" La vie est une rose dont chaque pétale est une illusion et chaque épine une réalité. " (Alfred de Musset) - Sois le bienvenu ami ! Cette fois ton absence a été plus longue. Je commençais à me poser des questions à ton sujet. Je m'étais habitué à te voir plus souvent et je dois t'avouer que ta présence me soulageait, allégeait ma solitude, me laissait penser que je n'étais pas seule à espérer un lendemain meilleur. J'avais quelqu'un à qui me confier, avec qui partager mes soucis et mes peines. J'avais enfin trouvé celui qui, quand tout va mal, vient rechercher cette sensation de paix et ce réconfort que l'on ne trouve nulle part ailleurs. Oui, je sais, pas de reproches ! Et puis, de quel droit devrai-je t'en faire ? Je suis incorrigible. Avec le temps, je deviens un peu plus possessive. Je ne devrais pas, n'est ce pas ? Je m'excuse mais c'est plus fort que moi. La relation entre nous deux a depuis longtemps dépassé le stade du simple dialogue. Elle est, maintenant, plus forte, plus intéressante à tel point que quand tu t'absentes, tu me manques. Tes paroles me manquent ainsi que tes réflexions, des fois crues certes mais pleines d'intérêt. Je me rappelle la première fois où tu étais venu me parler, les propos que nous avions échangés. Tu étais dans tous tes états et il m'avait fallu beaucoup de tact et de savoir-faire pour arriver à te calmer. Je dois t'avouer que j'avais aimé ta façon d'exposer les problèmes qui te chagrinaient, ta faculté d'écouter et d'émettre des remarques, le moment opportun. J'avais aimé le calme, même s'il n'était qu'apparent, qui se reflétait sur ton visage, l'intérêt que tu portais, durant notre discussion, aux problèmes de tous les jours. Aujourd'hui, tu es là et même si tu ne dis rien, même si tu essaies de travestir ta peine, quelque chose me dit que tu as mal et que tu as besoin de te confier. J'ai appris à te connaître, à deviner ce qui te chagrine, à saisir à demi-mot ce que tu n'oses pas me dire franchement. Et, si tu viens me voir, c'est que tu es sûr qu'en me quittant, tu auras retrouvé la paix et l'assurance qui te manquent. Tu peux me faire confiance, je serais toujours là pour toi. Alors assieds-toi et écoute ce que j'ai à te raconter : " Durant ma très longue existence, j'ai accumulé beaucoup d'expériences. Je suis passé par trop de situations, des fois critiques mais je suis toujours là. Tes semblables n'ont jamais cessé de solliciter mon aide et les bienfaits que je leur procure, sont inestimables. J'existe dans tout ce qu'ils entreprennent. Je fais partie de leurs rêves et leurs réalités. Je les aide à réaliser tous leurs vœux et toutes leurs aspirations. Qu'est-ce que j'attends en retour de leur part ? Oh, peu de choses ! Un peu de gratitude et de reconnaissance, du respect. En vérité, je n'ai rien de tout ça. L'homme, qui doit me protéger, est entrain de piller mes ressources avec une effronterie sans pareille. Il ne se contente pas de prendre uniquement ce dont il a besoin, mais plus. Son appétit et ses envies n'ont aucune limite. Pourtant, je suis un élément essentiel dans l'équilibre auquel il aspire et qu'il est en passe de fausser. Il se nourrit de mes ressources halieutiques, exploite mes richesses énergétiques, se pare même de mes bijoux naturels, de mes coraux et perles, entre autre. Il se sert des routes maritimes pour transporter tout ce qu'il ne peut faire par les voies terrestres ou aériennes. Je suis à l'origine de la formation des nuages qui, par la suite, lui fourniront l'eau bénéfique, nécessaire à ses récoltes. Je régule le climat et lui offre la fraîcheur de mes brises quand il fait chaud et qu'il vient solliciter mon aide. Pour me remercier, il me fait don de ses eaux usées et des composants chimiques qui empoisonnent ma faune et ma flore. Mais malgré tout, est-ce que je me plains ? Depuis que le monde existe, je n'ai jamais failli à ma mission première, à savoir être entièrement à son service pour lui procurer tout le bien être dont il a besoin. Ce que je cherche à te faire comprendre, à travers mes propos, c'est qu'il faut être patient. Oui, je sais que c'est ce qui te fait défaut mais crois-moi, il faut apprendre à calmer ton impatience, à espérer l'arrivée de ce jour où l'homme comprendra enfin en apprenant de ses erreurs. Ne rejette pas tout en bloc ! Dans ce mauvais, il existe certainement un peu de bon. C'est à toi et à toutes les personnes de bonne volonté de le mettre en évidence, de le dépoussiérer. Bien sûr, chacun de nous a ses moments de révolte, ses humeurs méchantes, celles qui nous dépassent par leur ampleur, leur fréquence et l'étendue de leurs dégâts. J'oserai dire que c'est humain, que c'est naturel. Mais ces moments de crise passés, il faut revenir à la normale et essayer malgré tout d'être positif. La vie, contrairement à ce qui se dit, vaut la peine d'être vécue. Ce sont ses moments de crise, de coups durs qui lui donnent ce goût onctueux et ravivent notre désir de la vivre intensément afin de nous délecter de chacun de ses instants, de profiter de chaque seconde qui passe. Que penses-tu qu'il arriverait si tout était parfait ? L'ennui et le marasme peupleraient les jours et les dépouilleraient de leur intérêt et de leur raison d'exister. Est-ce que tu saisis l'importance de ce que je te dis ? Je pense que oui. Alors calme-toi ! Dans quelques instants, le soleil viendra terminer sa course dans mes eaux où il dormira en attendant demain. Tu pourras admirer à ton aise, son coucher et les teintes ensorcelantes qui l'accompagnent. C'est la meilleure médication pour ton humeur revêche. Après tu te sentiras beaucoup mieux. Tu n'as rien à me dire ? D'habitude, tu me remercies à ta façon. Tu me lis un de tes poèmes. J'espère que cette fois tu ne vas pas faillir à ton habitude. Fais-moi écouter ne serait-ce qu'un bout d'un poème de ton choix. C'est ma façon de voir si tu as bien retenu la leçon." Je me suis confortablement assis. Et, pour faire plaisir à cette amie qui me prodiguait, chaque fois que j'en avais besoin, ses conseils sages et éclairés, je me suis mis à lire, de mémoire, quelques extraits d'un de mes poèmes que j'espérais être de circonstance. J'étais sûr qu'elle m'écoutait car le bruit que les vaguelettes faisaient en mourant sur le sable, semblait me dire que j'avais compris, oh pas tout, mais l'essentiel de l'existence. ………………… " Passe la vie, hélas, au rythme de ses heures, ………………… Tantôt amères et dures ou ceintes de bonheur ………………… Avons-nous su décrire l'espoir dans ses pages ? ………………… Avons-nous ranimé, sans aucune contrainte, ………………… Son amour défraîchi et ses joies mal éteintes ? ………………… Avons-nous pu garder le cap malgré l'orage ? " ALAAYYADI