Après avoir mûrement réfléchi, la Banque Centrale a tranché en faveur d'un relèvement du taux directeur à 2%. Un choix modéré, défendu par Abdellatif Jouahri. Son département "n'a pas été dans la démesure" en ajoutant 50 points au taux directeur, argue-t-il. En faisant un tel choix, la Banque Centrale tranche un débat de longue haleine qui oppose les économistes, qu'on entendait intervenir sans cesse dans les médias pour donner leurs avis. Les uns jugent évidente la hausse du taux pour maîtriser une inflation galopante, d'autres se montrent plus réticents et avancent l'argument de l'impact d'une telle décision sur la croissance en évoquant le modèle turc. Sur ce point, le patron de Bank Al-Maghrib ne tarit pas d'arguments. À ses yeux, la Banque Centrale n'a pas vocation à soutenir la croissance mais à maîtriser l'inflation qui risque d'échapper au contrôle en franchissant la barre des 10%. Un argument qu'il n'a eu de cesse d'opposer aux adeptes du libéralisme et de l'inflation maîtrisée, voir débridée, comme potentielle courroie de la croissance. Le contre-argument de la croissance est tout de même pris au sérieux par Abdellatif Jouahri qui a rassuré tout le monde. 2% de taux directeur ne devrait affecter la croissance du PIB qu'à hauteur de 0,2% au pire des cas. Pour Bank Al- Maghrib, 2% c'est le moindre mal. Il va sans dire que quand l'argent coûte cher, il circule moins vite, au risque d'affaiblir la demande, sachant que le gouvernement est engagé dans une politique de relance par l'investissement public qui a atteint un record en 2022 (245 MMDH). Dans la tête de Jouahri, les rôles du gouvernement et de la Banque Centrale sont différents mais complémentaires. L'Exécutif booste le pouvoir d'achat tandis que BAM restreint légèrement le crédit. Le débat reste encore ouvert au moment où on manque de visibilité sur la courbe de l'inflation à moyen et long termes. Anass MACHLOUKH