Des hélicoptères de l'armée syrienne bombardaient dimanche des positions tenues par les insurgés Alep, la grande ville du nord de la Syrie que tentent de contrôler les rebelles et les pro-Assad. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), des affrontements avaient lieu dimanche matin dans plusieurs zones contrôlées par les rebelles, principalement dans le centre ville et dans les quartiers ouest. Un militant de l'opposition a confié avoir vu des chars et des véhicules de transport de troupes se diriger vers le quartier de Salaheddine dimanche. Un chasseur a également été aperçu dimanche à l'aube au-dessus de la ville. Samedi, les hélicoptères de l'armée syrienne ont bombardé des positions tenues par les insurgés dans le centre d'Alep et des unités blindées ont pris position en vue de reprendre le contrôle total de la grande ville du nord de la Syrie, un assaut que la presse favorable au président Bachar al Assad présente comme la «reine de toutes les batailles». L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), une ONG favorable à l'opposition syrienne et basée à Londres, a rapporté que des hélicoptères gouvernementaux avaient attaqué dans la matinée le quartier de Salaheddine à Alep, capitale économique et ville la plus peuplée de Syrie avec deux millions et demi d'habitants. De violents combats ont également eu lieu à l'entrée du quartier de Sakhour, ajoute l'OSDH. Un militant de l'opposition a précisé avoir vu des chars et des véhicules blindés de transport de troupes faire mouvement vers le quartier de Salaheddine. La communauté internationale s'inquiète de voir la bataille d'Alep entraîner des massacres de civils et le conflit s'étendre à d'autres pays de la région. Pour de nombreux experts militaires, les forces d'Assad, en raison de leur supériorité matérielle, sont en mesure de contrôler les zones urbaines, notamment Alep et Damas, mais pourraient se retrouver sur la défensive dans les régions rurales. Illustration de ce phénomène, une colonne blindée gouvernementale qui opérait jusqu'ici dans le province d'Idlib, dans le nord de la Syrie, a été envoyée à Alep en vue de la grande contre-attaque. Affrontements à Deraa, Homs et Hama «A Alep, il est probable que les forces d'Assad sont en mesure de s'assurer un succès tactique qui permettra au régime de démontrer sa supériorité militaire», dit l'analyste Ayham Kamel, de l'Eurasia Group, qui souligne toutefois que les insurgés ne cessent de se renforcer alors que l'armée gouvernementale connaît de plus en plus de défections. Dans la nuit de vendredi à samedi, entre minuit et le lever du jour, trois combattants rebelles ont été tués dans les combats à Alep, selon l'OSDH. Vendredi, les violences ont fait au total 160 morts à travers le pays, ajoute l'ONG. Le bilan du soulèvement depuis mars 2011 serait d'environ 18.000 morts. Des affrontements ont également été signalés samedi à Deraa, le berceau de la révolte dans le sud du pays, à Homs, dans le centre, et à Hama, ville où un soulèvement islamiste au début des années 1980 avait été écrasé dans le sang par le président Hafez al Assad, le père de Bachar. Près de Damas, à Maadameiat al Cham, les forces de sécurité ont tué une dizaine de personnes, rapporte l'OSDH. « Intervenir pour éviter le chaos et la guerre civile » Sur le plan diplomatique, François Hollande a appelé samedi le Conseil de sécurité de l'Onu à intervenir «le plus rapidement possible» pour empêcher que la Syrie ne sombre dans «le chaos» et la «guerre civile». Il s'est adressé tout particulièrement à la Russie et à la Chine, qui se sont jusqu'ici opposées à tout projet de résolution condamnant le régime de Damas. «Le régime de Bachar al Assad sait qu'il est condamné et donc il va utiliser la force jusqu'au bout. Le rôle des pays membres du Conseil de sécurité de l'Onu, c'est d'intervenir le plus rapidement possible», a déclaré le président français à la presse, en marge d'un déplacement dans le Gers. «Je m'adresse une fois encore à la Russie et à la Chine pour qu'elles prennent en considération que ça sera le chaos et la guerre civile si Bachar al Assad n'est pas à un moment empêché», a-t-il ajouté, appelant de ses voeux la constitution d'un gouvernement de transition en Syrie. «Il n'est pas trop tard mais chaque jour qui passe, c'est une répression, des soulèvements et donc des massacres», a poursuivi le président français. Pour sa part, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, autrefois proche d'Assad, a estimé vendredi que la communauté internationale devait agir face à l'aggravation de la situation à Alep et à la menace brandie par Damas de faire usage de son arsenal chimique en cas d'agression étrangère. «Il y a des renforts (de l'armée syrienne) à Alep, et les récentes déclarations sur l'utilisation d'armes de destruction massive sont des éléments devant lesquels nous ne pouvons pas rester simples observateurs ou spectateurs», a-t-il dit à Londres lors d'une conférence de presse commune avec le Premier ministre britannique, David Cameron. «Des mesures conjointes doivent être prises par le Conseil de sécurité de l'Onu, l'Organisation des pays islamiques, la Ligue arabe, et nous devons travailler ensemble pour tenter de surmonter cette situation.» Le chef du gouvernement britannique a de son côté fait part des préoccupations de Londres et d'Ankara face à un possible massacre que s'apprêteraient à commettre à Alep les forces fidèles au président Assad. «Ce serait totalement inacceptable. Ce régime doit prendre conscience qu'il est illégitime, qu'il est injuste et qu'il doit arrêter ce qu'il est en train de faire», a déclaré David Cameron. Pour les Russes, qui se sont par trois fois opposés au Conseil de sécurité de l'Onu à des résolutions sanctionnant le gouvernement de Damas, le soutien de la communauté internationale aux insurgés ne peut que conduire à de nouvelles effusions de sang car il est «irréaliste» de penser qu'Assad acceptera de rendre les armes. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lors d'une conférence de presse samedi à Sotchi avec son homologue japonais Koichiro Gemba, a dit craindre une tragédie «imminente» à Alep. «Malheureusement, nos partenaires occidentaux, avec des pays voisins de la Syrie, encouragent, soutiennent et dirigent la lutte armée contre le régime syrien», a-t-il déploré. «Le prix à payer pour tout cela, ce seront de nouvelles effusions de sang.» Moscou veut que les Occidentaux et les pays arabes fassent pression sur les rebelles pour qu'ils suspendent les combats et acceptent une solution négociée.