Le gouvernement s'apprête à adopter un projet de décret encadrant les élections des Conseils régionaux des pharmaciens d'officine. De quoi satisfaire les syndicats qui contestent la légitimité des Conseils actuels. Détails. Cela fait des années que le feuilleton des élections des pharmaciens dure sans qu'aucune solution ne soit trouvée. Lassés, les syndicats des pharmaciens n'ont eu de cesse de revendiquer la tenue de nouvelles élections du Conseil de l'Ordre des Pharmaciens. Des revendications qui semblent trouver écho chez le gouvernement qui est entré en ligne pour trancher ce problème épineux. L'Exécutif s'apprête à encadrer l'organisation des élections des Conseils régionaux des Pharmaciens d'officine. Ceci sera à l'ordre du jour lors de la prochaine réunion du Conseil de gouvernement qui examinera au début de ses travaux « un projet de décret-loi édictant des dispositions relatives à l'organisation des élections des Conseils régionaux des pharmaciens du Nord et du Sud ». C'est ce qu'a annoncé, lundi, un communiqué du département du chef du gouvernement. Fin d'un marasme ! En adoptant le projet de décret, le gouvernement devrait apaiser les ardeurs des pharmaciens qui placent leurs espoirs dans l'Etat pour mettre fin à une brouille qui dure depuis longtemps. Le Conseil national de l'Ordre des Pharmaciens n'a pas renouvelé ses structures et ses Conseils régionaux depuis 2019. De quoi agacer les pharmaciens syndiqués qui sont allés jusqu'à remettre en cause la légitimité des deux Conseils régionaux des pharmaciens d'officine du Nord et du Sud ainsi que de l'Ordre national des pharmaciens. Force est de rappeler que l'élection des deux Conseils susmentionnés est, aux yeux des professionnels, une condition sine qua non pour avancer vers des élections globales. Si la colère est à son paroxysme, c'est parce qu'il n'y a pas eu d'élections depuis des années. Le Conseil national de l'Ordre n'a pas été renouvelé depuis 2015 tandis que les deux Conseils régionaux ont achevé leurs mandats en 2019. Ceci a fait sortir la Confédération des Syndicats des Pharmaciens au Maroc (CSPM) dans la rue pour manifester. Deux sit-in ont été tenus en janvier, le premier à Rabat et le deuxième à la fin du mois à Casablanca devant le siège du Conseil régional des pharmaciens d'officine du Sud. Les pharmaciens revendiquent une intervention directe de l'Etat à travers le ministère de tutelle. Il est demandé au Département de Khalid Ait Taleb de dissoudre entièrement les Conseils régionaux actuels en vertu de l'article 13 du dahir portant la loin° 1-75-453 de 1976 qui autorise le gouvernement à intervenir. Les syndicats ont appelé le ministère de la Santé à dissoudre les assemblées actuelles en vertu dudit article et à nommer ensuite une commission spéciale provisoire qui soit habilitée à organiser des élections dans les plus brefs délais. Les professionnels jugent qu'il vaut mieux tenir les élections dans un délai maximum de 3 mois à partir de la nomination de la commission. L'origine de la discorde Si nous en sommes là, c'est parce que la réforme de l'Ordre des Pharmaciens traîne depuis longtemps dans les tiroirs de la Chambre des Représentants. Faute d'une entente entre les pharmaciens, le Projet de loi n°98.18 relatif à l'Ordre National des Pharmaciens peine à être voté sachant que le ministère de la Santé a différé le vote de la loi au niveau de la commission des secteurs sociaux. En fait, la pandémie a retardé les discussions du texte qui est soumis aux députés depuis décembre 2019. Le Conseil de l'Ordre juge préférable d'attendre l'aboutissement de la réforme avant de tenir les élections des Conseils régionaux. Ce que récusent catégoriquement les syndicats qui jugent que la réforme peut prendre beaucoup de temps pour achever son circuit législatif. Ce qui est préjudiciable, pensent-ils, pour leurs intérêts du moment que les Conseils actuels ne défendent pas leurs intérêts, n'étant pas des interlocuteurs légaux pour le ministère de la Santé. D'où la nécessité de renouveler les Conseils régionaux le plus vite possible en attendant l'aboutissement de la réforme. Celle-ci introduit des changements majeurs dans la hiérarchie et le mode d'élection du président de l'Ordre, ainsi que des modifications des corps représentatifs de la profession. La composition du Conseil national fait l'objet de plusieurs désaccords entre les professionnels. Entre-temps, le gouvernement devrait adopter le décret qui serait de nature à ouvrir la voie vers les élections des deux Conseils régionaux du Nord et du Sud. Ce qui suscite l'optimisme chez les syndicats.
« Nos revendications ont été entendues » Amine Bouzoubaâ, Secrétaire général de la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc, a répondu à nos questions. -Le gouvernement s'apprête à adopter un projet de décret encadrant les élections des deux Conseils régionaux du Nord et du Sud, est-ce suffisant pour débloquer la situation ? - Nous avons écrit plusieurs fois au Secrétariat général du gouvernement et au ministère de la Santé pour les exhorter à intervenir afin de débloquer la situation. Puis, nous avons tenu des sit-in pour faire valoir publiquement nos revendications et je pense que cela a porté ses fruits du moment que l'Exécutif a annoncé l'examen du projet de décret auquel vous faites référence. Ce déblocage est d'autant plus nécessaire que le ministre de la Santé refuse de parler avec les représentants des Conseils actuels tant que les élections ne sont pas tenues. C'est ce qu'il a dit, d'ailleurs, à la Commission des Secteurs sociaux à la Chambre des Représentants. - Pourquoi les Conseils actuels ne sont-ils plus légitimes pour les syndicats ? - Les deux Conseils de l'Ordre n'ont pas tenu d'élection depuis 2019. Tant qu'ils n'ont pas renouvelé leurs membres, ils demeurent illégitimes et cela ne leur permet pas de défendre les intérêts de la profession auprès du ministère de tutelle et des autres institutions comme le Parlement. Ils ne sont pas des interlocuteurs légitimes vu qu'ils ne sont plus investis d'aucun mandat représentatif. Pour leur part, les pharmaciens ne reconnaissent pas également leur légitimité. - Quels sont les arguments de ceux qui refusent de tenir les élections depuis 2019 ? - En fait, ils avancent des arguments qui sont, à nos yeux, peu plausibles. Ils veulent différer les élections jusqu'au vote final de la Loi relative à la réforme de l'Ordre des Pharmaciens dont on ignore quand elle va aboutir. Il y a des lois qui prennent des années. En attendant la réforme qui prendra certainement beaucoup de temps au Parlement, il vaut mieux travailler avec la loi en vigueur pour renouveler les Conseils régionaux dans les plus brefs délais, et ce, pour le bien de la profession dont la représentativité est paralysée par le blocage actuel.