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Violence numérique. Plaidoyer pour une loi spécifique
Publié dans L'observateur du Maroc le 15 - 05 - 2024


Viol virtuel
" C'est l'histoire de l'une des filles qui ont été prises en charge par une structure associative. Encore mineure, elle s'est fiancée avec un homme qui vivait à l'étranger. Ce dernier l'exploitait sexuellement à distance. Comment cela ? Il a commencé par lui demander des photos "compromettantes" avec lesquelles il a commencé à la menacer et à la faire chanter. Il filmait la jeune fille en lui demandant de s'auto-violer avec des objets.
De cette manière, il a réalisé plus de 80 vidéos qu'il postait et vendait à des sites pornographiques à l'étranger ", nous raconte au téléphone Bouchra Abdou, directrice de l'Association Tahadi pour l'égalité et la citoyeneté (ATEC). Un récit parmi des centaines d'autres relatant les déboires des victimes de cyber-violence.
Selon une enquête réalisée par ATEC en 2019 sur la violence numérique, 87 % des femmes victimes de violence numérique ont pensé au suicide, 20 % sont passées à l'acte sans succès et une femme s'est donné effectivement la mort après avoir subi une cyber-attaque. Seulement 34 % des femmes et des filles marocaines ayant subi des cyber-attaques ont pu briser le silence et dénoncer la violence numérique auprès de la police ou auprès de leurs proches. Tandis que 66% n'en ont jamais parlé à qui que ce soit. Elles ont préféré affronter leur calvaire seules et sans défense.
Phénomène en expansion
Gagnant du terrain, la violence numérique et électronique représente désormais 19 % de toutes les formes de violence à l'égard des femmes. Un chiffre qui reste assez relatif et à revoir à la hausse vu la loi du silence qui pèse sur ce type d'affaires et empêche les victimes de dénoncer leurs bourreaux. Ce pourcentage monte toutefois en flèche pour les filles âgées de 15 à 19 ans pour atteindre 34 % et 28 % chez les jeunes femmes âgées de 20 à 24 ans.
87 % des femmes victimes de violence numérique ont pensé au suicide, 20 % sont passées à l'acte sans succès
Touchant près de 1,5 million de femmes selon le rapport du HCP, les « voies » de la cyber-violence se multiplient et diffèrent. Via e-mails, appels téléphoniques ou SMS ou encore par messagerie sur les réseaux sociaux ... L'incidence de ce type de violence est nettement plus élevée chez les jeunes femmes (29 %), les diplômées de l'enseignement supérieur (25 %), les femmes seules (30 %) et les étudiant(e)s (36 %).
Femmes, " proies faciles "
Enorme ? Certes, mais les chiffres révélés par les rares études réalisées au niveau national restent loin de la réalité de la violence électronique. " Ce phénomène ne cesse de s'amplifier. Le développement rapide du domaine numérique, ainsi que la propagation rapide des téléphones mobiles et autres équipements numériques ainsi que les réseaux sociaux et autre intelligence artificielle tout ça conduit à l'émergence d'un nouveau type de violence aussi dangereux que les autres si ce n'est plus", alerte Bouchra Abdou.
Les réseaux sociaux, un terrain de chasse pour les prédateurs sexuels
Cibles privilégiées de la violence numérique, les femmes et les filles seraient selon les statistiques et les études nationales et internationales, " une proie facile pour les agresseurs " comme décrit Bouchra Abdou qui insiste sur l'aspect international du phénomène. " C'est un problème mondial qui a de graves conséquences sur les sociétés et les économies en temps normal ou pendant les périodes de crises et de catastrophes ", spécifie la directrice d'ATEC.
Une loi spécifique
Un danger que seule une loi spécifique, une application rigoureuse des textes et une sensibilisation continue sont capables de contrer comme on l'estime à l'association active auprès des femmes victimes de violence. " Nous avons donc choisi de présenter une proposition de loi globale qui servirait de référence aux professionnels tout en mettant fin à la dispersion et aux faiblesses des textes juridiques existants ", nous explique la responsable d'ATEC.
La proposition de loi a été élaborée en concertation avec des consultants, des juristes, des avocats, des sociologues, des psychiatres, des professeurs universitaires, des juges et surtout des assistantes sociales. " Ces dernières sont en contact direct avec la réalité et le vécu des victimes et des cas de violences numériques. Un diagnostic en direct du terrain qui met en évidence le danger et le degré d'aggravation du phénomène, mais aussi la faiblesse des réponses actuelles des systèmes juridiques et institutionnels", note Bouchra Abdou.
Ainsi , la proposition se présente sous forme de 40 articles répartis en 8 chapitres, couvrant les dispositions générales, la prévention, l'aspect injonctif, les sanctions, la protection et la réparation la responsabilité des fournisseurs de services et des entreprises de télécommunications et des dispositions finales.
Un diagnostic en direct du terrain qui met en évidence le danger et le degré d'aggravation du phénomène, mais aussi la faiblesse des réponses actuelles des systèmes juridiques
La prochaine étape ? " Ce plaidoyer sera porté par l'ATEC auprès des différentes formations et partis politiques dès aujourd'hui et jusqu'en 2027. Objectif ? Présenter ce projet de loi au parlement et le défendre auprès des représentants de la nation ", explique Abdou. En parallèle, une pétition en ligne sera lancée pour recueillir les signatures des citoyens afin de renforcer la position de ce plaidoyer auprès des décideurs.
Dispositions phares
Les articles 15, 20 et 21 restent des dispositions phares des plus marquantes de cette proposition de loi. L'article 15 définit en effet le concept de viol numérique. Une nouveauté ! Il stipule qu'il est considéré comme viol numérique toute contrainte exercée sur autrui pour accomplir des actes sexuels ou de nature sexuelle dans l'espace numérique. Le viol numérique est puni d'une peine d'emprisonnement de cinq à dix ans et d'une amende de 2.000 à 200.000 dirhams.
Dans l'article 20, la nouvelle loi assure la non-criminalisation des dénonciatrices de violence numérique. Selon cet article " Une victime de violence numérique ne peut être tenue responsable pénalement ou civilement pour tout acte qu'elle a commis sous la menace ". Une loi qui vient en riposte au controversé article 490 du Code pénal qui paradoxalement incrimine les victimes d'abus sexuels.
Toujours dans ce sens, l'article 21 vient pour assurer la protection des victimes, mais aussi des témoins et des personnes dénonçant une violence numérique. " Est puni d'emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 2.000 à 200.000 dirhams quiconque utilise la violence ou menace de l'utiliser, ou promet un avantage pour empêcher une personne de témoigner ou de fournir des preuves, ou l'incite à faire un faux témoignage, à s'abstenir de fournir des preuves, ou à fournir des déclarations ou des preuves incorrectes concernant un crime de violence numérique devant toute autorité compétente, et à toute étape de la procédure judiciaire relative à ce crime ", stipule l'article 21.
La loi 103.13, insuffisante ?
La fameuse loi 103.13 relative à la lutte contre la violence à l'égard des femmes, ne serait-elle pas suffisante ? Où cette loi a-t-elle failli ? D'après les initiateurs de ce plaidoyer, la loi 103.13 a créé un cadre conceptuel avancé définissant les formes de violence à l'égard des femmes, y compris la violence physique, psychologique, économique et sexuelle, mais a omis de définir la violence numérique en général, et la violence numérique contre les femmes et les filles en particulier. " Un vide qui laisse beaucoup de flou et ne donne pas les outils aux magistrats pour qualifier ce type de crimes ", note Abdou.
D'après cette dernière, le bilan des cinq années d'application de cette loi a révélé la persistance d'obstacles juridiques et institutionnels empêchant les survivants de ces violences numériques d'accéder au droit et aux recours de la justice. Les causes ? Les textes juridiques relatifs aux délits numériques restent éparpillés entre plusieurs articles du Code pénal, aussi les définitions inexactes et l'absence de criminalisation de tous les actes de violence numérique permettant parfois aux auteurs d'échapper à toute sanction ou d'écoper de peines légères.
" Il y a aussi la possibilité paradoxale de criminaliser les survivants des violences numériques s'ils recourent au signalement et l'absence d'exigences légales encourageant le signalement des délits de violence numérique ", énumère la directrice d'ATEC. Cette loi permettra également de définir les responsabilités des fournisseurs de services et des entreprises de télécommunications et remédiera à l'absence de la coopération internationale dans la lutte contre les crimes de violence numérique transfrontaliers, conclut-on auprès de Tahadi.


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