Les services de sécurité ont réussi à démanteler la cellule responsable de l'attentat de Marrakech et à en arrêter les membres. Ceux-ci n'avaient pas de lien organisationnel avec Al Qaïda, mais se sentaient proches de ce mouvement, adeptes de son idéologie. Le mot est lâché, idéologie. Si les menaces externes existent bel et bien, si le Maroc est un pays ciblé par le terrorisme international, notre société est menacée par un terrorisme domestique. L'approche sécuritaire à elle seule n'arrivera pas à éradiquer le phénomène. Le sentiment de marginalisation crée un terreau fertile, mais ce n'est pas tout. Le discours de la haine transforme des frustrations individuelles, des pertes de repères identitaires en rage destructrice, barbare. Ce discours «takfiriste» est plus que dangereux. Ce que l'on a appelé la mise à niveau du champ religieux, ne l'a pas empêché de prospérer. La Salafiya Jihadiya véhicule de manière ostentatoire l'incitation à la violence. Il est inévitable que des individus, formatés par cette idéologie passent à l'acte. La complaisance vis-à-vis de cette idéologie est suicidaire. Ce n'est pas un appel à une répression de masse, mais à un sursaut national pour lutter efficacement contre la barbarie. L'école est un premier champ de bataille. Or, le ministre de l'Education nationale a reconnu devant le parlement que l'école publique agonise. Cela fait partie du terreau fertile. Si l'école ne transmet plus les lumières du savoir, ne forme plus à la citoyenneté, alors l'obscurantisme a de beaux jours devant lui. La complaisance avec l'idéologie de la haine traverse l'ensemble de la société marocaine. Les intellectuels qui avaient réagi au lendemain du 16 mai, qualifiés d'éradicateurs, ont été isolés. La classe politique dans son ensemble préfère ignorer le problème, ou suggérer la thèse misérabiliste pour l'expliquer parfois, le justifier souvent. Ainsi la libération des théoriciens du mouvement de la salafiya a été célébrée comme une victoire de la démocratie et non comme la correction des abus qui ont suivi le 16 mai. La théorie du complot s'affiche avec une facilité déconcertante, qui démontre l'étendue du problème. La société marocaine ne développe pas l'anticorps et n'assimile même pas la menace comme étant réelle et sortie de ses entrailles. Il ne suffit pas de dénoncer le terrorisme pour le combattre, il faut en assécher les sources. Dans le cadre de l'Etat de droit, en respectant les droits et libertés des individus, cela va de soi. La pensée Jihadiste tombe sous le coup des lois parce qu'elle incite à la violence, à l'intolérance. La vigilance nous impose tous de la combattre et non pas l'accepter comme une expression du pluralisme.