L'ASMEX a organisé, le 12 juillet dernier, un séminaire visant à réfléchir sur les moyens de développer la logistique au sein de la ZLECAF. Depuis l'entrée en vigueur de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), les échanges commerciaux inter-africains peinent à décoller. Un des freins majeurs à son plein déploiement réside dans le manque d'infrastructures logistiques dans plusieurs pays africains. Afin de réfléchir aux moyens de fluidifier les échanges de marchandises, l'Association Marocaine des Exportateurs (ASMEX) a organisé le 12 juillet dernier un séminaire sous le thème "Quelle logistique pour la ZLECAf ?".
«Les projections économiques ont montré que si les pays d'Afrique commercent davantage entre eux, le potentiel de devenir le huitième bloc économique au monde deviendra une réalité. Ceci requiert des actions de fond sur les volets de la compétitivité des exportations des PME, des règles d'origine, des normes techniques et de sécurité des produits, d'accès au financement et de renforcement de capacité des entreprises», a expliqué Hassan Sentissi El Idrissi, président de l'ASMEX.
Barrières non tarifaires
Si la ZLECAf est une promesse de prospérité pour tous les pays concernés, "les barrières non tarifaires s'érigent comme un véritable obstacle, notamment, en ce qui concerne les infrastructures et les transport", a déploré le ministre du Transport et de la Logistique, Mohammed Abdeljalil. Pour dépasser ces contraintes, le ministère du Transport et de la Logistique s'engage de deux manières.
D'abord, au moyen d'accords bilatéraux avec les pays africains. Ces accords permettent aux compagnies de transport routier d'avoir un cadre structuré leur offrant la possibilité de travailler dans les meilleures conditions.
Ensuite, à l'initiative du Royaume, et avec le soutien financier de la BID et technique de la SNTL, une étude a été réalisée afin d'identifier des zones logistiques dans les pays d'Afrique subsaharienne. Ces zones constitueront le noyau d'un futur réseau de plateformes logistiques. "Les résultats ont été partagés il y a quelques mois avec ces pays. Et il faut les encourager pour qu'ils s'engagent dans ce projet", a expliqué le ministre.
Coût logistique
L'autre frein au développement du commerce inter-africain est le coût logistique. "Le volume actuel du commerce intra-africain est estimé à 16% du volume des exportations africaines avec le monde, et au Maroc ces exportations ne représentent que 3,2%, et les importations ne sont que 2,5%", a rappelé Abdelaziz Mantrach, président du Pôle Logistique de l'ASMEX. Des volumes aussi réduits ne permettent pas de tirer les prix du transport vers le bas.
"Les volumes aujourd'hui sur l'Afrique ne sont pas au rendez-vous. Cela explique l'irrégularité des moyens de transport sur ces destinations et la cherté du fret", a expliqué Abdelaziz Mantrach. Avant de poursuivre: "Il faut massifier les volumes. On ne peut pas laisser les uns les autres charger les volumes comme ils veulent d'une manière très éparpillée. Cela nous permettra de faire pression sur les transporteurs et d'essayer de tirer les prix vers le bas, tout en assurant une régularité et une fréquence raisonnable".
Créer des synergies
A l'issue de ce séminaire, et des débats qui ont eu lieu entre les différents professionnels, un comité scientifique a formulé diverses recommandations dans le but d'améliorer et d'optimiser la logistique dans l'espace ZLECAf. Ainsi, ce comité a préconisé d'analyser les flux commerciaux et l'architecture des hubs logistiques dans l'ensemble des pays, afin de donner un cadre de discussions bilatérales et multilatérales à même d'améliorer les synergies et baisser les coûts. Il faut également standardiser les règles fiscales appliquées aux opérations de transport Internationales et les activités annexes dans le cadre du transport international.
Les procédures aux frontières devraient aussi être normalisées et simplifiées pour fluidifier les échanges commerciaux entre les pays africains. Dans ce sens, le comité scientifique recommande de s'inspirer de l'expérience marocaine dans la dématérialisation à travers le guichet unique du commerce extérieur PORTNET. Cette démarche permettra également une meilleure coordination en matière de normes sanitaires et phytosanitaires.
Le Maroc, de par son positionnement géostratégique et ses infrastructures, devrait jouer un rôle clé dans cette chaîne logistique intra-africaine. Il devra ainsi se positionner en tant que hub logistique pour l'Afrique, et renforcer sa coopération dans le domaine de la logistique. Des projets de hubs prioritaires seront identifiés en collaboration avec les institutions étatiques et financières.
Trois questions à Hassan Sentissi El Idrissi "Il est urgent de développer des corridors logistiques entre le Maroc et les pays africains" - Après deux ans de son entrée en vigueur, quel bilan peut-on dresser de la ZLECAf ?
- Pour le moment, il n'y a que six ou sept pays qui profitent de cet accord. Le manque à gagner est énorme. Ainsi, les entreprises marocaines devraient saisir les opportunités et les avantages que pourraient procurer l'accord ZLECAf après sa mise en application. Les projections économiques ont montré que si les pays d'Afrique commercent davantage entre eux, le potentiel de devenir le 8ème bloc économique au monde avec un PIB combiné de trois milliards de dollars, deviendra une réalité et devrait doubler d'ici 2050. Ceci requiert des actions de fond au niveau national et continental pour briser les obstacles critiques rencontrés dans le domaine de l'exportation en Afrique, tels que la compétitivité des PME, les règles d'origine, les normes techniques, l'accès aux différents appuis dans le financement et le renforcement des capacités des entreprises.
La ZLECAf vise à révolutionner le commerce entre les pays d'Afrique, et à stimuler les échanges du continent avec le reste du monde qui demeurent très faibles en raison du manque de capacités des industriels et de la fragmentation des marchés.
- Quelle est l'importance de la logistique dans l'émergence de la ZLECAf ?
- Le transport et la logistique constituent pour les exportateurs un sujet d'intérêt prioritaire et surtout de préoccupation constante. Il est un axe majeur de la compétitivité et du développement du commerce inter-africain. Il est à signaler que les infrastructures logistiques en Afrique sont à améliorer pour réduire les coûts qui constituent actuellement une grande charge pour la compétitivité des produits échangés.
II est à rappeler aussi que l'entrée en application de la ZLECAf devrait permettre aux exportateurs marocains d'exporter leurs produits à des régions qui étaient jusque-là inaccessibles. Pour ce faire, il est urgent de développer des corridors logistiques qui vont relier des ports marocains avec des hubs régionaux logistiques. - Qui est responsable de cet échec, selon vous ? - Incriminer telle ou telle partie ne sert à rien. La démarche consiste surtout à lancer un appel à toutes les parties concernées pour rechercher ensemble des solutions adéquates tant pour résoudre les problèmes de logistique que pour renforcer notre compétitivité sur les marchés e l'Afrique subsaharienne. Ce qui est sûr, c'est que les potentialités sont très grandes et le capital sympathie et incommensurable.