changement climatique n'est pas un phénomène isolé, il doit être replacé dans son contexte. Au cours du XXIe siècle, la croissance économique et démographique devrait s'accompagner d'une progression du bien-être et d'une meilleure capacité d'adaptation des populations dans beaucoup, voire dans la plupart des régions. D'un autre côté, on observera certainement des tensions accrues et une augmentation des pressions subies par un écosystème planétaire déjà proche de ses limites critiques. La résilience de nombreux écosystèmes, naturels ou non, a toutes les chances d'être mise à rude épreuve par ces pressions et par les conséquences du changement climatique. Les impacts attendus sur la disponibilité de l'eau, les écosystèmes, l'agriculture et la santé humaine pourraient entraîner un déplacement de population de grande envergure et avoir des conséquences sur la sécurité humaine, ainsi que sur les systèmes économiques et commerciaux. Les dégâts que pourrait causer une élévation de la température de 4°C sont encore loin d'avoir été évalués en totalité. Les changements à grande échelle et les perturbations qu'ils sont susceptibles d'induire sur le système terrestre ne sont généralement pas pris en compte dans les exercices de modélisation, et le sont rarement dans les évaluations d'impact. Au fur et à mesure que le réchauffement climatique s'approchera d'une élévation de la température de 2°C puis dépassera cette valeur, il y aura de plus en plus de risques que ne soient franchis des seuils entraînant un basculement non linéaire du système terrestre avec des conséquences brutales et l'émergence de régimes climatiques comprenant des températures d'une chaleur sans précédent. La désintégration de la calotte glaciaire de l'Antarctique occidental pourrait par exemple entraîner une montée du niveau de la mer supérieure à ce que ne prévoit la présente analyse ; le dépérissement à grande échelle de la forêt amazonienne pourrait affecter radicalement les écosystèmes, l'agriculture, la production énergétique ainsi que les moyens de subsistance des hommes à une échelle quasiment continentale, augmentant ainsi de manière substantielle le réchauffement climatique du XXIe siècle. Certains secteurs économiques pourraient également réagir de manière non linéaire à un réchauffement climatique élevé. Il faut par exemple s'attendre à des effets non linéaires sur les récoltes en cas d'élévation progressive de la température de 2°C, voire davantage. Pourtant, la plupart de nos modèles de culture actuels ne tiennent pas encore pleinement compte de cet effet, pas plus que de l'élargissement potentiel des plages de variations (extrêmes de température, nouveaux organismes nuisibles et maladies, modification radicale de facteurs climatiques critiques ayant d'importantes conséquences sur les récoltes ou sur la qualité des céréales, par exemple). En règle générale, les projections des coûts imputables aux changements climatiques tiennent compte des pertes subies localement – y compris par les infrastructures – mais n'intègrent pas suffisamment les effets en cascade à l'échelon national et régional (sur la chaîne de valeur ajoutée et les réseaux d'approvisionnement, par exemple). Pourtant, dans un monde de plus en plus globalisé, qui connaît un accroissement de la spécialisation des systèmes de production et donc une plus grande dépendance des infrastructures pour la livraison des produits, tout dommage à un système d'infrastructure est susceptible d'entraîner d'importantes conséquences indirectes. Les ports maritimes en sont un excellent exemple : une panne ou une perturbation substantielle des infrastructures portuaires peut avoir un impact dépassant largement le lieu d'origine des dommages.