JUSTICE Le code pénal marocain fête ses 50 ans d'existence avec le procès embarrassant des trois adolescents de Nador. Ce texte est-il dépassé ? Décryptage. Le Code pénal n'est pas conforme à la constitution de 2011 et aux conventions internationales ratifiées par le Maroc», lance d'entrée de jeu Me Khadija Rougani, membre du Printemps de la dignité, collectif composé de vingt deux associations féministes et de défense des droits humains, revendiquant la refonte globale du code pénal marocain. Un Maroc à deux vitesses ? Ce texte datant de 1963 célèbre ses 50 ans d'existence juridique avec le procès très médiatisé des trois adolescents de Nador poursuivis pour «outrage public à la pudeur» et qui encourent, selon l'article 484 de ce texte, jusqu'à deux ans de prison à cause d'une photo d'un baiser qui circulait sur Facebook. En plus de la première accusation, le garçon qui a embrassé la fille est accusé « d'attentat à la pudeur » sur la personne d'une mineure de moins de 18 ans, il risque donc jusqu'à 5 ans d'emprisonnement. Ce procès reporté au 22 novembre a fait couler beaucoup d'encre. L'arsenal juridique pénal est une nouvelle fois critiqué. Il est jugé «inadapté» au Maroc de 2013. «La justice des mineurs a connu de grands développements dans le monde. La vision du code pénal des mineurs en conflit avec la loi est dépassée», tranche Me Rougani. Pour cette militante associative, l'affaire de Nador est le révélateur «d'un Maroc à deux vitesses». Et d'ajouter , «D'une part, nous avons une volonté politique pour un Maroc moderne, démocratique, protégeant les libertés individuelles, la dignité et les droits de l'homme en général. D'autre part, une deuxième volonté passéiste et conservatrice veut nous faire jeter des années en arrière». Les engagements de RamidLa charte de la réforme du système judicaire, résultat du Dialogue national sur ce sujet, prévoit de «réviser le code pénal et les lois s'y rapportant». Une nouvelle politique pénale devrait être adoptée d'ici 2014. Le code de procédure pénale sera également revu. La charte s'engage à «harmoniser les lois pénales nationales avec les dispositions de la Constitution et les principes des conventions internationales relatives à la lutte contre la criminalité et aux droits de l'Homme, ratifiés et publiés». Cette feuille de route prévoit aussi de «renforcer la protection de mineurs en conflit avec la loi ou victimes d'infraction, et en étendant la protection des mineurs en situation difficile, afin de garantir leur intérêt suprême». Malgré ces engagements fermes, les ONG s'inquiètent du mauvais signal donnés par le procès du baiser de Nador. «La réforme actuelle lancée par la révision de l'article 475 [permettant le mariage du violeur à sa victime] s'apparente à du bricolage. Cette réforme manque de vision législative globale», critique Me Rougani, du Printemps de la dignité. Et d'ajouter : «Nous maintenons notre revendication pour la refonte globale du code pénal et non pas sa révision». Pour rappel, la politique pénale marocaine est classée au 89e rang sur 97 pays par le World Justice Project. En la matière, le Maroc fait figure de mauvais élève avec une note de 0,35/1. L'impartialité de cette partie du système judiciaire ne fait pas mieux avec 0.2/1. Pour l'indépendance de la justice sur l'Exécutif, le système pénal obtient 0.39/1