L'nstabilité en Afrique du Nord et au Sahel, couplée à la situation humanitaire et sécuritaire dans les camps du polisario, fournit un terrain fertile pour les recruteurs d'Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI), groupe terroriste qui s'appuie sur une base de militants et de recrues pour mettre en oeuvre ses visées déstabilisatrices dans la région sahélo-saharienne, écrit mercredi le Washington Post. Sous le titre «L'Afrique du Nord: un terrain fertile pour le terrorisme», le journal américain souligne que la région sahélo-saharienne est marquée par l'émergence d'une multitude d'organisations criminelles et terroristes qui profitent des trafics de tout genre sévissant dans ce No Man's Land désertique, citant à cet égard les conclusions du nouvel ouvrage intitulé «Désert périlleux: instabilité au Sahara», édité par le prestigieux centre de réflexion américain «Carnegie Endowment for International Peace». L'auteur de l'article, Jennifer Rubin, relève ainsi que la majorité des analystes s'accordent sur l'urgence d'aboutir rapidement à une solution à la question du Sahara, étant donné la situation précaire qui prévaut dans les camps de Tindouf, infiltrés par Al-Qaida et devenus une véritable «bombe à retardement». Citant les propos de Anouar Boukhars, coauteur de «Désert périlleux: instabilité au Sahara», le Washington Post fait observer que même le Secrétaire général de l'ONU a fait part récemment de ses inquiétudes quant aux répercussions de la crise au Mali sur la situation sécuritaire dans la région et l'infiltration des camps de Tindouf par les groupes terroristes. «Les organisations criminelles et les groupes extrémistes continueront d'exploiter la fragilité des Etats de la région, les conflits oubliés, comme celui du Sahara, et le manque de coopération régionale en matière sécuritaire», souligne la même source, qui fait observer que les grandes puissances, y compris les Etats-Unis, redoutent l'idée de la création d'un nouvel Etat faible dans une région déjà pénalisée par l'existence d'Etats fragiles ou en faillite. Ce genre d'Etats, poursuit le Washington Post, représentent de véritables menaces pour la sécurité internationale et constituent un terrain de recrutement idéal pour les organisations extrémistes et radicales, ajoutant qu'une telle situation est à même d'exacerber les tensions et déclencher de nouveaux conflits. Dans «Désert périlleux: instabilité au Sahara» (Perilous Desert : Insecurity in the Sahara), Anouar Boukhars et Frederic Wehrey pointent du doigt l'implication à grande échelle d'AQMI et ses alliés dans les activités terroristes et le trafic de tout genre dans la région sahélo-saharienne y compris en Libye, Mali, Mauritanie et dans les camps de Tindouf, au sud-ouest de l'Algérie, qualifiés de «poudrière prête à exploser». Les auteurs de ce livre notent qu'»au moment où l'attention de la communauté internationale était focalisée sur les événements de grande ampleur qui secouaient la Tunisie, l'Egypte et la Libye dans le sillage du Printemps arabe, les Etats de la sous-région subissaient des transformations aux implications capitales sur la sécurité internationale». Bien que largement «ignorés» par les décideurs et les prescripteurs d'opinion, les Etats de la région sahélo-saharienne ont fait les frais d'un «désastre parfait» né d'une gouvernance défaillante, d'une corruption et d'une pauvreté endémiques le tout dans un contexte de clivage ethnique et social, qui a fait le lit, dans une géographie inaccessible, au crime transnational et au militantisme islamiste», soulignent-ils. L'ouvrage fait observer que les attaques terroristes hyper-médiatisées y compris celle ayant pris pour cible l'ambassadeur des Etats Unis en Libye, Chris Stevens, ainsi que l'intervention militaire française au Mali, suivie de l'opération de prise d'otages dans le complexe gazier d'In Amenas, au sud de l'Algérie, renseignent sur «l'ouverture d'un nouveau front de lutte contre Al-Qaeda, que certains avaient qualifié «d'arc d'instabilité couvrant un ensemble géographique allant du Sahara à la Somalie en passant par le nord de l'Afrique jusqu'au Sinaï». Les auteurs de cet ouvrage soulignent que la franchise d'Al-Qaeda en Afrique du nord «se nourrit des frustrations et de la désaffection des jeunes des camps de Tindouf, mais aussi au Mali, Libye, Niger, Mauritanie et en Algérie», en estimant qu'il s'agit là de facteurs qui minent la stabilité et la sécurité dans la région. Dans un chapitre actualisé sur la question du Sahara, Anouar Boukhars écrit que «la non résolution de ce conflit aura un impact négatif sur la sécurité transsaharienne, notamment dans les camps de Tindouf, devenus un repaire pour le trafic de drogue, la contrebande et la circulation des armes». «Il existe des preuves irréfutables attestant d'une collusion périlleuse entre les organisations criminelles, AQMI, et les camps de Tindouf», soutient-il, en rappelant «qu'en février dernier, le ministre malien des Affaires étrangères avait confirmé la présence d'éléments du polisario parmi les groupes terroristes ayant fui l'armée française au Mali». En conclusion de cet ouvrage, les deux auteurs notent que «les Etats fragiles en faillite constituent une menace à la sécurité internationale, car ils peuvent être amenés à mettre à disposition des camps d'entrainement et des bases arrières au profit d'Al-Qaeda et des groupes terroristes qui s'en réclament, tout en offrant aux extrémistes violents un environnement générateurs de profits à travers le trafic illicite».