Arrêtés en flagrant délit, les suspects ont été surpris, samedi dernier, par la police alors qu'ils pratiquaient un avortement sur une femme à l'intérieur d'un appartement appartenant à l'infirmier. Ce dernier a été par ailleurs identifié, par les enquêteurs, comme le principal suspect dans cette affaire. Cette opération a été menée conjointement par les éléments de la police judiciaire et les services de la Direction générale de surveillance du territoire (DGST). La femme qui subissait cet avortement illégal a été transférée par la suite à l'hôpital pour recevoir les soins nécessaires tandis que les trois suspects arrêtés ont été placés en garde à vue à la disposition de l'enquête judiciaire menée sous la supervision du parquet compétent. Ceci dans l'objectif de déterminer les circonstances et les ramifications de ces actes criminels, indique une source sécuritaire. Les perquisitions menées dans l'appartement où se déroulait l'avortement illégal, ont permis de saisir du matériel médical, des médicaments, des injections et une somme d'argent ainsi qu'un chèque au nom de la personne ayant subi l'avortement, ajoute la même source. Avortement clandestin, l'hémorragie On recense 800 avortements par jour au Maroc, dont 200 pratiqués dans des cabinets médicaux, indique en janvier dernier Khalid Aït Taleb, le ministre de la Santé. S'exprimant au parlement, ce dernier a indiqué que son département reste " intransigeant à l'égard des professionnels de santé qui pratiquent des avortements clandestins ". Véritable danger pour la vie et la sécurité des femmes, l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la clandestinité est à l'origine de plusieurs drames. De 600 à 800 avortements (voire plus ) sont clandestinement pratiqués chaque jour au Maroc. Si les chiffres officiels évoquent quelque 200 IVG pratiquées chaque jour dans des cabinets médicaux, les associations féministes estiment, elles, que ces chiffres sont bien loin de la réalité. D'après ces dernières, de 600 à 800 avortements (voire plus ) sont clandestinement pratiqués chaque jour au Maroc. Après le décès tragique de la petite Meriem (14 ans) en septembre 2023, le débat social houleux à propos du droit à l'avortement a repris de plus belle au parlement, sur la place publique comme sur les réseaux sociaux. " Un nouveau drame qui était pourtant évitable si la loi marocaine n'incrimine pas l'avortement », s'insurgeait alors la Fédération des ligues des droits des femmes dans un communiqué rendu public jeudi 9 février 2023. Loi et réforme Insistant sur le droit et la liberté de choix des femmes, la fédération rappelle que la décision d'avorter est une affaire personnelle qui peut être motivée par plusieurs raisons mais qui peut sauver des vies et éviter des destins tragiques. Au-delà du droit à un avortement médicalisé sécurisé, la FLDF a renouvelé ses doléances par rapport au respect des libertés individuelles comme premier pas dans cette réforme. L'article 490 est considéré comme la source du mal par les défenseurs des droits humains car incriminant les relations hors mariage. Il constitue l'un des obstacles majeurs à la légalisation de l'avortement « Une réforme du Code pénal s'impose en urgence avec une reconsidération des libertés individuelles et la dépénalisation des relations hors mariage », insiste-t-on auprès de la fédération qui pointe du doigt l'article 490. Cette loi est considérée comme la source du mal par les défenseurs des droits humains. Incriminant les relations hors mariage, il constitue l'un des obstacles majeurs à la légalisation de l'avortement selon ces activistes. Légalisation en suspens Pour rappel, l'avortement est criminalisé par la législation marocaine. Il est autorisé uniquement dans le cas d'une grossesse menaçant la vie de la mère, comme stipulé par l'article 453. Dans le cas contraire, le Code pénal préconise un emprisonnement de six mois à deux ans et d'une amende de 120 à 500 dirhams pour toute femme « qui s'est intentionnellement fait avorter ou a tenté de le faire ou qui a consenti à faire usage de moyens à elle indiqués ou administrés à cet effet » et à toute personne ayant contribué par quelconques manœuvres ou pratiques (articles 454-458), y compris les professionnels de santé. Déjà en 2016, un projet de loi a été présenté en faveur de l'élargissement de l'accès à l'avortement pour englober les cas de grossesses issues de viol et d'inceste ou de fœtus présentant des malformations congénitales. Un projet qui a été retiré par la suite à cause de la grande polémique qu'il avait provoquée.