Le nouveau projet de la Constitution tunisienne viendrait renforcer, selon plus d'un observateur, les pouvoirs du chef de l'Etat, ajoutant aux inquiétudes des critiques de Kais Saied selon lesquelles il vise à consolider l'autocratie. La nouvelle Constitution proposée par la Tunisie consolide de manière notoire les pouvoirs du chef de l'Etat, attisant les appréhensions auprès des opposants, au président Saied, qui soutiennent que le nouveau texte de la loi suprême vise à consolider l'autocratie et à balayer les acquis démocratiques obtenus lors du soulèvement de 2011. Néanmoins, par frustration après des années de paralysie politique et de querelles intestines, de nombreux Tunisiens ont salué les mesures prises par Saïd pour abandonner l'ancien régime de partage du pouvoir entre le parlement et le président. Fait notoire dans le projet de la nouvelle Constitution, il n'est plus question de pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire), mais de fonctions législative, exécutive et judiciaire. La Constitution de 2022 qui sera soumise le 25 juillet prochain à une consultation référendaire évoque les principes généraux dans son chapitre I, et les droits et libertés dans son chapitre II. Fonctions législative, exécutive Le chapitre 3 du projet de la nouvelle Constitution rendue publique hier, en vertu du décret présidentiel n'o 578 du 30 Juin 2022 paru la veille au soir au Journal officiel, est consacré à la fonction législative, qui repose désormais sur un régime bicaméral. Selon l'article 56, le peuple souverain délègue la fonction législative a une assemblée parlementaire, appelée « Assemblé des représentants du peuple », et à une deuxième assemblée parlementaire, appelée « Assemblée générale des régions et des districts ». Le chapitre 5 est dédié à la fonction judiciaire et stipule dans son article 117 que « La magistrature est une fonction indépendante, exercée par les magistrats, sans aucun pouvoir autre que la loi ». « Les jugements sont émis au nom du peuple, et mis en exécution au nom du président de la république », précise l'article 118. « La nomination des magistrats se fait par décret présidentiel, sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature concerné », d'après l'article 120. Le chapitre six est dédié à la Cour constitutionnelle, « une instance judiciaire indépendante composée de 09 membres », selon l'article 125. Les membres de la Cour constitutionnelle, dont son président, sont élus, conformément à la loi. Le chapitre 4 est dédié à la fonction exécutive, laquelle est exercée, selon l'article 87, par « le président de la république, avec l'aide du gouvernement dirigé par un chef du gouvernement ». L'article 88 stipule que « le président de la république est le chef de l'Etat, et sa religion est l'Islam». « La candidature à la présidence de la république est un droit pour chaque Tunisien, n'ayant pas une autre nationalité, de père, de mère et de grands-parents tunisiens, et devra être âgé de 40 ans au moins », selon l'article 89. « Le président de la république est élu au suffrage universel direct, pour un mandat de cinq ans » renouvelable une seule fois. Un gouvernement conforme aux orientations et aux choix du président En vertu de l'article 111, « le gouvernement veille à la mise en oeuvre des politiques de l'Etat, conformément aux orientations et aux choix fixés par le président de la république ». « Le gouvernement est responsable devant le chef de l'Etat », selon l'article 112. « Les deux chambres réunies, l'Assemblée des représentants du peuple et l'Assemblée des régions peuvent présenter une motion de censure contre le gouvernement », selon l'article 115. L'article 101 stipule que c'est le président qui nomme le Premier ministre et les membres du gouvernement, sur proposition du Premier ministre, en rupture avec le système actuel qui donne au parlement un rôle majeur dans la sélection des gouvernements. L'article 112 stipule que le gouvernement est responsable devant le président, tandis que l'article 87 stipule que le président exerce des fonctions exécutives avec l'aide du gouvernement. L'article 102 donne également au président le pouvoir de révoquer le gouvernement ou l'un de ses membres. Pour que le Parlement puisse destituer le gouvernement, il faut que les deux tiers de la Chambre des représentants approuvent un vote de défiance à son encontre, selon l'article 115, une marge supérieure à la majorité simple actuellement requise. L'article 116 stipule que si un deuxième vote de défiance a lieu au cours de la même session parlementaire, le président peut soit accepter la démission du gouvernement, soit dissoudre le parlement, ce qui signifie de nouvelles élections.
Libre choix des adhérents de l'UGTT de participer au référendum constitutionnel
L'Union générale tunisienne du travail (UGTT - centrale syndicale) a annoncé, samedi, laisser le libre choix à ses adhérents de participer ou pas au référendum prévu le 25 juillet courant, sur le projet de la nouvelle Constitution. C'est ce qui ressort d'une allocution prononcée par le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi à l'issue de la réunion de la commission administrative de l'UGTT dans la capitale Tunis. Taboubi a indiqué que « compte tenu de la diversité qui caractérise l'UGTT et la famille syndicale, la centrale syndicale a décidé de déléguer à chacun et à ceux qui partagent nos visées, la liberté de choisir et de participer au référendum ou pas ». « Dans le projet de la nouvelle Constitution, il y a des aspects positifs, s'agissant du chapitre réservé aux droits et aux libertés, qui existait également dans la Constitution de 2014 », a-t-il dit. Il a ajouté que « la nouvelle Constitution comporte également des lacunes à l'instar de la concentration du pouvoir entre les mains d'une seule personne (en allusion au président Kaïs Saïed) et de l'absence de toute mention du caractère civil de l'Etat ». Le projet de la nouvelle Constitution a été publié au Journal officiel de la République tunisienne du 30 juin 2022, sur fond de scissions relatives à la participation ou pas au référendum du 25 juillet courant.