Colère à tous les étages La grogne des blouses blanches n'est pas prête de s'apaiser. Après une grève de deux jours fin avril, les infirmiers récidivent ces 25 et 26 mai. N'arrangeant nullement la situation pour le ministère de la santé, les médecins se joignent au mouvement de protestation et mènent simultanément une grève de 48 heures. Ainsi médecins, pharmaciens et chirurgiens dentistes du secteur public marocain mènent leur fronde dans tous les établissements sanitaires du Royaume, à l'exception des services de réanimation et de soins intensifs. Grève de 48h, sit-in devant le ministère de la santé et des Finances et marche... autant d'actions revendicatives qui ont pour objectif d'améliorer la situation salariale, le système de rémunération et les conditions du travail des médecins en général. Blouses noires « Le gouvernement a opté pour le silence et a choisi de renier ses responsabilités, plutôt que de traiter positivement le dossier des médecins, pharmaciens et chirurgiens dentistes, ignorant ainsi la situation catastrophique et l'effondrement du secteur de la santé dans notre pays », dénonce le Syndicat indépendant des médecins du secteur public au Maroc, coordinateur de cette grève, dans un communiqué expliquant ses motivations. En invitant les grévistes à porter une blouse noire et un brassard 509, le syndicat met l'accent sur l'une des ses revendications majeures : La révision de l'indice salarial 509. Outre l'amélioration de leurs conditions financières, les médecins annoncent leur boycott des campagnes chirurgicales. Qualifiées « d'aléatoires », les médecins affirment que ces campagnes ne respectent ni les normes médicales et administratives minimales ni les conditions de sécurité des patients. Toujours sur le mode boycott, le syndicat a appelé ses affilés à refuser les cachets médicaux, de l'autopsie, des caravanes médicales et de tout travail administratif non médical (rapports, statistiques...). Pas de travail le samedi... Au-delà des revendications salariales, les médecins réclament l'application des conditions scientifiques nécessaires pour la pratique médicale et les conditions de stérilisation au sein des établissements de santé et des blocs opératoires. Aussi, le syndicat réaffirme son engagement à réussir la campagne de vaccination nationale anti-Covid-19, à condition de travailler uniquement, pendant les cinq jours ouvrables et légaux de la semaine, du lundi au vendredi. Même réclamation de la part des infirmiers qui appellent le ministère de la Santé à mettre fin au travail du samedi dans les stations de vaccination, « afin de préserver l'énergie des équipes, de ménager leurs forces et de leur offrir un moment de répit au bout de plus d'une année de travail acharné sur tous les fronts de lutte contre la pandémie », réclame Hamza Ibrahimi, responsable communication du Syndicat marocain de la santé publique. Appelant à préserver l'efficacité des ressources humaines, le syndicat a déjà adressé, à la tutelle, une correspondance dans ce même sens. Dernier recours Après une première grève menée les 29 et 30 avril 2021, les infirmiers, ne voyant pas leur requêtes satisfaites, sont revenus à la charge aujourd'hui comme l'ont promis le mois dernier. Annoncée par le Mouvement des infirmiers et des techniciens du Maroc (MITM), cette grève nationale serait selon ses initiateurs un dernier recours. « Depuis le début, nous avons toujours considéré les circonstances actuelles liées à la crise sanitaire et à la pandémie. Mais aujourd'hui nous sommes obligés de mener ces grèves nationales pour dénoncer une situation devenue insoutenable et intolérable », nous explique auparavant Fatim Zahra Belline, coordinatrice de la cellule communication et presse du Mouvement des infirmiers et des techniciens de santé du Maroc (MITM). Soutenu par les différents représentants syndicaux, le Mouvement rappelle les revendications principales des infirmiers et des techniciens de santé. Mettant la pression sur la tutelle via ces grèves à répétition, les infirmiers réclament « la restitution à la profession sa valeur et son indépendance », comme le proclame la porte parole du MITM. Dans la ligne de mire des protestataires, la loi 43-13 relative à l'exercice des professions infirmières dont les décrets d'application ont été homologués par le Conseil du gouvernement au début du mois d'avril. Cet Ordre qui n'arrive pas En grogne contre les lois régissant la profession, les infirmiers réclament la mise en place urgente de l'Ordre des infirmiers tout en rejetant la tutelle controversée des médecins... Un tas de revendications qui s'ajoutent au dialogue social qui coince et la situation critique des infirmiers surtout après le déclenchement de la pandémie du Covid-19. A cran à cause de la grande charge du travail, de leur privation de congé depuis plus d'un an et de la grande pénurie des ressources humaines, les infirmiers ne sont pas arrivés à avaler la pilule lorsque la loi a imposé la tutelle des médecins. Une condition sine qua non pour avoir l'autorisation de pratiquer la profession au privé. « Les infirmiers réclament l'indépendance de leur profession et refuse la tutelle des médecins lorsqu'il s'agit d'accorder l'autorisation pour pratiquer le métier en libéral », nous explique Mustapha Jâa, chercheur en Droit de santé. Après le succès de la grève d'avril qui a enregistré un taux de participation de 80%, comme l'affirme alors Hamza Ibrahimi, cette nouvelle fronde fera-t-elle enfin entendre la voix des infirmiers et des médecins auprès de la tutelle ? A suivre !