actifs des Frères musulmans ont été décimés et les dirigeants de la confrérie ont été arrêtés et accusés devant les tribunaux de «meurtres» ou d'»incitation au meurtre». Même si l'armée et le nouveau pouvoir semblent soutenus par une large majorité de la population, qui a manifesté par millions fin juin pour réclamer le départ de M. Morsi, les experts redoutent une campagne d'attentats des groupes radicaux contre le «coup d'Etat militaire». Les opérations militaires ont redoublé d'intensité après une série de violences contre les forces de l'ordre notamment dans le Sinaï, où le 19 août, 25 policiers ont péri dans l'attaque la plus meurtrière depuis des années. En deux mois, les militaires ont assuré avoir tué une centaine d'insurgés dans le Sinaï et affirmé que ces derniers avaient tué au moins 58 policiers, 23 soldats et 17 civils.