Les forces de Bachar al Assad ont repris dimanche aux insurgés deux quartiers de Damas, où, appuyés par des blindés, des hélicoptères et des miliciens, elles pourchassent les rebelles et les habitants soupçonnés de les aider, affirment des opposants au régime. Par ailleurs, la Ligue arabe a pressé le président Bachar al-Assad de «renoncer au pouvoir» rapidement, indiquant qu'elle lui assurerai une sortie «sûre» pour lui-même et sa famille. Le régime est engagé dans une vaste contre-offensive à Damas depuis la mort de quatre des principaux responsables de son appareil de sécurité dans un attentat commis mercredi en pleine réunion des organisateurs de la répression. Outre la capitale syrienne, qui n'avait jamais connu de combats d'une telle intensité en 16 mois de contestation, la bataille fait rage près du siège des services de renseignement à Alep, plus grande ville de Syrie dans le nord du pays, et à Daïr az Zour, dans l'est. Les forces syriennes ont par ailleurs repris le contrôle de l'un des deux postes-frontières capturés par les insurgés à la frontière avec l'Irak, ont dit des responsables irakiens, mais les rebelles se sont emparés d'un autre poste à la frontière avec la Turquie, Bab al Salam, au nord d'Alep. Dans cette même région, les insurgés ont pris une académie militaire à Moussalmiyeh, à 16 km au nord d'Alep. Ils ont capturé plusieurs officiers loyalistes tandis que d'autres ont déserté, a dit le général Moustafa al Cheikh, qui a rompu avec le régime et a gagné la Turquie. Exécutions sommaires selon l'opposition... Une semaine après le déclenchement de «la bataille pour la libération de Damas», les insurgés ont été repoussés de Mezzeh, le quartier des ambassades dans la capitale syrienne, ont dit des habitants et des opposants. Plus d'un millier de soldats et de chabiha, les miliciens du régime, appuyés par des blindés, des hélicoptères et des bulldozers, se sont déployés dans le secteur. Les forces gouvernementales y ont exécuté au moins 20 hommes désarmés âgés d'environ 20 à 30 ans, ont dit plusieurs opposants à Mezzeh, interrogés par téléphone. Le bombardement du quartier dans la matinée a fait trois morts et 50 blessés, majoritairement des civils, a dit Thabet, un habitant de Mezzeh. «Le quartier est assiégé et les blessés sont privés d'assistance médicale», a-t-il dit. «Plusieurs maisons ont été incendiées.» Barzeh, l'un des trois faubourgs du nord de la capitale soumis à des tirs d'hélicoptères, a été pris d'assaut par la 4e Division blindée de Maher al Assad, considéré comme l'intraitable garant de la fermeté du régime alaouite mis en place en 1970 par son père, Hafez. «Au moins 20 chars de la 4e division et des centaines de ses membres sont entrés dans Barzeh cet après-midi», raconte un militant de l'opposition, Abou Kais, joint par téléphone. Lui comme d'autres opposants font état d'exécutions sommaires dans ce quartier. ...«situation normale » selon Damas La télévision d'Etat a pour sa part démenti que des hélicoptères aient ouvert le feu sur la capitale. «La situation à Damas est normale mais les forces de sécurité pourchassent les derniers éléments terroristes dans quelques rues», a-t-elle rapporté. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), organisme d'opposants basé à Londres, évoque un bilan de 1.261 tués, dont 299 parmi les forces pro-Assad, dans toute la Syrie depuis dimanche dernier, ce qui fait de cette semaine la plus meurtrière d'un conflit qui a fait 18.000 morts. Au total, 79 civils et 24 militaires ont été tués dimanche, ajoute l'OSDH. Divisée, la communauté internationale est impuissante à arrêter les violences. Réunie à Doha, la Ligue arabe a exhorté les opposants et les insurgés de l'Armée syrienne libre (ASL) à constituer un gouvernement de transition, a déclaré le Premier ministre du Qatar, le cheikh Hamad ben Djassim al Sani. Selon lui, les pays arabes sont prêts à aider Bachar al Assad à quitter son pays en vie s'il démissionne rapidement, ce dont il ne semble pas avoir l'intention. Voie de sortie arabe pour Bachar, refusée par Damas Les pays de la Ligue arabe ont pressé le président syrien Bachar al-Assad de «renoncer au pouvoir» rapidement, indiquant dans un communiqué final publié dans la nuit de dimanche à ce lundi, qu'ils lui assureraient en échange une sortie «sûre» pour lui-même et sa famille, au terme d'une réunion à Doha. Mais Damas a rejeté hier lundi 23 l'initiative de la Ligue arabe en faveur d'un départ négocié du président Bachar Al-Assad et de sa famille, a affirmé le porte-parole du ministère des affaires étrangères syrien, Jihad Makdessi. « Cette décision revient au peuple syrien, qui est le seul maître de son sort », a-t-il dit. L' initiative arabe était destinée à «mettre fin à l'effusion du sang», «préserver l'unité de la Syrie» et «garantir une transition pacifique du pouvoir» dans ce pays, membre de la Ligue arabe, selon le texte. Le Premier ministre du Qatar, cheikh Hamad Ben Jassam Al-Thani, a déclaré aux journalistes qu'«il y a une entente sur une démission rapide du président Bachar al-Assad pour une sortie sûre», et a ajouté que les ministres avaient appelé «l'opposition et l'ASL (...) à former un gouvernement d'unité nationale». Ce gouvernement, qui aura à «favoriser une transition pacifique», doit «rassembler les forces de l'opposition en Syrie et à l'étranger» ainsi que «l'autorité nationale de facto», ont indiqué les ministres dans leur communiqué final sans préciser ce qu'ils entendent par autorité «de facto». Ils ont en outre appelé l'ONU à modifier le mandat de l'émissaire international en Syrie Kofi Annan pour que sa mission soit axée sur le départ de Bachar al-Assad et une transition pacifique du pouvoir, selon le texte. Parallèlement, les pays arabes vont demander une réunion extraordinaire de l'Assemblée générale de l'ONU pour la création en Syrie de «zones de sécurité» et «des couloirs humanitaires». A l'ouverture de la réunion du Comité ministériel, le responsable qatari a indiqué que la mission de Kofi Annan «doit changer» pour assurer «un transfert pacifique du pouvoir» en Syrie. Les armes chimiques jamais contre les Syriens Les stocks d'armes chimiques syriens sont en sécurité et ne seront employés qu'en cas d'attaque étrangère, a assuré lundi le porte-parole du ministère syrien des Affaires étrangères Jihad Makdissi. Lors d'une conférence de presse diffusée par la télévision d'Etat, Makdissi a précisé que les armes chimiques étaient sous la protection de l'armée syrienne et ne seront jamais utilisées «en Syrie». Le chef de la diplomatie syrienne a assuré que le régime n'utilisera des armes chimiques qu'en cas «d'agression extérieure», et ne les emploiera jamais contre les civils.