Depuis quelques jours, le général à la retraite Khaled Nezzar est dans son village natal, Seriana, dans la wilaya de Batna à 500 km à l'Est d'Alger. Son état de santé s'étant gravement détérioré ces derniers temps, il a été invité par un émissaire de Saïd Chengriha à quitter Alger. Agé de 85 ans, l'ex-ministre de la Défense nationale et membre du Haut Comité d'Etat qui a assuré les derniers mois du mandat du président Chadli, démissionné par un quarteron de généraux en janvier 1992, Khaled Nezzar est souffrant. On le dit agonisant. « Il n'y a plus rien à faire pour lui. Il est inutile de l'évacuer à l'étranger. D'ailleurs, il est interdit de quitter le territoire national comme beaucoup d'ex-hauts responsables algériens », confie l'un de ses proches. Sentant sa fin proche, Khaled Nezzar ne pouvait s'opposer à l'invitation qui lui a été transmise par deux émissaires du général Chengriha, l'homme fort du moment, pour quitter Alger et se rendre à Seriana, son village natal pour terminer ce qui lui reste à vivre. Le décès de l'homme le plus honni d'Algérie mettrait dans la gêne le pouvoir actuel. Il lui serait impossible de lui organiser des obsèques dignes de son rang (ancien membre du Haut Conseil d'Etat de 1992 à 1994, ex-ministre de la Défense nationale de 1990 à 1993, ex-chef d'état-major de l'armée de 1988 à 1990). Le pouvoir actuel qui prétend se démarquer de ses prédécesseurs en se présentant comme le bâtisseur de « l'Algérie nouvelle », ne voudrait pas s'attirer davantage d'hostilité du peuple en organisant des funérailles officielles à celui qui laisse derrière lui une procédure judiciaire ouverte au tribunal de Berne en Suisse où il est poursuivi pour « crimes contre l'humanité et crimes de guerre » depuis octobre 2011. Les funérailles du général Nezzar risquent de tourner à l'émeute populaire tant l'homme, même mort, continuerait à susciter un sentiment de haine et de revanche chez ses milliers de victimes des années sanglantes de la guerre civile. Nezzar ne pouvait qu'obtempérer à la demande de l'homme fort d'Alger. Son fils Lotfi, qui craint beaucoup pour son avenir après le départ de son père, s'est montré très conciliant en aidant les émissaires de Saïd Chengriha à le convaincre pour aller mourir loin d'Alger. Frappé, lui aussi, d'une interdiction de sortie du territoire national et poursuivi pour de nombreuses affaires de malversations financières, il y a fort à partir que Lotfi Nezzar ira grossir le peloton des hommes d'affaires qui croupissent derrières les barreaux des différentes prisons d'Algérie pour corruption, fuite de capitaux, enrichissement illicite etc. Du côté des Nezzar, d'habitude le relais médiatique familial « Algérie patriotique », un site d'information qui emploie des plumitifs inconnus dans le monde de la presse, réagit au quart de tour à toute information concernant le général. Cette fois-ci c'est motus et bouche cousue. On a du mal à accepter cette situation de se faire traiter comme un galeux. Un triste sort que Nezzar n'attendait guère mais que lui souhaitaient des millions d'Algériens.