Avec plus de 3.400 kilomètres de côtes, la pêche maritime occupe une place centrale dans l'économie marocaine. Si le secteur affiche un dynamisme notable, notamment grâce à la stratégie Halieutis, il n'en demeure pas moins confronté à des défis structurels et environnementaux qui en détermineront l'avenir. Tout au long de son histoire, aux côtés de l'agriculture, la pêche a toujours été l'un des secteurs les plus importants du Maroc. Cela s'explique par sa géographie particulière, le Royaume disposant de l'une des façades maritimes les plus étendues du continent, avec plus de 3.400 kilomètres de côtes : 2.934 kilomètres le long de l'océan Atlantique et 512 kilomètres bordant la mer Méditerranée. Cela offre au pays environ 1,2 million de kilomètres carrés d'espace maritime, constitué de l'une des eaux les plus poissonneuses au monde. Ce n'est donc pas un hasard si le Maroc est le premier producteur de poissons en Afrique ainsi que le premier producteur et exportateur mondial de sardines (Sardina pilchardus). Au niveau mondial, il se place au 15éme rang. Le secteur de la pêche et de la transformation du poisson figure parmi les domaines les plus dynamiques de ces dernières années. Sa contribution au Produit Intérieur Brut (PIB) s'est établie à une moyenne de 2,3 % au cours des dix dernières années. En matière d'emploi, la filière de la pêche se distingue en générant plus de 220.000 emplois directs et près de 500.000 emplois indirects, confirmant ainsi son rôle stratégique dans l'économie nationale.
Un secteur stratégique La pêche maritime marocaine génère une production annuelle d'environ 1,4 million de tonnes. Cette performance repose sur trois principaux contributeurs : 92 % de la production proviennent de 2.500 bateaux de pêche côtière et de 17.000 barques artisanales, 6 % sont assurés par une flotte hauturière composée de 465 navires, et 2 % émanant d'autres activités de pêche. La production nationale issue de la pêche côtière et artisanale se répartit principalement entre deux grandes destinations. Une part importante, soit 60 %, est dédiée à l'approvisionnement des 485 unités industrielles spécialisées dans la transformation des produits de la mer. Le reste, représentant 40 %, est destiné au marché local pour la consommation de produits frais. L'industrie de traitement et de valorisation des produits de la mer occupe une place stratégique dans l'économie nationale. Elle offre une gamme variée de produits, incluant des conserves, des semi-conserves, des produits congelés, du poisson frais ainsi que de la farine et de l'huile de poisson, renforçant ainsi son rôle essentiel dans la chaîne de valeur du secteur. Ce secteur représente 50 % des exportations agroalimentaires du Maroc, contribuant ainsi à hauteur de 7 % à 8 % des exportations totales en valeur. Avec une valeur exportée avoisinant 2,8 milliards de dollars, il se distingue notamment par ses produits à forte valeur ajoutée, tels que les conserves de poisson, qui figurent parmi les principales exportations. Par ailleurs, les destinations clés des produits marocains de la mer comprennent l'Union européenne, le Japon et plusieurs pays africains.
Des acteurs complémentaires Le secteur est structuré par plusieurs acteurs clés, tant institutionnels que professionnels. Le Département de la Pêche Maritime, relevant du Ministère de l'Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts, est dirigé par Zakia Driouich, secrétaire d'Etat chargée de la Pêche maritime. Ce département est responsable de l'élaboration et de la mise en œuvre des politiques publiques dans ce domaine, de la gestion durable des ressources halieutiques, de la formation des professionnels du secteur et de la réglementation des activités de pêche. Il joue également un rôle de coordination pour le développement des infrastructures portuaires dédiées à la pêche. À cela s'ajoute l'Office National des Pêches (ONP), qui organise la commercialisation des produits de la mer en assurant leur traçabilité et en modernisant les circuits de distribution. Il est également impliqué dans le développement de la pêche côtière et artisanale, en investissant dans l'équipement des ports de pêche et des villages de pêcheurs, et en promouvant l'accès au marché pour les produits locaux. L'ONP supervise également la mise en place d'enchères modernes pour garantir la transparence des transactions. Sur le plan professionnel, la Fédération des Industries de Transformation et de Valorisation des Produits de la Pêche (FENIP) regroupe plus de 300 entreprises opérant dans six branches d'activité, allant des conserves de poisson aux produits surgelés, en passant par la farine et l'huile de poisson. Cette fédération, présidée par Hassan Sentissi El Idrissi, joue un rôle central dans la structuration et la promotion de l'industrie de transformation des produits de la mer. Elle contribue également au rayonnement international du secteur en participant à des foires et expositions spécialisées. L'Institut National de Recherche Halieutique (INRH), quant à lui, est chargé de la recherche scientifique et de la préservation des ressources halieutiques. Il effectue des études sur les écosystèmes marins, les cycles biologiques des espèces exploitées et les impacts des activités de pêche. Ces données sont utilisées pour orienter les politiques nationales, notamment dans le cadre de la gestion des quotas de pêche et de la lutte contre la surpêche. Grâce à ses travaux, l'INRH contribue également à l'introduction de techniques innovantes pour maximiser la durabilité et l'efficacité des pratiques de pêche.
Des défis importants Bien que bénéficiant d'un véritable dynamisme, notamment grâce au soutien de l'Etat à travers la stratégie Halieutis, le secteur de la pêche fait face à des enjeux majeurs qui façonneront son avenir. La concurrence internationale, particulièrement celle des pays asiatiques, complique l'accès des produits marocains aux marchés traditionnels. Ces concurrents, dotés d'infrastructures industrielles performantes, pratiquent une politique tarifaire agressive, fragilisant ainsi la compétitivité marocaine. Pour relever ce défi, le Royaume mise sur une amélioration constante de la qualité de ses produits et investit dans la modernisation de ses infrastructures, notamment la flotte côtière et la chaîne du froid, afin de consolider ses parts de marché et d'explorer de nouvelles opportunités à l'échelle internationale. Par ailleurs, le secteur est confronté aux impacts du changement climatique, qui perturbent les écosystèmes marins et influencent les cycles de reproduction des espèces. Pour y faire face, des mesures telles que l'instauration de quotas de pêche, les périodes de repos biologique et le suivi scientifique ont été mises en place. Toutefois, ces actions doivent être renforcées pour faire face à l'ampleur des défis environnementaux. En complément, le développement de l'aquaculture se présente comme une alternative stratégique pour réduire la pression sur les ressources halieutiques naturelles. Ce segment, porté par une demande mondiale croissante, offre un potentiel significatif pour diversifier et dynamiser l'économie du secteur tout en préservant les écosystèmes marins du Royaume.