Hier, mercredi 10 janvier s'était réuni le Haut Conseil de Sécurité avec un invité surprise, en l'occurrence le général Abdelkader Haddad alias Nacer El-Djen (le diable). Un officier qui rappelle les douloureux souvenirs de la guerre civile dont il était l'un des principaux acteurs. « Je suis le sergent-chef Houari du CPMI, de l'escadron de la mort. Je vais vous parler de Haddad Abdelkader alias Nacer El-Djen. Il liquidait (ndlr, exécutait des détenus) au CPMI » (Centre Principal Militaire d'Investigation) de Ben-Aknoun sur les hauteurs d'Alger. L'auteur de cet effroyable témoignage était un sous-officier qui avait exercé au sein de l'escadron de la mort qui relevait de la Direction Centrale de la Sécurité de l'Armée (DCSA) dans les années 90' durant la décennie sanglante de la guerre civile. Une décennie marquée par la mort de 250.000 algériens civils et militaires et la disparition de quelques 20.000 personnes. Des disparus qui ont été, en réalité, exécutés dans les centres de détention des services de sécurité. Ce sont, généralement, des suspects contre lesquelles il n'y avait aucune preuve pour les traduire devant la justice, pour terrorisme. Après les avoir atrocement torturés et pour qu'ils ne racontent rien de ce qu'ils ont subi comme torture, ils sont tout simplement exécutés d'une balle dans la tête. Nacer El-Djen, était lieutenant à cette époque. Il faisait partie de « l'escadron de la mort ». Une équipe dont la mission était, au début de sa création, la liquidation physique de personnes supposées terroristes. Cela se passait le soir, à la tombée de la nuit. Enveloppé dans une « kachabia » (robe de bure avec capuchon), l'officier frappe à la porte du suspect. La première personne, qui ouvre, est abattue d'une rafale de kalachnikov. Peu importe si c'est le terroriste recherché ou un autre membre de sa famille. « Le but était de passer un message aux terroristes dont la teneur est : même si vous vous cachez dans les maquis, vos familles sont à notre portée » raconte un ancien officier de « l'escadron de la mort ». Avec le temps, la mission de l'escadron de la mort a évolué et ses éléments passaient à l'exécution extrajudiciaire des faux suspects.
Nacer El-Djen était parmi les plus sanguinaires. « Il lui arrivait d'abattre jusqu'à 20 ou 25 personnes par jour », témoigne le sergent-chef Houari dans la vidéo que nous diffusons ci-dessous. « Il se disputait avec ses collègues pour les primes qui s'élevaient à 10, 15 et 20 millions par tête exécutée. Tu liquides à l'intérieur du CPMI tu touches 15 millions (de centimes en dinars l'équivalent de 1.000 euros), tu liquides en dehors du CPMI, tu touches 25millions (1.700 euros). Il voulait exécuter plus que tous ses collègues. Il lui arrivait de liquider jusqu'à 2 personnes par jour ». Un témoignage qui vous glace le sang. Difficile de croire qu'un homme normalement constitué puisse s'adonner à pareil exercice. « Avant de passer à l'action, Nacer prenait des comprimés » explique, Houari qui souligne qu'il était un bon pote à lui. Il lui arrivait de lui donner de consistantes sommes d'argent « jusqu'à 8 millions (550 euros) » Durant le hirak de février 2019, Nacer El-Djen et certains de ses acolytes, dont un certain Hocine Boulahya de son vrai nom Hamid Oubelaïd, se sont enfuis en Espagne où ils ont acquis de superbes villas avec l'argent amassé durant la décennie sanglante. Avec l'arrivée du général Chengriha à la tête de l'armée et en homme fort du régime, tous les anciens officiers qui se sont distingués durant la guerre civile par leur monstruosité ont repris du service. Même le colonel Djebbar Mehenna qui purgeait une peine de 8 ans de prison a été élargi au bout de 11 mois et occupe aujourd'hui le poste de Directeur Général de la sécurité Extérieure. Nacer El-Djen se voit même promu au grade de général le 5 juillet 2022. Depuis un peu plus d'une année, il est à la tête du Centre Principal Opérationnel Militaire d'Alger. Un centre qui accueille toutes les personnes arrêtées pour « activité subversive ». C'est-à-dire tous les opposants politiques. Aussi, tous les généraux et officiers supérieurs ou subalternes arrêtés dans le cadre des règlements de comptes et qui remplissent, aujourd'hui, les geôles des prisons militaires passent par ce centre pour une ou plusieurs séances de torture sous la conduite du général Nacer El-Djen. Hier, tous ceux qui connaissent le passé sulfureux de ce général étaient offusqués de le voir siéger au Haut Conseil de Sécurité. Pourtant sa fonction ne lui permet pas d'assister aux réunions de cette instance. Il représentait le directeur de la sécurité intérieure, le général Djamel Mejdoub Kehal, « absent pour raisons de santé ». Pourtant, la veille il était présent à la cérémonie de la passation de consignes à la Direction Générale de la Sûreté Nationale. Pour suppléer le général Mejdoub, Nacer El-Djen a, certainement, bénéficié d'une promotion hiérarchique. Il est, désormais, le numéro 2 de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure. Une promotion obtenue, sans doute aucun, grâce à un coup de pouce du général Djebbar Mehenna avec lequel il constitue un duo en parfaite harmonie. A eux deux, ils symbolisent « l'Algérie nouvelle » promise par le tandem Tebboune-Chengriha.