La finale de la Coupe du Trône qui a vu l'AS FAR décrocher une précieuse victoire face au Moghreb de Tétouan, n'y a échappé. Aussitôt le match terminé, samedi 14 mai, des actes de violence ont éclaté à l'extérieur du Grand Stade d'Agadir, au moment où les supporters des militaires s'apprêtaient à partir. Tandis que les fans du Moghreb de Tétouan avaient quitté les lieux dans le calme, des supporters du Hassania d'Agadir, venus soutenir le MAT, ont commencé à attaquer les voitures des supporters de l'AS FAR et celles des passants par des jets de pierres. Des agressions et des actes violents qui n'ont cessé qu'à la sortie de la ville d'Agadir. Les vidéos et autres photos prises sur place font état de pertes matérielles considérables et de voitures gravement endommagées par un caillassage ciblé. Scénario à répétition Le lendemain, dimanche 15 mai 2022, cette fois-ci à Khouribga. Mêmes scènes de violence cette fois-ci interprétées par les supporters du Raja de Casablanca. En colère après la défaite de leur équipe face au Rapide Oued Zem (0-1), lors du match comptant pour la 24e journée de la Botola, les supporters rajaouis se sont livrés à un large caillassage de la ville. Encore une fois, les images dévoilent les dégâts du hooliganisme : Des magasins vandalisés, des voitures caillassées, des maisons aux vitres brisées, des biens endommagés sans parler de la terreur des personnes résidant à proximité du stade Al Phosphate, surprises par ces éclats. N'échappant guère à la déferlante de violences, un arbitre assistant a été visé par un projectile et blessé à la tête au cours même de la rencontre. Des événements qui rappellent ceux survenus il y a quelques semaines en marge du match opposant l'AS FAR au MAS ou encore « la boucherie » du mercredi noir, le 12 février 2020 ayant eu lieu au stade Moulay Abdellah à Rabat, suite à la rencontre réunissant le Raja de Casablanca et l'AS FAR. Fanatisme sportif Comment peut-on basculer aussi facilement d'une ambiance festive à une démonstration grandeur nature de fanatisme sportif ? « La violence observée dans nos rues, nos établissements, nos stades de football ou dans notre espace public en général pourrait être analysée comme une régression vers des modes d'expression archaïques et infantiles qui fragilisent la cohésion sociale » explique le sociologue Khalid Hanefioui. « Ce phénomène pourrait être compris comme le signe et la conséquence d'une crise sociale : Crise culturelle, crise économique, crise de valeurs, crise identitaire et crise du modèle politique » analyse le sociologue. Posted by Ridouane Erramdani on Monday, May 16, 2022 Une crise multidimensionnelle qui semble affecter particulièrement la jeune population des stades. En mal d'espace d'expression et de pistes pour canaliser une énergie débordante et souvent inexploitée, un bon nombre de supporters trouvent leur « bonheur » dans les stades, parmi une foule aux mêmes référentiels, animée de la même passion et des mêmes préoccupations. « Les supporters se présentent toujours comme apolitiques mais le football au Maroc est devenu un lieu d'expression de l'errance socio-économique des jeunes exclus de la société » analyse Abderrahim Bourkia, journaliste, sociologue et auteur du livre « Des ultras dans la ville ». D'après le chercheur, « le « supporterisme » serait un moyen d'expression, de protestation et surtout le cadre d'une construction identitaire. Une manière d'exprimer un désir de paraître, d'exister et d'être reconnus au sein d'une société dont ils se sentent plutôt exclus ». Une description qui nous rapproche un peu de l'état d'âme d'une jeunesse croulant sous le poids d'un mal-être tenace et qui se réalise, en quelque sorte, à travers les victoires de ses équipes préférées. S'y identifiant à fond, toute défaite, toute « atteinte », toute « accusation » est ainsi considérée comme une attaque personnelle, une attaque directe à l'amour propre d'un jeune en mal de repères.