Depuis la création de l'Organisation Mondiale des Douanes en 1952, l'organisation a connu sept Secrétaires Généraux (SG), tous ressortissants des pays riches et développés. Durant cette période, vingt-deux Secrétaires Généraux Adjoints se sont succédé sans aucun ressortissant d'Afrique. Aujourd'hui, le continent convoite ce poste tant désiré. Explications avec Dr Phillipe Kokou Tchodie, candidat de l'Afrique. -L'OMD tient son Assemblée élective pour le Poste de Secrétaire Général ce samedi 24 juin 2023. Quels sont les enjeux pour l'Afrique dans cette responsabilité ? C'est une question importante pour nous car les défis de demain doivent être appréhendés aujourd'hui afin de se préparer pour ces innovations futures où l'Afrique doit être un acteur incontournable dans un monde en perpétuel changement. Dans cette optique, les enjeux pour notre continent concernant le Poste de Secrétaire Général de l'Organisation mondiale des douanes sont nombreux. Il s'agit de renforcer davantage le leadership de l'Afrique à travers des douanes dotées de frontières intelligentes, pour plus d'efficacité opérationnelle dans la durabilité et de coopérations internationales avantageuses afin que les douanes africaines remplissent efficacement leurs trois missions principales que sont : la perception de recettes, la mise en œuvre des politiques commerciale et tarifaire, et le fondement des politiques de concurrence et de développement. Pour ce qui est de la troisième mission, elle concerne la protection. Dans le cas d'espèce, il faut s'assurer du respect des normes de sécurité pour les consommateurs et des droits de propriété intellectuelle, ou en participant à la lutte contre le trafic de drogues et le terrorisme. Ces enjeux peuvent être déclinés en un engagement à consolider et à renforcer les relations avec les parties prenantes afin de faire progresser la réforme fiscale africaine mais aussi l'intégrité, en favorisant la responsabilisation et la transparence grâce à des systèmes adéquats et efficaces de contrôles internes, de gestion des risques et de bonne gouvernance financière. Il en est de même pour l'équité qui s'étend à tous les membres pour accéder à des ressources et à des possibilités d'apprentissage de haute qualité, sans oublier le respect mutuel afin de contribuer à une Afrique consolidée à travers une meilleure compréhension des différentes politiques et réformes fiscales. On ne peut passer sous silence la courtoisie accordée à tous les membres pour s'assurer qu'ils représentent conjointement les intérêts africains à l'échelle internationale en promouvant le fait que le continent parle d'une seule voix des questions fiscales, mais aussi la loyauté envers tous les membres et partenaires de développement pour soutenir continuellement le développement. Le tout dans la diversité et l'inclusion en assurant l'équité, le respect mutuel et la courtoisie dans l'exécution de notre mandat. -Justement, vous êtes le candidat de l'Afrique à ce poste. Comment est-on arrivé au consensus du continent autour de votre pays, le Togo, à travers votre personne ? Il faut rappeler qu'en tant que Président du Conseil de l'African Tax Administration Forum (ATAF) pour un deuxième mandat consécutif depuis 2020, j'ai mis les petits plats dans les grands pour réaliser une prouesse historique en devenant le tout premier candidat du continent à ce poste depuis 1952, date de la création de l'Organisation Mondiale des Douanes. Cette prouesse s'explique, d'une part, par le leadership et le casting gagnant du président de la République, Faure Essozimna Gnassingbé, qui a engagé une diplomatie togolaise agissante pour mobiliser le continent et les partenaires de mon pays derrière ma modeste personne et, d'autre part, à travers mes actions de réformateur et innovateur qui a insufflé une dynamique à la douane togolaise à travers la modernisation, la numérisation des procédures douanières. -Votre candidature revêt une importance capitale d'autant plus que c'est la première fois que l'Afrique postule pour cette responsabilité. Qu'est-ce qui motive ce regain d'intérêt ? Depuis la création de l'OMD en 1952, plus de 70 ans aujourd'hui, l'organisation a connu sept Secrétaires Généraux, tous ressortissants des pays riches et développés. Durant cette période, vingt-deux Secrétaires Généraux Adjoints se sont succédé sans aucun ressortissant d'Afrique. On constate, de toute évidence, un déséquilibre dans la représentativité de la gouvernance de l'institution. En effet, sur l'ensemble des six postes actuels à l'OMD (Président, SG, SGA, et trois Directeurs) ne figure aucun africain.
Cela fait ressortir également le risque de cumul régional au niveau de l'exécutif déjà que le secrétariat général adjoint est pourvu par un pays de la région Amérique. Dans ces conditions, il importe, pour préserver la diversité de l'OMD, de l'ouvrir à une autre région du monde, et qui n'est pas la moindre, qu'est l'Afrique et que ce poste revienne pour une première fois à la région Afrique. L'autre intérêt de ma candidature est que l'Afrique est le continent de l'avenir. En la matière, les indicateurs actuels de l'économie mondiale, les données démographiques, les stratégies régionales et continentales, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), etc. le prouvent. A titre d'exemple, face aux crises économiques et financières mondiales, les économies du continent africain, plus résilientes, déjouent toutes les prévisions. C'est dire que l'Afrique est bien indiquée pour occuper ce poste. -Au-delà de cette candidature africaine, vous êtes aussi celui des Etats attachés à la diversité. Pouvez-vous en dire un peu plus ? Pour plus d'efficacité opérationnelle et de coopérations internationales avantageuses, il est important qu'on vive un peu de diversité dans la gouvernance de l'institution. C'est en ce sens qu'un appel est fait à tous les pays qui sont attachés à cette diversité. -Tout naturellement, votre ambition pour l'OMD est grande et novatrice. Déclinez-nous les principaux axes de votre programme ? Ma vision pour l'OMD est de renforcer davantage l'ancrage de notre organisation commune au plan mondial dans l'efficacité et la complémentarité. Au cours des prochaines années, mon action sera axée sur cinq domaines prioritaires : numérisation des procédures douanières sur le plan mondial, durabilité dans les pratiques, facilitation des échanges commerciaux, renforcement des capacités et des spécificités locales et régionales.
Propos recueillis par Wolondouka SIDIBE Bon à savoir Fort de son expérience dans le système des Nations Unies et de son expertise à la Banque Africaine de Développement ainsi que dans l'administration publique togolaise, Dr Phillipe Kokou Tchodie a largement démontré ses compétences dans la gestion des organisations internationales. Non seulement il possède une vaste expérience dans le domaine des douanes et du commerce, mais sa connaissance de l'économie, des finances publiques et des marchés financiers est réputée. D'ailleurs, les brillants résultats qu'il a atteints au cours de sa carrière ont été reconnus à juste titre. Dans cette optique, et grâce à ses formations pointues dans plusieurs domaines ainsi qu'aux expériences acquises, le candidat de l'Afrique s'engage, une fois élu au poste de secrétaire général de l'OMD, à poursuivre l'œuvre de la consolidation de l'édifice qui unit et rapproche toutes les douanes du monde. Cela passera par des reformes innovantes, le partage de bonnes pratique, le renforcement de capacité pour créer encore une famille plus homogène, une famille au service de nos pays et du monde loin des positionnements stratégiques des groupes ou blocs d'intérêt