On savait que Kidal, le fief des Touaregs des Ifoghas, au nord du Mali, était une cocotte-minute. Le 17 mai, elle a de nouveau explosé. Est-ce si surprenant ? Le Mouvement national de libération de l'Azawad, le MNLA, est originaire de Kidal, seule région du Mali où les Touaregs sont majoritaires alors qu'ils ne constituent qu'entre 10 % et 15% de la population malienne. Mais ces Touaregs aux pulsions irrédentistes initiateurs de nombreuses rebellions au nord du pays depuis l'indépendance en 1962, ne sont jamais totalement rentrés dans le rang. Le MNLA a été le premier à prendre les armes contre l'armée malienne en janvier 2012, le premier à entrer dans Kidal, puis Gao et Tombouctou, avant d'être supplanté par les groupes djihadistes (Aqmi et Mujao). Le MNLA a proclamé l'indépendance de l'Azawad (une région qui va bien au-delà de celle de Kidal dans le nord du Mali) au printemps 2012, puis a continué à la revendiquer à voix basse tandis qu'il demandait à voix haute une large autonomie culturelle et économique dans un cadre fédéral. Une solution que Bamako exclut. Le 18 juin dernier, le MNLA et le gouvernement malien ont signé un « préaccord » à Ouagadougou, prévoyant l'ouverture d'un dialogue soixante jours après l'installation du nouveau président malien, soit début octobre 2013. Le dialogue n'a jamais été ouvert pas Bamako. Le nouveau chef de l'Etat, Ibrahim Babacar Keita (IBK) originaire du sud du pays, a traîné les pieds. Et les combattants du MNLA présents à Kidal ont été cantonnés mais jamais désarmés. En septembre dernier, Kidal s'est enflammé une première fois. Militaires maliens et hommes du MNLA se sont affrontés à l'arme lourde tandis que les 100 militaires français de Serval et les Africains de la Minusma (forces des nations Unies) tentaient de les séparer. Les Touaregs, accusant les Maliens de ne pas respecter les accords de Ouagadougou, ont rompu les négociations et empêché le Premier ministre malien de venir à Kidal en novembre 2013. Le week-end passé, son successeur, Moussa Mara, a décidé de passer en force. Le 17 mai, il a débarqué à Kidal sans réelle préparation de sa visite. Des femmes et des enfants ont manifesté sur l'aéroport pour l'empêcher d'atterrir. Les soldats maliens ont-ils tiré sur les civils ? La ville s'est enflammée. Bilan : une quarantaine de morts civils et militaires au total, de nombreux blessés. Le MNLA s'est emparé d'une trentaine d'otages, y compris du préfet, considérés comme des « prisonniers politiques ». Ils seront libérés au bout de 24 heures. Bamako accuse la Minusma et Serval de ne pas assurer l'ordre à Kidal. Les Français répliquent qu'ils sont au nord du Mali pour y empêcher le retour des groupes djihadistes et non pour intervenir dans les questions inter-maliennes. Il leur est d'autant plus difficile de tirer sur les hommes du MNLA que ceux-ci les ont aidé, l'année dernière, à combattre les salafistes. Une alliance ponctuelle qui ne plait guère à Bamako. Seul point positif : les Maliens viennent d'envoyer 1500 soldats supplémentaires à Kidal, pour montrer leur volonté de s'y réinstaller. La France repousse la réorganisation de son dispositif au Sahel qui prévoyait de ne laisser que 1000 hommes sur 3000, au Mali. Reste à convaincre Bamako de relancer des négociations avec le MNLA. Sans elles, la paix sera un vain mot ❚