Comme en témoigne la récente sortie du jeune président français et contrairement à un passé récent, la légendaire duplicité de la France dans ses relations avec le Maroc et l'Algérie semble cette fois-ci plus nuancée qu'auparavant du fait de l'évident tropisme algérien de l'actuel locataire du Palais de l'Elysée, dont la fougue et l'impulsivité ne sont plus un secret pour personne. Macron, en proie à une grave grogne sociale mais désormais affranchi des contingences de la course à la réélection compte tenu du fait qu'il en est à son deuxième et dernier quinquennat présidentiel, espère marquer l'Histoire, notamment celle des relations franco-maghrébines, par un mémorable solde de tout compte du sombre passé colonial de son pays vis-à-vis de la plus meurtrie car la plus longtemps occupée de ses anciennes colonies, l'Algérie. Hasard du calendrier ou vil calcul d'épicier, l'embellie avec l'Algérie, qui ne peut se faire en l'état actuel des choses qu'aux frais de l'ancien protectorat marocain, présente le double avantage d'assurer l'approvisionnement en gaz et en hydrocarbures au beau milieu de l'historique crise énergétique générée par la guerre en Ukraine. En bon banquier d'affaires, Macron n'oublie pas pour autant les conséquents intérêts de la France au Maroc qui présente l'avantage, comparativement à sa voisine l'Algérie, d'un environnement politique et économique de loin plus stable et plus élaboré. D'où sa volonté de ménager la chèvre algérienne et le chou marocain par son jeu raté d'équilibrisme où la balance semble de plus en plus pencher vers l'Algérie. Mais là aussi, dans l'esprit calculateur de Macron, réside un autre double avantage : en contrariant le Maroc et en surjouant l'entente franco-algérienne dont les dernières péripéties au gré de la rocambolesque évasion de la journaliste militante Amira Bouraoui ont démontré toute la fragilité, le Président français cherche également à dissuader, voir même punir, les légitimes ambitions marocaines en Afrique où justement la France ne s'était jamais sentie aussi menacée et indésirée. Ceci alors même qu'il sait pertinemment que c'est désormais peine perdue, puisque la politique marocaine de diversification des partenariats continentaux et internationaux, notamment avec des puissances économiques et militaires comme les Etats Unis d'Amérique, Israël ou la Grande Bretagne, semble irréversible. L'autre source de dépit de Macron c'est que même s'il ne s'aventure pas à l'avouer, il est plus que conscient de l'occasion ratée par son pays sous la présidence du placide François Hollande de sortir du bourbier de l'affaire du Sahara en reconnaissant sa marocanité au cours de la funeste fin de règne de l'ex-président algérien, Abdelaziz Bouteflika. Le regret est d'autant plus indigeste que quelques mois à peine après la disparition de Bouteflika, la France se fera damer le pion dans ce dossier par l'Amérique de Trump, à laquelle succédera, deux années plus tard, l'Espagne de Sanchez. Ne lui reste alors pour se rattraper que d'aller plus loin que ces deux pays et de reconnaître non seulement la marocanité du Sahara occidental, mais aussi celle du Sahara oriental dont la France sait plus que quiconque à qui il appartient réellement. Encore faut-il qu'il le sache et que l'actuelle France en soit capable.